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Le gouvernement veut recruter des hackers grâce à un clip extrêmement gênant

Si vous vivez dans la matrice et que vous aimez votre pays, le gouvernement a sans doute un job pour vous.
Image : Hector Garcia, Enter the Matrix, Flickr

En 2015, l'image de la France en matière de sécurité a pris un sérieux coup. La Défense n'en mène pas large. La presse braille toute la journée que nos services de Renseignement sont complètement aux fraises. Non contents d'être plus vulnérable qu'il ne le voudrait aux attaques physiques, notre pays a bien du mal à maintenir un semblant de dignité dans le domaine virtuel. Les sites institutionnels, par exemple, sont régulièrement piratés par des gamins trop jeunes pour passer le permis. Bref, c'est la honte.

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Déconfit devant la réputation de nos compétences en matière de systèmes informatiques, Guillaume Poupard, le directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information, a décidé de frapper un grand coup. Il est grand temps d'aligner les compétences de nos fonctionnaires de l'ombre avec celles des meilleurs personnages de NCIS. De faire de la France la première puissance informatique, juste derrière les régimes totalitaires cyberpunks des années 2060.

Aussi, ce matin, le compte Twitter du gouvernement français a posté une annonce d'une gravité exceptionnelle, assorti d'un clip capable de réveiller chez nos concitoyens compétents le bouillonnement exalté d'un élan patriote.

Et si vous travailliez au service de la GouvernementJanuary 21, 2016

L'ANSSI recrute. Et pas n'importe qui. Des jeunes geeks candides aux lunettes parfaitement ajustées qui agissent avec célérité et détermination pour « mettre leurs compétences au service d'une mission capitale afin de préserver notre souveraineté et notre autonomie de décision et d'action dans les domaines politique, diplomatique et militaire et de protéger l'ensemble de nos infrastructures critiques. »

Le clip nous informe que des pirates qui vivent dans une semi-obscurité perpétuelle au milieu de leurs cartons de pizzas n'ont qu'un seul but en tête : attaquer les infrastructures françaises à l'aide de leur AlienWare dont l'interface est disponible en noir et vert uniquement. Si l'on est très attentif aux images, la France c'est avant tout des tuyaux, des routes, des lignes à haute tension. Que l'on ne se méprenne pas : tout ceci mérite en effet d'être préservé.

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En cas d'attaque pirate, c'est la catastrophe. Principalement, les pages Internet de tous les sites français affichent désormais un funeste code 404 et les vols pour Los Angeles sont retardés. Il n'en faut pas plus que le Centre d'Alerte de l'ANSSI, qui comme son nom l'indique sert à alerter quand ça ne va pas, décroche une multitude de téléphones fixes afin de prévenir, mettons, tout le monde.

Une multitude de personnages entrent alors en action : veilleur opérationnel (une sorte d'opérateur téléphonique préposé à la « menace cyber »), veilleur supervision (qui identifie la menace en regardant des diagrammes en camembert), analystes (qui examinent des lignes de code en échangeant des regards paniqués), et experts (qui examinent les mêmes lignes de code mais en restant calmes). Après une réunion en salle de crise où interviennent le Responsable d'opération de cyberdéfense, l'Auditeur et le Développeur, d'autres gens étonnamment inactifs mais néanmoins importants, tout est rentré dans l'ordre. Les coups de fils ont été passés, les écrans d'ordinateurs ont été scrutés, les compétences ont été appliquées. Ce n'est pas encore aujourd'hui que tu mettras nos aqueducs en péril, pirate !

Ce n'est pas le premier grand coup de com' du gouvernement en matière de cyberdéfense. En février 2015, déjà, un clip du Ministère de la Défense nous montrait qu'il était possible de ponctionner toutes les informations de la planète à l'aide d'un simple câble USB. Sans une myriade d'experts militaires qui écoutent du metal, le pays serait déjà tombé.

Malgré eux, ces clips représentent assez bien le rapport de notre gouvernement aux technologies numériques : une vision non actualisée empreinte de stéréotypes susceptibles de mener à des décisions politiques catastrophiques. Comme le rappelle un rapport du Sénat de 2012 dans un superbe euphémisme : « la situation de la France au regard de la menace provenant des attaques informatiques reste encore insatisfaisante. » Pour le moins.

Sera-t-on plus efficaces que l'Inde, les États-Unis ou la Chine pour motiver les citoyens à se mettre au service de la cybersécurité nationale ? Motherboard ne se hasardera à aucun pronostic.