À la sortie du RER, à la station « le Bourget », des dizaines de bus aux moteurs propres attendent les visiteurs. Après quelques minutes seulement de trajet, les passagers sont déposés devant une « forêt de drapeaux » – de grands cylindres blancs sur lesquels tous les drapeaux des pays participants sont représentés. Les visiteurs entrent sur le site ultra-sécurisé de la COP 21.
Pour ceux qui veulent rejoindre le sommet avec leur propre véhicule, la tâche est plus ardue. De nombreux axes parisiens et franciliens ont été fermés, les autres sont sévèrement surveillés par la police et la gendarmerie — des hélicoptères surveillent la zone, des policiers sont postés à chaque pâté de maison, nous roulons au milieu d’un nombre impressionnant de motos en patrouille. Les autorités redoutent une nouvelle attaque terroriste et des actions de militants écologiques. L’autoroute et le périphérique coupés donnent l’impression de traverser une zone fantôme.
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La mise en place de l’état d’urgence au lendemain des attaques du 13 novembre qui ont tué 130 personnes fait polémique depuis quelques jours. Certaines dispositions de l’état d’urgence visent des militants écologiques assignés à résidence, bloqués à la frontière, interdisent ou limitent des manifestations, comme la veille place de la République à Paris.
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En ce premier jour, l’espace qui sera accessible au grand public à partir de mardi n’est pas encore ouvert. Seules sont présentes les délégations des pays négociateurs, les représentants de la société civile accrédités et les journalistes qui couvrent l’événement. Tous se dirigent ensemble vers l’immense hangar de contrôles et, comme à l’aéroport, déposent leurs bagages sur des tapis et passent sous des portiques qui détectent les métaux. Après ces contrôles, le territoire est officiellement géré par les Nations unies.
L’entrée dans ce qui est appelé « le centre de négociations » – une immense zone fermée au sein de laquelle se trouvent les salles plénières où les chefs de gouvernements ont fait leurs discours ce lundi – se fait par une grande avenue, baptisée « Champs-Élysées ».
De chaque côté de cette avenue sont disposés d’immenses hangars, avec chacun une fonction dédiée. Le centre de négociations est en réalité une véritable ville miniature, avec son boulanger, sa banque ou même sa tour Eiffel, de couleur rouge et de taille réduite. Une ruche dans laquelle des milliers de personnes venues des quatre coins du monde vont, durant deux semaines, passer leurs journées.
Un bureau de poste, six restaurants, une salle de prière, 45 points d’eau, un kiosque à journaux, un local pour les objets trouvés, une infirmerie et même un magasin de fournitures de bureau… Tout a été pensé pour que les délégations des pays participants puissent vivre en vase clos alors que le reste de la France est en état d’urgence.
Sur la gauche, deux grands hangars sont dédiés aux bureaux des délégations des différents pays, qui ont chacun pu le personnaliser avec plus ou moins d’effort. L’Inde a vu grand avec un stand très high tech qui comporte un grand mur d’eau, l’Allemagne a placé un bar au centre du sien, des fleurs multicolores décorent celui de l’Indonésie… Dans des salles moins exposées adjacentes à chaque stand, les négociateurs de chaque pays peuvent se réunir pour discuter – ou souffler.
Après les discours des chefs de gouvernement, certains sont venus voir leurs équipes dans le stand dédié à leur pays, comme le président du Pérou Ollanta Humala, en l’honneur duquel la danse traditionnelle « de l’anaconda » ainsi qu’une dégustation de pisco, la boisson nationale alcoolisée, ont été organisées.
Les bureaux des délégations sont également des lieux d’expositions pour les entreprises des pays. La délégation du Conseil de coopération du Golfe, qui comprend des pays pétroliers comme l’Arabie Saoudite ou le Koweït, a dépêché sur place ses entreprises « durables » pour tenter de mettre en exergue ses efforts pour le climat. « Nous voulons montrer que nous contribuons aussi, grâce à nos technologies, à réduire les émissions de CO2 », nous a dit Aline Stanworth, directrice de la communication pour Sabic, une entreprise publique saoudienne venue faire la promotion de son programme d’emballages de bouteilles de lait écologiques.
De l’autre côté de l’avenue, un autre grand hangar accueille la société civile, qu’on appelle ici « les observateurs » : on y trouve les stands de grandes associations comme Climate Alliance ou l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), mais aussi, par exemple, le mouvement spirituel indien Brahama Kumaris, venu plaider pour « l’agriculture yogique », qui combine agriculture biologique et méditation.
Que ce soit dans les halls dédiés aux délégations ou aux associations, des salles de conférences sont mises à disposition pour des débats et des conférences : plusieurs centaines se tiendront un peu partout durant deux semaines, et traiteront de tous les sujets possibles et imaginables en relation avec l’environnement.
Enfin, plus loin, se trouvent les salons V.I.P. et les salles de réunion, auxquelles les journalistes n’ont pas accès – c’est ici, loin du brouhaha de la foule, que les véritables négociations ont lieu avec pour deadline le 11 décembre.
Suivez Lucie Aubourg sur Twitter : @LucieAbrg
Toutes les photos sont d’Étienne Rouillon @rouillonetienne