Des scientifiques chinois viennent de faire un pas supplémentaire vers notre rêve de colonisation de l’espace.
Selon l’Académie des sciences chinoise, ils ont réussi à contrôler le développement d’embryons de souris à bord de SJ-10, un satellite lancé en orbite le 6 avril depuis le site de Jiuquan au nord-ouest de la province de Gansu, en Chine.
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« Ce succès constitue une première étape dans le développement des technologies qui permettront de concrétiser le voyage interstellaire et la colonisation de nouveaux monde, » explique Enkui Duan, le directeur scientifique du projet et chercheur au Laboratoire de State Key sur les cellules souches et la biologie de la reproduction, à Beijing.
Je me suis entretenue avec Duan lors de son voyage nocturne jusqu’à Sizi Wangqi, en Mongolie intérieure, où le satellite a atterri le 18 avril dernier ; le but de son expédition était de récupérer les embryons qui avaient survécu et de les ramener à Beijing pour qu’ils soient analysés.
« L’expérience que nous avons menée dans l’espace constituait un défi de taille. Nous avons embarqué plus de 6000 embryons de souris sur le satellite SJ-10 en utilisant notre nouveau dispositif de congélation et décongélation de mammifères de masse, » explique Duan.
L’équipe a développé un système de culture d’embryons et l’a placé dans une petite chambre bien isolée fournissant les conditions idéales au développement d’embryons dans l’espace. Tandis que la chambre était en orbite, une caméra prenait des photos des embryons se développant en microgravité.
Avec l’aide de la technologie d’imagerie médicale, les chercheurs ont pu observer comment les embryons de mammifères se sont développés jusqu’au stade de blastocystes durant quatre jours. Les blastocystes sont des structures formées au tout début du développement des mammifères (cinq jours après la fécondation chez les humains.)
Les chercheurs vont maintenant comparer les embryons développés dans l’espace à ceux produits dans conditions de laboratoire standard, sur Terre, afin d’examiner de possibles différences au niveau cellulaire et moléculaire.
Sur le long terme, l’équipe tentera de définir comment les humains pourraient vivre dans l’espace en bonne santé, se reproduire, et avoir des bébés eux aussi en parfaite santé. Sur le court terme, il s’agira d’évaluer à quel point les séjours prolongés dans l’espace peuvent affecter la fertilité. En d’autres mots, ce n’est pas l’ambition qui les arrête.
« Nous voulons que les humains réalisent leur rêve de survivre et de se reproduire dans l’espace, » explique Duan. « À présent, nous avons prouvé que l’étape la plus délicate du développement embryonnaire pouvait être atteinte en microgravité. »
Duan et son équipe travaillent sur depuis plus de deux ans sur les techniques de la reproduction appliquées à l’espace. Ils ont fait leur première tentative sur des embryons de souris en 2006 : l’équipe avait placé des embryons au stade de quatre cellules sur le satellite SJ-8.
« Malheureusement, ces embryons ne s’étaient pas développés correctement à cause de la température trop élevée du système dans lequel ils étaient conservés, si l’on en croit les données transmises par le satellite, » précise Duan, qui n’a pas abandonné pour autant.
Lui et son équipe ont passé les années qui ont suivi à tenter de persuader les autorités chinoises que « sur le chemin de l’exploration spatiale, l’échec était inévitable, » et à réclamer une seconde chance. Pendant ce temps-là, Duan collaborait avec les chercheurs de l’Institut de Physique technique de Shanghai afin d’améliorer son équipement de culture cellulaire.
Duan consent à avouer que les humains sont encore très loin de l’horizon de la colonisation de l’espace, tout en insistant pour dire que son équipe va dans la bonne direction.
« Comme nous le savons, après que l’embryon se soit développé en blastocyste, il doit s’implanter dans l’utérus pour se développer en tant que fœtus. Maintenant, nous voulons savoir si l’embryon développé dans l’espace pourrait s’implanter correctement dans un utérus afin de devenir, lui aussi, un fœtus en bonne et due forme, » conclue Duan.
« Nous devrons nous concentrer sur la possibilité de réaliser une implantation d’embryon, et sur la perspective qu’une femme puisse mener une grossesse à terme dans l’espace. Ensuite, à nous la mer d’étoiles ! »