Aujourd’hui, les maillots de foot sont tout pourris. Quand ils ne sont pas à l’effigie du dessert préféré des bébés ou recouverts de sponsors ridicules, ils sont bourrés de fautes d’orthographe et portés par des mecs auxquels vous auriez honte de serrer la main. Cependant, il a autrefois existé de nombreux maillots esthétiques, innovants, et parfois même, totalement parfaits.
Aussi, mon pote Romain est probablement le seul mec sur Terre qui, après avoir pratiqué le foot à haut niveau – il était gardien de but en première division nationale quand il était junior – a fini par devenir designer de mode. En tant que membre de ce monde impitoyable qu’est le vêtement, il a donné son avis sur des critères purement esthétiques, et dénués d’a priori sur les différents clubs et sélections nationales dont on a évoqué les maillots. Même à propos du pire club de l’histoire de l’humanité – l’Olympique de Marseille.
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Romain, devant sa collection de maillots de sports américains. La centaine de maillots de foot dont il est propriétaire est restée chez ses parents, en Bretagne.
1ère catégorie : les innovations technologiques
CAMEROUN 2002/2004
En 2002 puis 2004, le Cameroun a tout tué. Leur équipementier Puma leur a filé deux tenues qui ont marqué les esprits, et qui ont failli leur coûter très cher. Tout d’abord, lors de la coupe du monde de 2002 en Corée du Sud, ils ont débarqué avec un maillot sans manche. Un débardeur, en plus con. Manque de pot, la FIFA n’a pas aimé l’effort de style des Lions Indomptables, et leur a interdit de le porter lors de la compétition. Deux ans plus tard, la marque leur file une combinaison intégrale, destinée à empêcher les adversaires de leur tirer le maillot – et à mettre en avant leur corps sculptural. Là encore, le maillot est interdit, et le Cameroun est menacé de se faire enlever six points dans la course aux qualifications pour la coupe du monde 2006.
L’avis mode de Romain : « Selon moi, une mauvaise décision de la part de la FIFA, qui bride l’élan de créativité dont a fait preuve leur équipementier. Ceci dit, les T-shirts sans manche, c’est quand même pourri. »
A.S ROMA 2004
Ça va mal pour la Roma en 2004. L’équipe échappe de justesse à la relégation en Série B et termine à trois points de la zone rouge. Pourtant, Rome se démarque cette année-là par l’acquisition d’un bête de maillot de réserve couleur orange, dont la particularité se situe au niveau du col – un col « cheminée » qui ressemble à une cheminée. Ce truc ajoutant une touche de chic aux coéquipiers de Francesco Totti, il a de suite attiré le défenseur central Philippe Mexès, tout catogan dehors et fraîchement débarqué de l’AJ Auxerre.
L’avis mode de Romain : « Pour l’avoir essayé, j’admets qu’il est très confortable, et protège efficacement du froid. Le col cheminée gratte, mais pas trop. Une belle réussite. »
JUVENTUS DE TURIN 2004
2004 est l’année du progrès pour la Juventus. Un an après son énième Scudetto, le club choisit pour sa tenue à l’extérieur non seulement une couleur rose saumon pour le moins discutable, mais accepte de nouer une idylle avec la modernité. En effet, le maillot est entièrement Waterproof afin de protéger les joueurs d’un éventuel ouragan. Bien qu’on n’arrive toujours pas à capter pourquoi les dirigeants du club italien avaient équipé leurs joueurs contre l’apocalypse, on sait en tout cas que l’équipe tuait toutes les autres en termes de superstars bro ; elle comptait dans ses rangs Nedved, Buffon et Del Piero.
L’avis mode de Romain : « Il est vraiment Waterproof. Mais j’avoue ne pas en comprendre l’utilité. Aussi dans le monde du football, le rose saumon était branché en 2004. »
2ème catégorie – Les gardiens
LES GARDIENS DE PREMIER LEAGUE
Défiant tous les codes du chic de nos voisins anglais, les gardiens de Premier League ont la tragique habitude de se saper comme des sapins de Noël sous taz. À commencer par David Seaman, qui a associé ces maillots racés à un combo moustache/queue de cheval. De loin, il ressemblait à un mousquetaire grec. Il fait d’ailleurs toujours des émules en Angleterre, comme en témoignent les tenues de Peter Schmeichel, et plus récemment Tim Howard ou Joe Hart, l’actuel gardien de la sélection anglaise.
L’avis mode de Romain : « Je souligne la prise de risque, mais ne reconnaît pas les bienfaits de ces maillots sur leur jeu. »
JORGE CAMPOS
Le fantasque gardien mexicain est allé loin dans l’affirmation de son style 100% Amérique centrale. Abusant de toutes les gammes de fluo, du rose au vert – en passant par le jaune et le bleu – on s’en souviendra comme le gardien le plus ColorBlock de l’histoire du football. Outre le fait de dessiner lui-même ses maillots, il aura marqué un nombre impressionnant de buts – pour son poste – au cours de sa carrière, genre cinq.
L’avis mode de Romain : « Comme il a raté les années 1980, il s’est rattrapé en anticipant avec dix ans d’avance la new-rave. Hyper bien. »
JÉRÉMIE JANOT
Gardien emblématique de l’AS St-Étienne de notre génération, il est connu pour son franc-parler, son tatouage tribal et ses maillots à thème. Soutenu par son équipementier de l’époque, Duarig, on l’a laissé essayer tout ce qu’il voulait. Du déguisement de Spiderman au maillot à pois type Tour de France 2030, sans oublier la panthère rose, ou l’imprimé écossais pour fêter la Saint Patrick, fête irlandaise, il peut facilement être couronné du titre de gardien le plus déconneur de l’histoire de la Ligue 1.
L’avis mode de Romain : « Il ne fait pas les choses à moitié. C’est bien de voir que même s’il fait preuve d’un sens de l’esthétique contestable, il n’en demeure pas moins un mec avec qui j’aurais envie de boire une bière. »
3ème catégorie – Les maillots trop beaux
BORUSSIA DORTMUND 1997
En 1997, le Borussia Dortmund, outsider au début de la compétition, remporte pour la première fois de son histoire la Ligue des Champions. C’est au cours de la même saison que le club affiche des couleurs type balle de tennis Dunlop. Le club du bassin de la Ruhr a misé sur cette couleur pour rappeler celle des vêtements de travail de ses supporters, ouvriers pour la plupart. C’est la couleur dont aurait dû se servir les managers du réseau social Virb s’il n’était pas mort au bout d’un mois.
L’avis mode de Romain : « Un must-have pour aller fêter son titre au Berghain. »
HULL CITY 1992
On passe au niveau supérieur avec Hull City et cet accoutrement sauvage, qui fait référence directe au nom du club, les Hull City Tigers. Un imprimé animal du meilleur effet, type Tony la mascotte des céréales Frosties, mais qui ne les a pas empêché de finir 20ème de seconde division malgré l’instinct de grand prédateur insufflé par ce motif bestial.
L’avis mode de Romain : « Mention spéciale au sponsor Bonus, qui apporte la touche finale à cet ensemble déjà bien animé. »
OLYMPIQUE DE MARSEILLE 1994
Après la première victoire d’un club français en Ligue des Champions face au grand Milan A.C, l’OM va connaitre la relégation en deuxième division à cause d’une regrettable affaire de matchs truqués. C’est pourtant cette année-là qu’ils porteront l’un des plus beaux maillots de l’histoire du football. L’équipementier Reebok n’a pas raté son entrée en matière, loin du brouillard maléfique de la première division et du trafic d’influences perpétré par ce grand pipe de Bernard Tapie.
L’avis mode de Romain : « J’apprécie beaucoup le travail sur les logos – la double signature logo géant / logo poitrine en oblique, pour un look minimal assez réussi. »
ALLEMAGNE 1994-1996
Les Allemands ont toujours eu de purs équipements. Celui-ci ne déroge pas à la règle, malgré un schéma de couleur difficile d’accès en ce qui concerne leur maillot extérieur, à savoir une harmonie de vert, jaune, rouge et noir. Notons qu’ils gagneront l’Euro 1996, mais en blanc. Tellement classe, qu’on leur pardonnerait presque la demi-finale de 1982 si on en avait quelque chose à foutre.
L’avis mode de Romain : « Le football est un jeu simple : 22 hommes qui courent après un ballon durant 90 minutes, et à la fin, c’est toujours l’Allemagne qui gagne. »