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Culture

Foxcatcher est le seul DVD que vous devriez éviter à tout prix ce mois-ci

Mais pour ceux qui n'aiment pas les trucs nuls, il y a un coffret Mad Max et « Alleluia ».

Antonin et Étienne sont les fondateurs et présentateurs du Cinéma est mort, la meilleure émission de cinéma sur les radios françaises, diffusée sur Canal B. Ils parleront chaque mois sur VICE.com des sorties DVD et Blu-Ray qu'ils adorent et des sorties DVD et Blu-Ray qu'c'est pas la peine.

FOXCATCHER
Réalisateur : Bennett Miller
Éditeur : TF1, sortie le 20 mai 2015

Un type un peu minable est persuadé d'être un génie du sport alors que tout ce qui nous est montré à l'écran nous prouve le contraire ; forcément ça finit par se passer mal, mais le mec en question n'en démord pas et conserve contre vents et marées ses illusions de grandeur. Un nouvel Adam McKay avec Will Ferrell dans le rôle-titre ? Non, il s'agit de Foxcatcher.

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Après le tollé suscité par Interstellar le mois dernier, économisons le clavier des haters susceptibles et redescendons d'un cran en nous attaquant cette fois à un réalisateur ayant moins les faveurs du public. Bennett Miller, cinéaste adoubé quasi unanimement par la critique, a en effet offert à 2015 son premier flop. Pas un navet, mais un film pas du tout à la hauteur de l'espoir qu'on pouvait placer en lui.

Car le film aura pris son temps à sortir depuis sa présentation à Cannes en 2014, où il était l'un des rares représentants des États-Unis d'Amérique – pays qui a en ce moment à mal fou à produire du cinéma à la fois ambitieux et généreux. Heureusement, la riche héritière Megan Ellison veille toujours au grain et file sa thune à des mavericks comme Miller, P.T. Anderson, Kathryn Bigelow ou Spike Jonze pour produire leurs projets relativement coûteux et jugés trop dangereux par des studios devenus désespérément frileux.

Le drame, c'est qu'en général, ce n'est pas très convaincant non plus. Ça multiplie les signes extérieurs du genre « cinéma d'auteur » (opacité des personnages, rythme lent, thématiques ambitieuses, photographie aux couleurs éteintes), mais le plus souvent c'est tout juste joli à regarder et peu chiant. C'est tout à fait le cas de Foxcatcher, film qui m'a juste donné envie de me retaper les quatre saisons d' Eastbound and Down, série avec laquelle il partage la quasi-totalité des thématiques.

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Non pas que Bennett Miller ait directement copié sur son voisin. On trouve dans Foxcatcher une thématique qui a l'air de lui tenir à cœur depuis son premier projet (le biopic Capote), à savoir les relations toxiques et la vampirisation consentie entre deux personnages. Mais au final, à l'élégance aristocratique de sa mise en scène, je préfère nettement la débilité pop d'Eastbound and Down, auquel je n'ai pas pu m'empêcher de penser pendant toute la projection.

D'une part, parce que c'est carrément plus drôle évidemment, et d'autre part, comme dans toute bonne comédie, parce que le drame n'est jamais bien loin – la série exagère tellement dans le grotesque qu'elle en arrive à devenir réellement flippante et dérangeante par endroits, et donc beaucoup plus profonde dans son portrait du mec (Kenny fucking Powers) qui prend son rêve américain pour une réalité et entraîne un pauvre type dans son sillage (l'incroyable Stevie de Eastbound and Down, contre Channing Tatum dans Foxcatcher).

Mais le film serait tout de même sauvable si Bennet Miller ne commettait pas une faute impardonnable en fin de film. Celle de tuer Mark Ruffalo. Or, comme chacun le sait, ON NE TUE JAMAIS MARK RUFFALO, il a vraiment l'air trop sympa.

ALLELUIA
Réalisateur : Fabrice Du Welz
Éditeur : WILD SIDE, sortie le 6 mai 2015

Attention, film monstrueux. Comme beaucoup j'avais raté le film lors de sa sortie en salles, le film étant sorti en France sur une pauvre combinaison de 4 copies (le public de ce genre de film étant restreint et se déplaçant de moins en moins en salles, on ne peut presque pas blâmer le distributeur). Ce n'est rien de dire que j'attendais la sortie vidéo de Alleluia de Fabrice du Welz. Et contrairement à cette loi immuable qui veut que la déception soit toujours à la hauteur de l'attente, j'ai pris une grosse claque.

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Réalisé dans l'urgence et l'intransigeance afin de cautériser les plaies laissées ouvertes pas le tournage catastrophique de Colt 45 (sorti dans l'indifférence en été 2014), sur lequel Du Welz s'est fait laminer par les cachetonneurs Joey Starr et Gérard Lanvin, puis éjecté par le mogul Thomas Langmann, Alleluia est porté par une énergie dévastatrice.

Révélé en 2001 par Calvaire – authentique réussite de film de genre jouant merveilleusement bien de la tension entre l'horreur et la farce grotesque –, Du Welz revient à un ton similaire après s'être enfoncé dans son Apocalypse Now de poche qu'est Vinyan (film parsemé d'éclats de grâce mais malheureusement beaucoup moins impressionnant que son making of).

Inutile d'en savoir trop avant d'insérer le DVD Wild Side dans votre lecteur, sachez juste que vous entrerez dans un territoire incertain, bien loin des zones de confort forgées au fil de votre vie de spectateur. Les scènes s'enchaînent sans qu'on puisse prédire l'émotion qui sera sollicitée dans la suivante. Vous ricanez en pensant regarder un film d'horreur à la lisière du porno, Du Welz vous fout une claque en vous rappelant que vous regardez un film d'amour bouleversant ; à peine êtes-vous conquis par la beauté de celle-ci que Du Welz vous rappelle que vous êtes le spectateur d'une histoire furieusement amorale.

Alleluia est porté par un duo de comédiens qui, dans un monde parfait aurait remporté les césars, les oscars mais aussi une étoile au guide Michelin. Lola Dueñas rejoint illico Laurent Lucas dans le cercle restreint des acteurs les plus magnétiques du monde. Au diapason de la mise en scène de Du Welz, leur jeu n'est jamais où on l'attend. Ils pourraient être à la lisière du ridicule par moments, mais ils ont sans cesse la Grâce.

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Le Cinéma est ressuscité, en gros – ALLELUIA.

LA CAPTIVE AUX YEUX CLAIRS
Réalisateur : Howard Hawks
Éditeur : Warner, sortie le 10 avril 2015 L'été dernier, les Éditions Montparnasse ont perdu les droits du catalogue RKO. Cet événement a fait le bonheur des crevards comme moi, lesquels ont pu en profiter pour acheter à que dalle des DVDs qu'ils n'auraient bientôt plus le droit de commercialiser. Seul grand studio hollywoodien de l'âge classique ayant disparu aujourd'hui, la RKO a produit pléthores de films déments, d'Orson Welles à Jacques Tourneur en passant par John Ford ou Richard Fleischer. Bref on pourrait ne regarder que ces films-là, que finalement ça suffirait.

Mais il fallait alors se résoudre à regarder des films dans des versions le plus souvent dégueulasses. Copies pas géniales, encodage tout pourri, colorimétrie foireuse, et parfois même boostage du son en 5.1 pour des films à l'origine en mono, les Éditions Montparnasse n'avaient a priori pas le choix, mais on a quand même l'impression que parfois, le boulot avait été bien salopé.

J'attendais donc avec impatience les rééditions des titres chez Warner, qui a récupéré ses droits sur le catalogue. Non pas que Warner soit l'éditeur le plus consciencieux du marché, mais on peut toujours espérer un sursaut de conscience professionnelle.

Pour l'instant je n'ai pu voir que La Captive aux yeux clairs de Howard Hawks, pas le titre le plus prestigieux ni commercialement porteur du catalogue (qui comprend aussi Citizen Kane qui sort ce mois-ci dans une édition autrement plus honorable alors que bon, c'est pas Vertigo non plus…) mais à la lumière de cette édition, il y a fort à parier qu'il n'y a pas grand-chose à espérer de ces rééditions. L'image comme le son sont absolument nuls et a priori, c'est le même master qui semble avoir été utilisé sous un emballage différent (et bien plus moche en plus).

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Il n'y a donc pour le moment aucun moyen de voir La Captive aux yeux clairs dans une copie vraiment correcte. Mais que ça ne vous décourage pas – précipitez-vous dessus quand même. Le film est tellement prenant que par-delà les pixels foireux, on parvient tout de même à sentir l'odeur de feu de bois, de whisky frelaté et de sueur séchée. Je crois que je pourrais vivre dans ce film.

TROIS FILMS DE NICOLAS ROEG EN BLU-RAY
Réalisateur : Nicolas Roeg
Éditeur : Potemkine, sortie bientôt (on l'espère)

Ne cherchez pas ce coffret en magasin, vous ne le trouverez pas. Il n'existe pas encore, peut-être n'existera-t-il jamais, et de toute façon vous n'avez sûrement pas foutu les pieds dans un magasin de vidéo depuis des années, voire jamais, c'est pourquoi vous ne remarquerez pas son absence. C'est que le marché de la vidéo ne va pas très fort, probablement encore moins bien que celui du disque (la VHS ne jouant heureusement pas le rôle du vinyle). Depuis qu'on tient cette colonne, les commentateurs nous le font d'ailleurs systématiquement remarquer : « Qui achète encore des DVDs, sérieux ? ».

Je dois reconnaître que personnellement, je n'achète plus de DVD neuf, la résolution des écrans existant (et dont j'ai la chance d'être muni) ne supportant plus la définition de ce format daté. En revanche, depuis pas mal de temps je prends un immense plaisir à remater mes petits films chéris dans leur version Blu-Ray, au point qu'il est désormais difficile pour moi de me taper un DVD si je sais qu'une version Blu-Ray existe. Et comme je suis un peu à 2 euros près, je télécharge évidemment la version pirate du Blu-Ray (souvent moins bonne qu'un vrai Blu-Ray, mais meilleure qu'un DVD), et ce, même si j'ai le DVD à disposition.

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Principale victime de tout ça, les films les moins cotés en bourse. Vous trouverez sans peine une grosse merde de type Avengers (ou une tuerie comme Snowpiercer) dans un rip Blu-Ray de toute beauté ; en revanche pour trouver une copie fidèle d'un truc obscur – aussi merdique soit-il – ou d'un classique comme La Captive aux yeux clairs , il n'y a pas de marché. L'éditeur sachant qu'il en écoulera à peine quelques milliers d'exemplaires et les coûts de création d'un Blu-Ray étant énormes, les mecs préfèrent s'abstenir – l'éditeur Wild Side pour Alleluia, par exemple. C'est mort, donc.

L'excellent éditeur Potemkine a la plutôt chouette initiative de lancer une souscription participative pour pouvoir sortir en Blu-Ray les films de Nicolas Roeg, réalisateur dont ils ont les droits et qu'ils ne sortiront, en cas d'échec, qu'en DVD. C'est une bonne initiative, car si les financements participatifs, il y en a un peu trop en ce moment pour financer tout et n'importe quoi – et surtout n'importe quoi –, il n'y a ici pas d'arnaque. Ce que vous mettez en thune, vous le récupérez en valeur marchande sur les éditions récupérées en cas de succès.

Et voir le plastiquement irréprochable et incroyablement flippant Ne vous retournez pas en Blu-Ray, ça doit être super chouette. Balancez la thune, c'est ici que ça se passe.

LA TRILOGIE MAD MAX
Réalisateur : George Miller
Éditeur : Warner, sortie le 6 mai 2015

Alors que vient de sortir l'impressionnant Fury Road, les trois premiers Mad Max de Byron Kennedy, George Miller et Joseph Campbell ressortent sans surprise en Blu-Ray (jusqu'à la sortie probable d'un nouveau package d'ici quelques mois qui inclura le quatrième épisode). Rien de neuf depuis le dernier coffret à part un nouveau visuel, pas même la présentation enregistrée par Mel Gibson proposée sur le dernier Blu-Ray américain, ni le commentaire audio de notre acteur et réalisateur préféré à tous – que je ne fais qu'imaginer pour le moment et que j'espère très fort dans mon petit cœur tant il est passionnant dans l'exercice sur ses propres films. On y apprendrait alors tout ce qu'il a appris avec George Miller et qu'il n'a ensuite eu de cesse de perfectionner jusqu'au prodigieux Apocalypto. Cela n'arrivera sûrement jamais, il faudra que j'aille lui demander moi-même. Rien non plus sur ces Blu-Ray pour rappeler que Miller n'est pas que le créateur de Max et que sa filmographie sans faute est à redécouvrir, à commencer par son grand mélodrame Lorenzo, qui attend lui aussi un support correct.

Il faut regarder ailleurs pour trouver des compléments à la tétralogie Mad Max : quelques vidéos de tournage sur Internet, ou le coffret regroupant les quatre premiers films de l'autre maître du cinéma australien Peter Weir (à qui Miller a piqué le chef-opérateur et auquel Mel Gibson doit sans doute son sens de l'immersion), sorti il y a quelques années, où l'on trouve 40 000 ans de rêves , un documentaire réalisé en 1997 par George Miller lui-même, où il revient entre autres sur le héros aux mille et un visages qu'est Max Rockatansky, mais aussi sur son rapport avec Jung et les aborigènes. Les curieux, s'il en reste, iront également jeter des coups d'œil sur le blog de Seri Zed. Comme on vous l'a dit la semaine dernière, ce fou maniaque entreprend depuis quelques années un travail archéologique sur la création de ces films, en allant à la rencontre des techniciens, acteurs, cascadeurs, preneurs de son, chauffeurs, cantiniers, c'est-à-dire tous ceux qui ont participé de près ou de loin à l'histoire de Max. À l'exception de George et Mel pour le moment. Mais rien n'est perdu, hein.

Les mecs du Cinéma est mort sont sur Twitter.