t-rex
Pasha van Bijlert. Photo de gauche : Hanneke Jacobs. Photo de droite : Henk Caspers.
Life

Tout ce que vous pensez savoir sur le T-Rex est faux

« Dans Jurassic Park, le dinosaure est dépeint comme un monstre, mais c’était loin d’en être un. »

La pilule pourrait être dure à avaler pour les fans de dinosaures, mais des chercheurs du Centre de biodiversité néerlandais Naturalis ont récemment découvert que le Tyrannosaurus Rex, sans doute le dinosaure le plus redouté et le plus impressionnant de tous, se dandinait à la fin du Crétacé (il y a environ 68 millions d'années) à moins de 5 km à l'heure. Ce n'est pas très rapide : c'est à peu près le rythme d'un humain qui marche lentement.

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« Se déplacer à 4,6 km par heure, c'est normal pour un animal », explique Pasha van Bijlert, le spécialiste qui a fait cette découverte. Les bipèdes comme les autruches et les humains préfèrent marcher entre 4 et 5 km par heure, et il en va de même pour les animaux à quatre pattes comme les chevaux et les gazelles. « Mais lorsqu'une gazelle a un guépard à ses trousses, elle peut facilement atteindre 90 km par heure, poursuit van Bijlert. La vitesse de marche est davantage liée à la paresse générale de l'animal. Pourquoi courir si ce n'est pas nécessaire ? » Il n'a pas encore tenté de calculer la vitesse maximale du T-Rex, mais une autre étude suggère qu'elle pourrait se situer entre 20 et 29 km à l'heure, ce qui reste assez lent.

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Trix en train d'être assemblé. Photo : Hanneke Jacobs

Van Bijlert, 27 ans, a commencé par étudier la médecine. Un jour, alors qu'il s'ennuyait en cours, il a lu un article sur l'excavation d'un squelette de T-Rex nommé Trix, qui est maintenant exposé au musée Naturalis de Leiden. Inspiré par les paléontologues impliqués dans le projet, il a compris qu'il devait suivre ses passions. Il a abandonné la médecine et s'est inscrit en science du mouvement humain.

Mais van Bijlert n'a jamais oublié Trix – même ses professeurs étaient au courant de sa fascination. Vers la fin de ses études, ils l'ont poussé à appliquer ce qu'il avait appris sur le mouvement humain pour mieux comprendre son animal préhistorique préféré. Il a alors appris à construire lui-même les modèles 3D qui l'aideraient à simuler la façon dont Trix marchait de son vivant. En 2018, il a commencé à collaborer avec Naturalis pour son mémoire, et il travaille pour eux en tant que spécialiste 3D et anatomiste depuis lors.

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« La physique nous enseigne que les choses ont une fréquence de résonance. Une fois que vous avez trouvé le bon rythme, vous obtenez beaucoup plus de mouvements avec beaucoup moins d'efforts, dit-il tout en faisant rebondir un petit poids attaché à l'extrémité d'un élastique. Lorsque je lâche ce poids, il rebondit de haut en bas. C'est sa fréquence naturelle. Si je choisis un rythme différent, trop rapide ou trop lent, je dois fournir beaucoup plus d'efforts. »

« Quand on commence à décomposer un peu la mythologie, on constate que cet animal existait dans son propre écosystème. C’est ce qui m’intéresse et ce que j’essaie de creuser. » - Pasha van Bijlert

De même, lorsqu'un T-Rex marchait, le balancement de sa queue, grâce aux ligaments servait de contrepoids. « En supposant que le rythme de ses pas est égal à sa fréquence naturelle, nous pouvons construire un modèle physique et reconstruire sa vitesse de marche à partir des mouvements de sa queue. »

D'une certaine manière, les découvertes de van Bijlert montrent que le T-Rex était un animal comme les autres. « Dans des films comme Jurassic Park, dont je suis un grand fan, le dinosaure est dépeint comme un monstre, mais c’était loin d’en être un, dit van Bijlert. Quand on commence à décomposer un peu la mythologie, on constate que cet animal existait dans son propre écosystème. C’est ce qui m’intéresse et ce que j’essaie de creuser. »

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Par exemple, l'équipe travaille sur une animation scientifique exacte d'un T-Rex avançant vers le spectateur. « Dans cette animation, le dinosaure ne ressemble pas au monstre que nous connaissons dans Jurassic Park, poursuit van Bijlert. Certains biologistes à qui je l'ai montré m'ont dit qu'il avait presque l'air mignon. C'est là que j'ai pensé, mission accomplie. »

Selon van Bijlert, la communauté paléontologique est divisée en deux. D'un côté, il y a les paléontologues classiques qui n'aiment rien tant que de déterrer des os et de les mesurer pour pouvoir insérer leurs résultats dans l'arbre de l'évolution ; de l'autre, il y a les chercheurs qui s'intéressent davantage à la façon dont les dinosaures se déplaçaient, se comportaient et étaient liés à leur écosystème.

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Le crâne d'un Triceratops. Photo : Servaas Neijens.

Lorsqu'on lui demande à quoi sert l'étude des dinosaures au XXIe siècle, van Bijlert répond que ces créatures constituent souvent un tremplin important pour inciter les enfants à s'interroger sur le monde naturel en général. « Je pense que les gens sous-estiment l’importance de l'étude des dinosaures, dit-il. En fin de compte, un enfant ne deviendra peut-être pas paléontologue, à moins qu'il ne soit fou comme moi, mais il deviendra peut-être un autre type de scientifique. Tout cela grâce à un dinosaure. »

De plus, comprendre comment l'un des plus grands bipèdes ayant jamais vécu se déplaçait peut également aider à comprendre d'autres problèmes de la robotique moderne. « Lorsqu'un humain marche, il ne tombe pas très souvent et n'utilise pas beaucoup d'énergie, explique van Bijlert. Les robots, en revanche, ont besoin de beaucoup plus d'énergie pour rester stables, car ils n'ont pas de ligaments élastiques qui stockent l'énergie. » Ce problème existe déjà dans les petits robots, mais il ne fera que s'amplifier lorsque nous construirons des machines plus grandes.

« C’est un peu une idée farfelue, dit van Bijlert, mais je pense que je serai bientôt en mesure de prouver que le corps des dinosaures facilite le mouvement de manière encore plus intelligente que celui des êtres humains. »

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