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En Tunisie, on continue d'aller en prison pour un joint

Un an de prison ferme, c’est la sentence pour des milliers de jeunes en Tunisie chaque année, coupables d’avoir fumé un joint de cannabis.

« Je dis à ma mère que je vais acheter des cigarettes, je pars, et je reviens un an après », résume Seif Matmati, guitariste de 26 ans. Originaire de Khaznadar, un quartier populaire de Tunis, il a vu sa vie basculer en l'espace de cinq minutes une nuit de décembre 2014. À sa sortie du domicile familial, il se fait attraper par la police : « C'est la loi de la jungle, […] des mecs en civil te sautent dessus. » Les policiers retrouvent sur lui la feuille à rouler qu'il vient d'acheter tout à fait légalement. Mais ce seul élément suffit à l'emmener au poste, avec au passage, une fouille tout en muscles et sans mandat de la maison de ses parents. Au poste, ils retrouvent également un joint caché dans son portefeuille. Condamné à un an ferme pour usage de drogue, il est transféré à la prison de Mornaguia, où il purgera finalement sept mois et 25 jours avant d'être libéré par grâce présidentielle.

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L'histoire de Matmati est celle de milliers de jeunes Tunisiens. Selon le ministère de la Justice, les détenus au titre de la « Loi 52 » – relative aux stupéfiants – représentaient 28 pour cent de la population carcérale en 2016, soit 6 700 personnes. Cette loi a été adoptée en 1992 sous l'impulsion du dictateur Zine El Abidine Ben Ali suite à l'affaire de la « Couscous Connection » – une histoire de trafic de drogue entre Tunis, Belleville et les Pays-Bas dans laquelle était impliqué le frère du président. Après cet épisode fâcheux, la loi 52 était censée prouver l'exemplarité du pays dans la lutte contre les trafiquants. Mais en réalité, elle vise surtout les consommateurs de "zatla" [shit], qu'elle condamne à un an de prison ferme et 1 000 dinars d'amende minimum. Très vite après son adoption, la loi devient l'outil absolu du pouvoir pour réprimer la jeunesse. « Nous, les jeunes en Tunisie, on dit qu'on est en liberté conditionnelle […]. Tout le monde a un an de prison et 1000 dinars (soit 400 euros) qui lui planent au-dessus de la tête », glisse Matmati, perplexe devant son café.

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