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Crime

Au Mexique aussi, Taxis et Ubers s’opposent, mais eux pourraient trouver un terrain d’entente

Les taxis officiels de Mexico — 140 000 chauffeurs — sont connus pour être peu fiables et parfois dangereux à cause des braquages. Cette mauvaise réputation ouvre la voie à des services comme Uber.
Photo by Marco Ugarte/AP

Les taxis qui circulent dans les rues de Mexico sont un exemple classique du casse-tête à la mexicaine.

La capitale du Mexique est la ville qui compte le plus de taxis dans le monde, avec une flotte de près de 140 000 chauffeurs officiels et enregistrés. Les taxis de la ville sont aussi particulièrement bon marché — la course minimum est à 50 centimes d'euros.

Mais les taxis de la mégalopole mexicaine — 20 millions d'habitants — sont aussi connus pour être peu fiables, réputés pour ne pas respecter les réglementations, et même parfois dangereux.

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Il est souvent conseillé aux touristes de ne pas héler un taxi dans les rues de Mexico, sous peine d'être pris en charge par un automobiliste peu honnête qui cherche à se faire un peu d'argent. Les braquages dans les taxis sont aussi considérés comme un problème récurrent.

« Tellement de mauvaises expériences, » expliquait, il y a peu, un client de taxi de Mexico, à l'Associated Press.

Selon les chauffeurs de taxi, la paperasserie administrative et les charges — que la mairie leur impose — les empêchent de garder leurs voitures en meilleur état pour offrir le meilleur service possible.

Tous ces problèmes se sont retrouvés au coeur du débat en 2013 quand Uber est arrivée dans la ville. Le service proposé par l'entreprise américaine — une application mobile qui permet de commander un chauffeur — est aussi proposé par d'autres compagnies présentes à Mexico, ce qui a mis le feu aux poudres dans un marché du transport souvent sous-tension dans la capitale.

Ces dernières semaines, des chauffeurs de taxi de la ville ont organisé des manifestations contre Uber et Cabify — une application similaire. Des témoignages faisaient aussi état de violentes confrontations dans les artères embouteillées de Mexico. Des chauffeurs employés par ces applications mobile et des chauffeurs officiels de taxi en seraient venus aux mains.

Une altercation entre des conducteurs de taxi et la police chargée des transports, au cours d'une manifestation contre Uber, au coeur de Mexico. (Photo par Marco Ugarte / AP)

En plus des taxis officiels, il y aurait environ 45 000 taxis illégaux qui circulent dans la ville, selon le gouvernement. Les véhicules fonctionnant avec une application mobile seraient eux entre 5 000 et 10 000 dans Mexico.

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Les taxis officiels ont déclaré que les services proposés par les applications mobile étaient une forme de concurrence « déloyale » et « illégale ».

« Les chauffeurs Uber n'ont pas les documents administratifs nécessaires. Ils ne sont ni qualifiés, ni autorisés à fournir un service de transport, » explique à VICE News, Vicente Soto, le 25 mai, lors d'un rassemblement anti-Uber.

Soto, qui fait le taxi depuis 30 ans à l'aéroport international de Mexico, explique que les applications comme Uber font du mal aux entreprises qui répondent aux règles strictes — et onéreuses — mises en place par les autorités.

Le chauffeur de taxi lambda peut dépenser jusqu'à 6 250 euros en frais imposés par le gouvernement.

« La loi dit que vous devez acquérir une autorisation spéciale qui coûte 4 640 euros, puis il faut payer d'autres documents, qui font grimper la note jusqu'à 6 250 euros, » nous explique Sergio Gallegos, un autre chauffeur de taxi.

« Et si le gouvernement veut qu'on change la couleur des taxis, ils le font, et les Uber ne payent évidemment pas pour ça, » ajoute-t-il.

Après une semaine de tensions et d'incertitudes, les applications mobile de chauffeur privé pourraient bientôt avoir le droit à un sursis.

Vendredi dernier, un think tank urbain financé par la ville — LabCDMX, ou Laboratory for the City — a diffusé une série de recommandations qui appellent à la mise en place d'un « terrain de jeu à armes égales » pour les taxis officiels de la ville, et les Uber et autres Cabify.

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Ces recommandations font suite à un débat qui s'est tenu le 17 juin dernier, auquel étaient présentes 50 personnalités des deux camps, mais aussi des experts du monde des transports. Les conclusions du LabCDMX proposent que la ville de Mexico abaisse et simplifie la grille de tarifs des taxis officiels, mais aussi réduire les formalités.

« On ne peut pas rester bloqués dans le temps, parce qu'on ne voudrait pas faire évoluer les choses, » explique ce lundi, à VICE News, la directrice de LabCDMX, Gabriella Gomez-Mont. « Les nouvelles technologies amènent de nouveaux paradigmes, plus de transparence. Donc on essaye de mettre au point un « terrain de jeu à armes égales ».

Les recommandations sont sans engagement, et l'officiel chargé des transports à Mexico n'a pas annoncé ce qu'il comptait en faire. Mais Gomez-Mont explique qu'elle est certaine que l'administration du maire de Mexico, Miguel Angel Mancera, y répondra favorablement.

Plusieurs importants groupes de taxis de la ville ont accepté d'accueillir Uber sur le marché, s'ils voyaient leurs contraintes administratives être réduites. Chez Uber, on a aussi fait savoir qu'on se conformerait à des réglementations semblables à celles imposées aux taxis.

« Certains ont déjà dit, 'On accueille la concurrence', » d'après Gomez-Mont.

Uber doit encore faire face à une résistance dans certaines parties du Mexique. Dans les États de Queretaro et de Mexico, les autorités ont déclaré que l'application était illégale.

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« Nous ne sommes pas contre la concurrence, mais celle-ci devrait être loyale, » explique à VICE News, Raciel Palafox, qui a été taxi pendant 12 ans. « Si j'avais dû dépenser aussi peu en frais administratifs qu'eux, je pourrais conduire une Passat ou une BMW, mais le gouvernement m'a ruiné. »

Pendant ce temps, l'application a reçu l'approbation de la Commission fédérale sur la Concurrence Économique de l'État de Mexico. La commission avait aussi annoncé le mois dernier, qu'elle soutenait la reconnaissance formelle d'Uber pour le marché de la ville de Mexico.

Gomez-Mont explique qu'il était important de garder Uber dans une ville aussi grande et inégalitaire. Elle a aussi noté que la criminalité relative aux taxis de rue a largement reculé ces dix dernières années.

« Uber a une limite qui est très intéressante. Il faut un téléphone et une carte de crédit, mais moins de 2 millions de personnes ont une carte de crédit à Mexico, » explique-t-elle.

Gallegos, un des chauffeurs de taxi de la ville, dit que c'est désormais au gouvernement de répondre.

« Les gens disent que nos voitures sont sales, et qu'elles sont peu sûres, mais le risque, on peut l'imputer au gouvernement. Avec toute la corruption, ils ont permis toutes sortes d'irrégularités dans les taxis, » présente-t-il.

Daniel Hernandez a participé à la rédaction de cet article. Suivez @VICENewsFr.