Société

DIVERSIDEAS: Notre nouvelle vidéo sur la diversité et le racisme en Belgique

La Belgique est-elle raciste? On a parlé identité, discrimination et appropriation culturelle avec 10 personnes racisées.
Souria Cheurfi
Brussels, BE

Dans notre série DIVERSIDEAS, on invite des gens à s’exprimer sur des sujets qui touchent de près ou de loin à ce mot fourre-tout qu’est la « diversité ».

Le 28 août 1963, Martin Luther King a marqué l’histoire avec son speech « I Have A Dream », racontant son rêve de voir un monde où nous serions tous égaux, peu importe la couleur de notre peau. Pour célébrer le 56e anniversaire de ce discours, nous faisons le point sur la situation en Belgique avec un panel de créatifs de tous horizons. La Belgique est-elle un pays raciste? La discrimination positive est-elle réellement positive? Comment se positionner face à la question de l’appropriation culturelle?

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Le temps de trois jours, nous avons transformé notre salle de réunion en salle de tournage pour échanger des idées sur la diversité avec les rappeurs Swing et Dvtch Norris, les Djs Wutangu, Black Mamba et UNOS, le photographe Mous Lamrabat, l’illustratrice Loulou João, le danseur Nick Coutsier, la journaliste et présentatrice Anne-Sarah N'Kuna et la chanteuse Martha Da’ro. Dix personnes aux identités et expériences différentes. Dix conversations aussi captivantes que contradictoires.

La Belgique, pays de diversité?

Il paraît, oui. Mais cette diversité est-elle respectée partout et mise à l’honneur comme elle le devrait? Dvtch Norris, Anne-Sarah, Wutangu ou encore Swing ont grandi à la campagne, et tous s’accordent à dire que non, il n’y a pas de diversité en dehors des grandes villes. « Je viens d’Ekeren, et en gros là-bas y’avait les blancs, et puis moi, » plaisante Dvtch. Pour Anne-Sarah, ce n’est que quand elle est arrivée à Bruxelles qu’elle a compris ce que signifiait vraiment la diversité. Loulou souligne le fait que bien que beaucoup de communautés différentes vivent en Belgique, elles ne se mélangent pas forcément. Peut-on alors réellement parler de diversité?

La Belgique, pays raciste?

Les questions d’identité, de diversité et de racisme n’ont jamais été aussi pertinentes que depuis les dernières élections. Si un Flamand sur cinq a voté pour le Vlaams Belang, il y a des chances que votre listes d’« amis » Facebook en compte quelques un·es. Et ça fait bizarre… « Je pense que la majorité des jeunes qui le font n’osent pas parler du fait qu’iels votent pour un putain de parti raciste », nous a confié Dvtch. Pour Black Mamba, les résultats des élections n’ont fait que confirmer la situation. Wutangu rappelle que notre pays s’est construit grâce à la colonisation, et que le processus de décolonisation est loin d’être terminé. Mais cette thématique, nous avons décidé de la garder pour une prochaine vidéo, stay tuned.

La discrimination positive, pas si positive?

L’une des méthodes utilisées pour garantir que la diversité soit reflétée à tous les niveaux de la société et dans tous les secteurs, c’est la discrimination positive. Ici aussi, les avis diffèrent. Anne-Sarah y est favorable: « Certaines personnes démarrent avec trois points de retard. La discrimination positive permet simplement à ces personnes de rattraper leur retard pour être sur un même pied d’égalité. » Martha Da’ro, quant à elle, ne le voit pas d’un si bon oeil, car elle a déjà eu le sentiment d’avoir été choisie simplement pour remplir un quota. « On m’a déjà contactée pour un rôle et je me suis retrouvée à une audition avec uniquement des femmes marocaines et noires. C’est dégueulasse. » D’autres, comme Black Mamba et Nick, prennent les opportunités comme elles viennent et tentent d’en retirer un maximum. « Je suis tout à fait consciente que j’ai eu mon job à StuBru parce que je suis une femme de couleur. Mais je saisis l’occasion pour prouver que je suis avant tout une bonne Dj. »

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Appropriation culturelle, où se situe la limite?

Le sujet épineu de l’appropriation culturelle prend de plus en plus d’ampleur. Dernier débordement en date: un événement organisé juste au pied du Musée de Tervuren avec pour thème l’Afrique. Vous savez comment on peut se déguiser en Africain, vous ? Comme si ça ne suffisait pas, un visiteur a eu la bonne idée de faire un blackface… Ce genre de situations extrêmes indigne, fâche même. Mais parfois, la limite n’est pas aussi claire. Pour Anne-Sarah, l’appropriation culturelle est purement un manque de respect : « À partir du moment où on utilise une culture qui n’est pas la nôtre pour se faire de l’argent, ça me dérange. D’ailleur même sans l’aspect économique, je n’apprécie pas. » Mous et Nick, quant à eux, trouvent que l’on devient un peu trop sensible à ce niveau là: « On a tendance à crier “appropriation culturelle” trop facilement, alors que parfois, l’intention de la personne est de célébrer cette culture. »

Identité et fierté

S’il nous a paru important de souligner les problèmes auxquels font toujours face les personnes racisées en Belgique, nous avons aussi voulu mettre en avant la beauté de cette diversité. Les intervenants nous racontent aussi, avec une pointe de nostalgie et d’humour, le moment où ils ont réalisé qu’iels n’étaient pas blanc·hes. Un simple dessin à la maternelle veut parfois dire beaucoup…

Les interviews se sont toutes terminées sur un note positive, car nos intervenant·es se rappellent tous du moment où iels se sont senti·es fier·es de leurs origines. Dès leur enfance pour Swing: « On m’appelait Barracuda quand j’étais gamin, et je trouvais ça trop cool! » Ou plus tard, suite à une réussite professionnelle pour Nick ou encore Anne-Sarah…

Bref, les avis aussi divergent.