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Moyen-Orient

L'EI face à l'exode de ses combattants étrangers

Des experts estiment que l'EI est désormais plus dangereux que jamais, et pourrait utiliser la fuite de ses partisans pour disséminer son message de terreur en occident.

L'organisation État islamique (EI) fait actuellement face à un exode de ses recrues étrangères, désabusées par l'incapacité du groupe à établir un véritable État. Mais cette nouvelle n'invite pas forcément à se réjouir. Des experts estiment que l'EI est désormais plus dangereux que jamais, et pourrait utiliser la fuite de ses partisans pour disséminer son message de terreur en Occident.

Une enquête du Guardian montre que des dizaines de personnes s'étant rendues en Syrie et en Irak pour soutenir l'EI ont fui la région ces dernières semaines. Elles seraient déçues de l'incapacité du groupe à maintenir le contrôle d'un territoire.

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Si nombre d'entre eux ont été capturés alors qu'ils essayaient de rentrer en Turquie, certains auraient réussi à passer entre les mailles du filet. Les ambassades en Turquie et de partout en Europe estiment qu'un nombre croissant de membres de l'EI, qui ont rejoint le groupe depuis 2013, cherchent désormais à rentrer.

Parmi les défecteurs les plus connus, on trouve Stefan Aristidou, originaire d'Enfield au nord de Londres, qui a disparu il y a deux ans, après avoir fui vers Chypre. La semaine dernière, Aristidou et sa femme – une Britannique originaire du Bangladesh – se sont rendus en passant en Turquie, au niveau de la ville de Kilis.

Le ressortissant américain, Kary Paul Kleman, originaire de Floride, s'est lui aussi rendu à la police des frontières, après avoir passé deux ans dans les territoires contrôlés par l'EI.

Ce qui inquiète désormais les autorités, c'est que l'EI se serve des défecteurs pour exporter des individus, toujours loyaux à la cause de l'EI. « L'EI est d'autant plus dangereux, que c'est un animal blessé, » nous confie Adam Deen, le directeur du think tank londonien Quilliam.

Alors que le califat autoproclamé de l'EI périclite en Irak et en Syrie, l'organisation terroriste ne parvient plus à attirer de nouvelles recrues étrangères. « Je pense qu'au cours de l'année écoulée, ils n'ont pas réussi à convaincre davantage les étrangers, » explique à VICE News, Renad Mansour, un expert de Chatham House.

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L'EI avait demandé à ses partisans d'essayer de les rejoindre dans leur califat ou de commettre des attentats où ils vivent. « Sans cet État, ils n'ont plus qu'une seule option, » indique Deen.

Ceux qui cherchent à rentrer en Turquie peuvent appartenir à trois catégories différentes selon Deen :

  • Les déçus : ceux qui ont réalisé que le message de l'EI n'est pas ce qu'il clamait être.
  • Les dérangés : ceux qui souffrent de traumatismes, comme le symptôme de stress post-traumatique.
  • Les dangereux : ceux qui n'ont pas désavoué leurs croyances mais prétendent avoir renié l'EI.

Selon le Global Terrorism Index, publié en novembre dernier, près de 30 000 combattants venant d'une centaine de pays se sont rendus en Irak et en Syrie depuis 2011 pour combattre dans les rangs de l'EI. La moitié d'entre eux viennent d'Afrique du nord, un quart vient d'Europe et de Turquie. Le gouvernement américain estime que 25 000 d'entre eux ont depuis été tués.

S'il est facile de les qualifier de « combattants étrangers », la réalité du terrain veut que nombre d'entre eux n'ont jamais vu la ligne de front. Ils sont nombreux à avoir fait le voyage pour vivre dans le « califat » de l'EI.

« Certains de ces soi-disant combattants étrangers voulaient juste être des ressortissants de cet "État", » indique Mansour. « Certains se sont lancés dans les réseaux sociaux, d'autres ont travaillé dans l'équivalent du gouvernement de l'EI. » Aristidou était l'un d'entre eux. Il a confié s'être rendu sur place pour y vivre plutôt que pour y combattre, d'après des officiels turcs.

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Contrairement à Al-Qaida, qui recrutait uniquement des partisans étrangers pour combattre (et les entrainaît dans des camps très organisés), la qualité des combattants de l'EI n'était pas élevée, selon Mansour. « La majorité des combattants envoyés au front sont des Arabes – des Syriens et des Irakiens, » ajoute le spécialiste.

Malgré leur manque de compétences en matière de combat, les recrues étrangères ont été indispensables pour « internationaliser le groupe, en faire une marque mondiale, » dit Mansour.

L'une des recrues étrangères les plus connues reste le Britannique Mohammed Emwazi, qui a longtemps été surnommé « Jihadi John ». « Il est devenu une sorte de célébrité s'exprimant face caméra avec son accent anglais, il était plus attrayant qu'un combattant local, » ajoute Deen. « Les combattants étrangers ont été indispensables dans la propagande du groupe et aussi pour commettre des attaques dans les pays occidentaux. »


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