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L'étrange histoire de la meuf qui a guéri son cancer avec des photos de bite

Sur Craigslist, une femme a raconté comment elle avait vaincu sa maladie : avec un ange et son pénis.

Une photo de bite envoyée par messagerie instantanée, et censurée. Il ne s'agit pas de la bite ayant subitement guéri le cancer de Diane.

Parfois, les anges ont des ailes. Parfois, ils n'en ont pas et se matérialisent physiquement pour guérir les femmes aux portes de la mort.

C'est ce qui s'est passé à l' University of Chicago Medical Center fin juin 2016 sous les yeux de Diane, une Américaine atteinte d'un cancer du sein en stade 3 , soit une étape avant le dernier stade, le 4, celui des métastases et de la mort certaine. C'est ce conte de fée qu'elle nous raconte dans un long courrier posté sur le site américain de petites annonces Craigslist et intitulé « Your dick piccured my breast cancer », c'est-à-dire, en français : les photos de ta bite ont guéri mon cancer. Ce qui est assez étonnant.

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Diane est malade. Diane est en pleine chimiothérapie et après son traitement, parfois elle s'assoit à la cafétéria de l'University of Chicago Medical Center, à la fois cadre dédié à la recherche médicale et centre hospitalier de la ville de Chicago, dans l'Illinois. C'est là qu'elle rencontre un homme sans nom. Ce dernier est atteint de la maladie de Crohn. Il est grand, porte un t-shirt aux manches longues couvertes de faux tatouages, et il faut le reconnaître, Diane aime bien ça.

Les hôpitaux étant ce qu'ils sont, rapidement Diane se confie sur sa peur de passer du stade 3 au 4 de son cancer, le stade 4 étant la phase terminale. Après avoir discutaillé de la pluie et du beau temps, littéralement, et avoir passé en revue la météo chicagoane, la conversation dévie sur le sujet épineux des places de parking de l'hôpital. L'homme sans nom connaît bien ça. « Tu m'as conseillé de me garer dans un autre parking, que je ne connaissais pas et qui était plus proche », raconte Diane dans sa lettre ouverte sur Craigslist.

Malin, le mec demande à Diane son numéro de téléphone pour lui envoyer des photos dudit parking. Inexorablement, l'heure tourne et le moment de se séparer, inéluctable, approche. Diane reprend le chemin de sa maison, non sans noter en son for intérieur que l'inconnu de la cafétéria ne lui a pas envoyé de message, comme promis.

L'histoire de Diane aurait pu s'arrêter quand, enfin arrivée chez elle, son téléphone s'est mis à vibrer. « Lorsque j'ai ouvert le SMS dans mon appartement, faiblement éclairé à ce moment-là, j'ai vu un magnifique pénis en érection apparaître sur mon écran, nous dit-elle. Son éclat a éclairé mon visage et a pénétré mon esprit. J'ai vraiment senti un changement en moi. »

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Diane a été touchée par ce que l'on pourrait appeler la grâce pénienne. L'homme anonyme, pas avare pour un sou, et certainement doté d'un forfait illimité en data, envoie dans l'heure trois photos supplémentaires à sa nouvelle amie cancéreuse. Mais le sort va encore s'acharner sur Diane. Alors qu'elle passe une heure dans sa baignoire à « faire ce qu'une femme doit faire pour se faire du bien » comprenez, se masturber – l'homme lui envoie une série de messages pour savoir s'il ne s'est pas trompé de destinataire.

Le même pénis que sur la première photo, vu d'un autre angle et également censurée pour des raisons assez évidentes.

C'est alors que l'histoire prend un tournant tragique. Diane raconte qu'elle a fait tomber son téléphone dans les toilettes alors qu'elle était en train de pondre « une merde de luxe gigantesque ». Mais Diane n'a peur de rien, et certainement pas d'un bain d'excréments. Elle amène donc son smartphone chez le revendeur Apple le plus proche en couvant l'espoir secret que les techniciens du Genius Bar pourront avoir accès au numéro de son admirateur au pénis magique. Comme on pourrait s'y attendre, personne n'a voulu toucher au téléphone de la jeune femme et, la mort dans l'âme, elle se résigne à faire une croix sur cette histoire et sur cet homme.

Mais le Destin n'a pas fini de surprendre Diane. Sa vie va encore connaître un retournement de situation inattendu.

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« Nous n'avons pas trouvé la moindre cellule cancéreuse dans vos seins. Vous n'avez, de fait, plus de cancer. Vous êtes absolument en bonne santé », lui a dit le cancérologue.

Une semaine après l'incident scatologique, la voilà de retour à l'hôpital, pour une nouvelle séance de chimiothérapie. C'est alors qu'après sa palpation mammaire, l'impossible se produit. Son médecin traitant la regarde, semble-t-il interloqué. « Vous n'avez plus de cancer du sein, lâche-t-il. Vous semblez être guérie. » Le cancérologue poursuit, professionnel. « Allez voir Shelia à l'accueil pour vous rembourser votre ticket de parking, et appelez-moi si vous avez des migraines. »

Diane, comme chacun de nous, est un peu abasourdie par la soudaineté de cette annonce. Elle demande plus d'explications. « Votre cancer du sein est totalement guéri. Au regard des tests que nous avons effectués grâce à notre équipement et par le groupe de scientifiques travaillant dans le laboratoire, nous n'avons pas trouvé la moindre cellule cancéreuse dans vos seins. Vous n'avez, de fait, plus de cancer du sein. Vous êtes totalement en bonne santé », ajoute le cancérologue.

À ce stade de l'histoire, permettez-moi de douter de la véracité des propos du docteur. Dans un éclair de lucidité, Diane doute aussi. D'un coup, elle se rappelle qu'elle était en phase 3 une semaine auparavant et que le seul changement dans sa sordide routine fut les fameuses photos de bite envoyées par l'interlocuteur sans nom.

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Là, elle découvre son médecin est en réalité complètement taré. Par téléphone, au lieu d'apporter une explication rationnelle aux questionnements de Diane, il lui dit sans ambages : « La personne que vous avez rencontrée n'est pas un homme, mais un Ange. » À l'autre bout du fil, Diane est incrédule. Le médecin poursuit : « Souvent, Dieu envoie des anges pour faire ce genre de choses car Il sait que cela nous rend heureux », explique-t-il.

Un cancérologue du même service de l'hôpital chicagoan, surenchérit : « Mon collègue a raison, dit-il. Votre téléphone vous envoie de minuscules radiations. Lorsque vous avez regardé ces photos, elles ont envoyé une dose létale de radiations à votre cancer – et l'ont tué. » D'après les dires du médecin numéro 2, la photo montrant le superbe pénis de l'interlocuteur mystère aurait fourni à Diane « le nombre exact de radiations dont elle [avait] besoin. »

La science et le corps médical seraient donc passés au travers de ce traitement miracle pendant tout ce temps ? Ça n'a aucun sens, bien sûr. Pour des raisons journalistiques évidentes, j'ai donc contacté plusieurs spécialistes internationaux de la recherche sur le cancer. Plusieurs m'ont raccroché au nez, pensant que l'histoire que je leur racontais n'était que pure fiction. D'autres, plus polis, m'accusaient simplement de leur faire perdre leur temps. D'autres encore ont essayé de me faire entendre que ce post Craigslist était nécessairement faux.

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Nicolas [il a refusé de dévoiler son nom de famille] est analyste de données génomiques au New York Genome Center. Sa réaction fut sans appel. « Si les écrans téléphoniques émettaient des radiations comme celles envisagées par ces cancérologues, on serait tous morts depuis longtemps ! », se marre-t-il. « Aussi, les dickpics n'émettent pas plus de "radiations" que des photos de petits chatons. »

Les questions de la crédulité du patient et de l'auto-persuasion favorisant une possible guérison se posent alors. Le professeur Mariana Stern, épidémiologiste spécialisée dans le cancer au Norris Comprehensive Cancer Center de la faculté d'USC, à Los Angeles, se questionne à ce sujet. « L'accompagnement psychologique est nécessaire dans le traitement du cancer, dit-elle, mais ne se substitue en rien au traitement médical. Entre nous, cette histoire est ridicule : j'aimerais bien que guérir un patient en phase terminale soit aussi simple. »

Et si l'histoire de Diane ressemble, au mieux, à un tissu de mensonges destiné aux pauvres lecteurs naïfs de Craigslist, ce genre de témoignage est dangereux pour qui tombera dessus. « Dans toutes les histoires de cancer, il y a des légendes urbaines et la possibilité que d'autres patients tombent dessus et se mettent à y croire, dit-il. C'est un peu pathétique, mais on ne peut qu'avoir de l'empathie pour ces patients crédules. »

Alors pour l'heure, on ne peut que se ranger du côté du cancérologue fantasque de Diane : les anges sont peut-être parmi nous, héros anonymes mandatés par le Tout-Puissant pour soigner les pauvres femmes malades à grand renfort de photos de pénis fièrement érigés.

Aujourd'hui, Diane est quant à elle partagée entre larmes de joie à l'idée d'être définitivement guérie de son cancer, et larmes de tristesse parce qu'elle a oublié de faire valider sa putain de note de parking par Shelia, l'employé de l'hôpital.

Sarah est sur Twitter.