Comment les dealers cachent leur activité à leur famille
Illustration : Jay Howell

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Drogue

Comment les dealers cachent leur activité à leur famille

Quand on brasse plusieurs milliers par semaine, il existe une bonne manière de dissimuler ses activités : mentir.

De nombreuses raisons peuvent pousser des gens honnêtes à dealer de la drogue, mais elles demeurent généralement plutôt simples. Certaines personnes le font par nécessité financière, d'autres parce qu'elles aiment le sentiment de pouvoir que cette activité leur octroie. D'autres encore préfèrent dealer plutôt que trouver un job plus « classique ». Mais quelles que soient les raisons, cette activité a tendance à compliquer la vie des dealers et de leurs proches.

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À une époque, j'étais ami avec un type qui vendait de la weed pour financer ses études. Même si cette activité lui permettait d'être complètement indépendant, il craignait d'être découvert par ses parents. Quand il est revenu chez lui avec des vêtements flambant neufs, ses parents ont commencé à lui poser des questions. Pour apaiser leurs soupçons, il leur a dit qu'il venait d'être embauché pour être videur dans un club pour hommes très select – un job très bien payé que faisait réellement mon colocataire de l'époque.

Afin de convaincre ses parents, il prenait régulièrement des photos de lui dans l'uniforme de mon colocataire. Il lui piquait aussi quelques anecdotes, et expliquait à ses parents qu'il recevait des pourboires très généreux pour justifier son nouveau train de vie. Il s'en est finalement bien sorti, mais le nombre de mensonges qu'il débitait a fini par le rendre anxieux. Il deale toujours aujourd'hui et continue de mentir aux gens (à commencer par son propriétaire). J'ai demandé à plusieurs dealers de m'expliquer en quoi leur activité leur compliquait la vie, et comment ils faisaient pour la cacher. Pour des raisons évidentes, tous ont témoigné de manière anonyme.

Dealer 1
Homme
Produits vendus : « toutes les substances possibles et imaginables »

J'ai grandi dans une famille très pauvre, mais mes bons résultats scolaires m'ont permis d'étudier dans un lycée huppé de Beverly Hills. Je galérais à me payer un repas à cinq dollars, tandis que mes camarades de classe conduisaient des voitures de luxe et vivaient dans des manoirs. Je les enviais beaucoup – de plus, la vie à la maison n'était pas particulièrement réjouissante. Ma mère m'a eu quand elle avait 19 ans, et mon père souffre d'une maladie mentale. Ils ont divorcé quand j'étais tout petit, et aucun d'eux n'a terminé le lycée. Le deal m'a permis de survivre. Pour moi, c'était une échappatoire – c'est ensuite devenu un moyen d'être aussi « cool » que les autres élèves de mon lycée.

J'ai commencé à vendre quand j'étais en seconde. J'ai commencé par sauter mes pauses déjeuner pendant deux jours – ce qui m'a permis d'économiser 10 dollars, que j'ai ensuite investis dans un gramme de weed. Je l'ai revendu pour 20 dollars, et j'ai pu acheter deux grammes de plus. À partir de là, j'étais lancé. Quelques années plus tard, je vendais près de 10 kg de weed – ainsi que des quantités variables de toutes les substances possibles et imaginables – par semaine. Je brassais des milliers de dollars.

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Au début, je n'ai pas eu besoin de cacher quoi que ce soit à ma famille. Mon meilleur ami vivait à trois pâtés de maison de notre lycée, dans une maison magnifique. C'est là qu'on entreposait la drogue et l'argent – son père était très cool, et se fichait éperdument de notre activité. En général, je me faisais déposer chez lui le matin, je me défonçais avec lui, j'allais à l'école, et je retournais chez lui pour récupérer la weed que je devais vendre.

Ça a commencé à se voir quand je suis rentré chez moi avec de beaux habits. Ma mère avait cinq jobs différents et je gagnais quand même plus d'argent qu'elle. Je n'ai même pas eu besoin de mentir, car elle voyait très bien que j'étais défoncé en permanence.

Ceci dit, elle ne pouvait pas non plus mesurer l'étendue de notre opération. Un jour, alors que je ne pouvais pas déposer mes produits chez mon ami, j'ai dû tout cacher chez moi. J'ai démonté des enceintes d'ordinateur, et je les ai remplies de weed, de cocaïne, de MDMA – etc. Je gardais souvent un gramme de weed pour ma consommation personnelle.

Une fois, j'ai fait l'erreur de cacher un gramme dans ma chambre, sous un T-shirt. Ma mère m'a appelé quelque temps plus tard pour me dire qu'elle avait trouvé de la drogue dans ma chambre. Je suis immédiatement rentré chez moi, persuadé qu'elle avait trouvé l'intégralité de ce que je cachais dans mes enceintes. Quand je suis arrivé, j'ai constaté avec soulagement qu'elle avait juste trouvé ma conso – elle pensait que c'était tout ce que je possédais.

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J'ai remballé tout ce que j'avais caché et je me suis barré de la maison. Je n'y suis pas revenu, jusqu'à ce que j'arrête le deal. Mon père est mort alors que j'étais au sommet de ma « carrière », et ma mère n'a jamais découvert à quel point j'étais impliqué. Ça va faire cinq ans que je ne touche plus à rien, et j'ai une excellente relation avec ma famille depuis. Je parle avec ma mère presque tous les jours.


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Dealer 2
Femme
Produits vendus : pilules sur ordonnance

Au lycée, j'utilisais l'assurance santé de mes parents pour consulter un psychiatre. Ce dernier me prescrivait des trucs comme de l'Aderrall, que je vendais ensuite à mes camarades de classe. Sauf que j'ai développé une addiction aux médicaments. Mon père a fini par apprendre que je vendais des pilules et que j'étais moi-même accro, et il m'a envoyé en cure de désintoxication.

Quand je suis sortie, j'ai essayé de revoir mon psy pour pouvoir dealer à nouveau. À ce moment-là, mon père savait que j'avais menti pour justifier ma thérapie, et il n'était plus dupe. J'ai essayé d'appeler mon psy plein de fois, mais il raccrochait systématiquement dès qu'il entendait ma voix.

Plus tard, j'ai compris qu'il m'évitait parce que mon père lui avait ordonné de le faire. Je suis presque sûre qu'il l'a menacé. J'avais niqué toutes mes chances de consulter un psy, ce qui aurait sincèrement pu m'aider. Mais quand on mène une double vie, il faut savoir faire face aux conséquences.

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Dealer 3
Homme
Produits vendus : LSD, weed

Je viens d'une famille de classe moyenne, et j'ai grandi en banlieue. Je me suis mis à fumer de la weed quand j'avais 13 ans, et je me suis très vite mis à dealer. Pour moi, c'était un moyen de me défoncer gratuitement – puis c'est devenu un moyen de m'enrichir. Pendant trois ans, j'ai vendu du LSD et de la marijuana à temps plein. À l'apogée de ma carrière, je me faisais environ 20 000 dollars par mois.

Aujourd'hui, je suis très proche de mes parents, mais c'était beaucoup plus compliqué durant mon adolescence. À l'époque, j'étais constamment défoncé et j'enchaînais les mensonges. Ils avaient des doutes, mais je pense qu'ils ne voulaient pas croire que leur fils adoré vendait de la drogue. C'est très difficile à admettre pour des parents, qui souhaitent toujours le meilleur pour leurs enfants.

Un jour, j'ai filé 10 000 dollars à ma mère pour qu'elle me les garde de côté. En réalité, je voulais qu'elle les garde pour elle, mais elle a refusé. Elle se doutait que c'était de l'argent sale, ce qui n'était pas tout à fait le cas : une personne m'avait donné de l'argent pour que je lui présente un dealer très haut placé, mais je n'étais pas impliqué dans leur trafic pour autant. J'ai fini par la convaincre de « garder l'argent pour moi », même si je n'avais absolument pas l'intention de le récupérer.

Ma mère a eu l'air encore plus surprise quand je lui ai dit que j'avais gagné 10 000 dollars rien que pour présenter quelqu'un. Je lui ai menti en disant que techniquement parlant, je ne dealais jamais – je me contentais de présenter des gens entre eux. C'est très facile de convaincre quelqu'un qui veut se persuader que vous êtes un petit ange innocent. Beaucoup de parents sont dans le déni. Elle a bien essayé de me réprimander par moments, mais elle savait aussi que j'étais susceptible de me braquer. On avait un accord officieux : elle ne posait aucune question, et je ne lui disais rien de mes activités.

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J'ai fini par me faire arrêter pour trafic de LSD, et j'ai écopé de 25 ans de prison. Ma famille avait envie de m'aider, mais je m'étais enlisé dans une situation où ils ne pouvaient plus rien faire pour moi.

Maintenant, c'est un chapitre comme un autre de ma vie – je suis passé à autre chose. Je n'ai plus aucun souci à en parler de manière ouverte, mais je ne raconte pas tous les détails à ma mère pour autant. Certaines choses de mon passé resteront toujours secrètes.

Dealer 4
Homme
Produits vendus : weed

J'ai vendu de la weed pendant environ quatre ans. Avant ça, je livrais des repas, et ma transition s'est faite très naturellement. Je me suis rendu compte que je pouvais mieux m'en sortir financièrement en ne bossant que trois jours par semaine. Je ne vais pas m'épancher sur les détails, mais je me faisais bien plus d'argent que mes amis, qui travaillaient cinq jours par semaine et payaient des impôts.

J'ai une bonne relation avec mon père, qui est globalement très compréhensif. Quand il a commencé à avoir des soupçons, il m'a fait un discours pour que je comprenne que je prenais des gros risques – allant même jusqu'à conclure : « Tu vas finir par vivre dans un van au bord d'une rivière ! »

Quand il a vu que j'étais complètement dépendant et que je pouvais également financer mes projets personnels, son point de vue a complètement changé. Quand j'ai fini par lui avouer ouvertement que je dealais, il n'était absolument pas surpris. Il m'a même dit qu'il me respectait pour avoir intelligemment pesé le pour et le contre. Mon père est lui-même entrepreneur, et c'était très drôle de voir sa manière de réagir par la suite. On discutait longuement des meilleures manières de blanchir de l'argent, même s'il continuait d'utiliser sa voix de père moralisateur. Je déteste mentir aux gens, et je suis très soulagé de ne pas avoir à le faire avec lui – je suis moins anxieux à l'idée de dealer et je me sens beaucoup moins coupable depuis qu'il est au courant.

Zach est sur Twitter.