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Faut-il vraiment tenter de contacter des intelligences extraterrestres ?

Voici un petit récapitulatif des arguments en faveur du mutisme cosmique.
L'observatoire d'Areceibo, où Frank Drakea envoyé son premier message dans le cosmos. Image via Ed Ivanushkin sur Flickr.

Les astronomes chargés de trouver une vie intelligente dans notre système solaire doivent faire face à une question épineuse : pourquoi les aliens sont-ils si discrets ? Le programme SETI (Search for Extraterrestrial Intelligence) a été entamé en 1960 avec les recherches de Frank Drake. Mais plus de 50 ans après, nous n'avons toujours pas la preuve formelle que notre pâté de maisons cosmique est habité par d'autres que nous.

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Cette déception a mené à la création d'une aile très controversée du programme SETI, connue sous le nom METI (Messagerie for Extraterrestrial Intelligences) ou « SETI actif. » L'idée à la base de ce département de recherche est la suivante : si les extraterrestres ne semblent pas décidés à nous contacter, c'est à nous de faire le premier pas.

Bien qu'une poignée de messages aient déjà été envoyés dans le cosmos au cours du siècle dernier, de dessins 8-bit en passant par des petites annonces Craigslist, la plupart des institutions associées à SETI ne financent pas de projets de recherche active. D'ailleurs, en février 2015, des scientifiques éminents travaillant au projet SETI ont publié une lettre officielle énumérant les dangers posés par METI, et appelant à établir un consensus mondial avant d'envoyer quelque message que ce soit dans l'espace à l'avenir.

Les craintes des chercheurs sont fondées : d'ailleurs, un article posté sur arXiv la semaine dernière récapitule les principaux arguments contre METI à travers une analyse critique approfondie. Ils concluent que non seulement METI est un programme mal inspiré, mais également qu'il est de « nature pseudoscientifique » et pourrait « mener à la catastrophe. »

Écrit par John Gertz, président de la Fondation pour l'investissement scientifique et technologique sur la recherche SETI et président de l'Institut SETI, l'article commence par passer en revue les arguments en faveur de METI ayant été avancés par le passé. En premier lieu, il y a le fait qu'à ce jour, tous les projets SETI (non actifs) ont échoué à trouver des preuves de l'existence d'une autre forme d'intelligence dans l'univers, ce qui suggère qu'il est peut-être temps d'essayer une nouvelle approche. Ensuite, il y a le fait que la Terre envoie déjà des ondes radio dans l'espace pendant des décennies, ce qui aurait pu révéler notre position à de potentielles intelligences extraterrestres. Si nous avons déjà grillé notre couverture, autant concentrer nos efforts selon une méthode bien organisée et coordonnée comme celle de METI.

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Pourtant, comme le souligne Gertz, ces arguments ont leurs limites. En premier lieu, nous ne savons rien sur les civilisations extraterrestres avec lesquelles nous tentons de communiquer. Nos salutations amicales sont peut-être perçues comme menaçantes par une espèce extraterrestre superintelligente et hyperviolente. Si l'histoire de notre propre planète nous a appris quelque chose, c'est bien que le contact entre deux civilisations qui ne sont pas sur un pied d'égalité en terme d'avancement technologique résulte habituellement en l'extermination de la moins avancée. Peut-être serait-il plus raisonnable d'attendre et d'observer encore un peu.

L'argument le plus puissant en faveur de METI, à savoir que nous avons déjà signalé notre position en diffusant des ondes radio à tout va comme des malpropres, a paradoxalement été réfutée par le chef de l'équipe des astronomes de l'Institut SETI lui-même, Seth Shostak. Celui-ci est très sceptique quant à l'idée qu'un SETI actif constituerait un danger potentiel. Il précise que la « fuite » des transmissions radio terrestres est si faible qu'il serait pratiquement impossible de les détecter à une distance interstellaire.

Enfin, il faudrait régler une question particulièrement difficile sur le plan politique : qui va parler au nom de la Terre ? Et comment s'entendre sur le discours à tenir ? Bien que l'Académie internationale d'astronautique a déjà rédigé un protocole interdisant l'envoi de messages dans l'espace, ce dernier n'a aucune valeur légale. Ainsi, toute personne ayant accès à un télescope radio peut envoyer la première bêtise qui lui passe par la tête aux confins de l'univers sans craindre des répercussions juridiques.

Gertz estime qu'il existe trop d'inconnues pour que l'on puisse risquer de mettre l'humanité en péril à cause d'une manœuvre un peu hardie. À cause du côté extrêmement spéculatif du projet METI, il le définit comme pseudoscientifique et potentiellement catastrophique.

Pour le moment, la plupart des astronomes de SETI s'accordent à dire que tenter de communiquer avec les aliens est plutôt une mauvaise idée, même si on peut continuer à débattre sur ce sujet. En raison de l'afflux récent de nouveau financements pour SETI, Shostak prédit que nous pourrions détecter une intelligence extraterrestre d'ici 20 ans. Une annonce pour le moins osée. S'il s'avérait que cette affirmation était moins folle qu'en n'en a l'air, notre génération disposera de très peu de temps pour déterminer quoi dire aux extraterrestres. « Coucou » ne suffira pas.