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J’ai réalisé mon rêve de gosse en suivant le Wu-Tang Clan en tournée


Raekwon et l’auteur

J’adore le rap. Au collège, mes potes et moi, on organisait des parodies de battles rap inspirées du film 8 Mile. On craignait, ouais. Mais ça ne nous empêchait d’apprécier les vrais trucs – et rien ne sonnait plus vrai que le Wu-Tang Clan. Alors quand j’ai appris que le super-groupe hip-hop faisait son grand retour en Australie après 5 ans d’absence, je suis devenu fou. Naturellement, je me suis démerdé pour planifier une interview avec le groupe, et cette interview s’est finalement transformée en une semaine entière à les suivre, muni d’un pass backastage.

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Ça a commencé à Melbourne, où j’ai vu RZA er Raekwon devant une foule incroyable. Plus tard cette nuit-là, je me suis retrouvé à échanger des trucs méga personnels avec Raekwon tout en buvant un verre de vin avec RZA.

Le lendemain matin, je les ai suivi à l’aéroport de Melbourne. Pour passer le temps, GZA et Masta Killa se sont lancés dans une partie d’échecs sur iPad. Masta Killa m’a demandé si je savais jouer. J’ai répondu que non. « Tu devrais apprendre, a t-il ajouté. Ça t’enseigne la patience – à réfléchir à deux fois à ce que tu vas faire, pas seulement dans le jeu mais aussi dans la vie. Prévoir ses mouvements. Être malin. » Tout au long de la semaine, Masta Killa a diffusé un peu de sa sagesse dans des endroits où on ne s’y attendait pas forcément.


Photo – Ben Townsend

En train d’attendre mes bagages à Sydney, je n’arrive toujours pas à y croire, je voyage avec le Wu !

Backtage à Sydney. RZA n’était jamais loin d’une bouteille de Moet et bordel, il buvait toujours d’une manière hyper smooth. Il aurait pu voler ton portefeuille et ta meuf d’une main en te servant un verre de Cabernet de l’autre.

Raekwon et Masta Killa en train de fumer un joint avant de monter sur scène à Sydney. En gros, les deux étaient défoncés la majeure partie du temps. Ils étaient également super amicaux. Peut-être qu’il y a une corrélation entre les deux.

Ghostface Killah me foutait vraiment les jetons et je ne lui ai pas adressé la parole durant les deux premeirs jours. Il semblait bien plus heureux d’observer que de parler. Il était au taquet, toujours au courant de ce qu’il se passait. Il pouvait rester assis avec un morceau de poulet dans la main tout en surveillant tranquillement le bordel provoqué par les 40 personnes qui s’agitaient en coulisses. Je ne dirais pas que le type avait l’air joyeux, mais plutôt satisfait – le genre de satisfaction qui vient quand tu sais que tu as eu un impact sur ton domaine et sur le monde en général.

Plus tard dans la semaine, on a discuté un peu plus et j’ai découvert qu’il était finalement comme les autres, un géant sympa qui posait des questions du genre « Yo, en quelle année on a construit ce centre comemrcial ? » Je peux désormais cocher la ligne « acheter des boots avec Ghostface » sur ma liste de tâches à faire avant de mourir.

GZA était le seul membre du Wu qui avait amené sa compagne sur la tournée. Du coup, le mec était quasi-invisible, sûrement en train de siroter du thé vert et de mater des émissions d’enchères sur le cable, confortablement installé à l’hôtel. Et il n’aimait vraiment pas les photos non plus. On peut le voir ci-dessus me griller en train de le photographier. Rien n’échappe à l’oeil du Genius. Je suis baisé.

En fait, il venait juste demander une bouteille d’eau.

Voilà où j’ai passé le concert de Sydney, la foule était impressionnante. Mon coeur battait comme jamais.

Après le show, le Wu s’est fait livrer de la nourriture dans les vestiaires. Ils de sont enfilés des fruits, des salades, des gâteaux, de la viande froide, des putains de steaks, et tout le reste, sauf des sushi, curieusement. Il y avait une cargsaion de sushi et personne n’y a touché.

Masta Killa et RZA sont vegan. Tous les deux m’ont proposé du tofu frit en me lançant « Pourquoi faire du mal aux animaux ? »

DJ Mathematics. Il parlait très doucement et était très poli. Un DJ incroyable, d’une timidité tout aussi incroyable.

Raekwon était puissant, c’est le terme qui le résume le mieux. Le simple fait de rester à ses côtés était hyper enrichissant. Une brève conversation avec lui a modifié ma vision sur le pouvoir des mots.


Photo – Michael Christidis

L’après-concert avec Raekwon, Masta Killa et Nico Ghost.

RZA s’est rué derrière les platines durant l’afterparty de Sydney.


Photo – Seany Foster

Raekwon m’a appris comment bien prononcer le mot « Moet ».

La nation Wu n’a pas de frontières. Cette fille venait de Finlande, je ne sais même pas comment elle s’est retrouvée là.


Photo – Ben Townsend

Le lendemain à Brisbane, on a déjeuné peinards dans un restaurant de burgers en discutant de trucs profonds comme de trucs débiles. J’ai totalement oublié que j’étais avec le Wu-Tang Clan, c’étaient juste des types ordinaires.

Le soir, on a fini dans un club de Fortitude Valley parce que Ghostface trouvait qu’il était « carrément beau ». Je discutais avec RZA quand une fille s’est pointée me demandant si c’était vrai que le Wu-Tang était en ce moment dans le club. Je me suis tourné vers RZA, j’ai regardé la fille et je lui ai rapondu « Nah ». Et elle est partie. RZA m’a donné une tape et m’a dit : « Respect fils, si elle ne connaît pas nos visages, elle ne nous mérite pas. »


Photo – Steven Ondarch

Le lendemain, Ghostface voulait se tailler la barbe avant le concert de Brisbane. J’adore tout ce qui est gratuit alors je me suis fait une coupe moi aussi. Aux côtés de Ghostface. Bonnard, non ?

Ensuite, on s’est encore tapé des burgers chez Hungry Jack parce que Ghostface adore vraiment les burgers. C’était plutôt rassurant de voir que ces mecs, qui pouvaient se permettre de bouffer dans des restaurants dans lesquels je n’aurais même pas pu me payer un verre d’eau, succombaient régulièrement à l’appel démoniaque du menu « boucheur d’artères » à 5 dollars.

Le concert de Brisbane, vu de dos.

« Wu-Tang motherfuckerrrrrrr ! »

À la fin du show de Brisbane, RZA a demandé aux promoteurs de Beyond The Valley de le rejoindre sur scène et a dit au public à quel point il était impressionné de voir que des types aussi jeunes avaient été capables de réunir le Wu-Tang Clan sur ces dates. J’ai sauté de scène pour prendre la photo.

Et c’est ici que s’arrête mon aventure. Tout au long de cette tournée, j’ai été ballotté dans des voitures particulières, j’ai cédé à la nourriture la plus délicieuse, j’ai été traité comme un VIP partout où je me suis rendu, des nightclubs aux pharmacies, et j’ai dormi dans des hôtels magnifiques, mais je crois que le plus important, c’est que j’ai réalisé que ces mecs que je mettais sur un piédestal étaient finalement très terre-à-terre et terriblement sympas.

Voilà plus de 20 ans que l’album 36 Chambers est sorti, et durant ma semaine avec le WU-Tang, je me retrouvais inconsciemment à examiner chaque membre du groupe en fonction de leur aura de l’époque, pour vérifier si elle était intacte. La hype n’est plus de leur côté aujourd’hui, et c’est compréhensible. On les arrêtait pour des autographes ou des photos gênantes, mais il n’y a jamais eu de bousculade pendant ces quelques jours. Au restaurant, ils ressemblaient juste à des mecs de 45 ans. Ils se posaient dans les coins VIP avec un air un peu fatigué, comme s’ils étaient lassés du game. Sur scène par contre, ils étaient évidemment à fond, sans âge, ils crachaient le feu. Quand les lumière s’allument et que la foule gronde, vous pouvez toujours compter sur le Wu-Tang Clan pour foutre le bordel.


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