Qui aurait idée de mélanger des thèmes aussi différents que le folklore russe et le fétichisme ? Quelqu’un de la trempe de Karina Akopyan, selon toute évidence. Cette artiste londonienne d’origine russe réalise ce mariage improbable dans une exposition au concept store The Old Truman Brewery, dans l’est de Londres : « Martyrs & Matryoshkas ».
Au programme : autoportraits photo, illustrations, sculptures et installations imprégnés d’iconographie russe — poupées russes et tenues traditionnelles —, dans le but d’explorer et interroger l’identité, la religion et les valeurs russes, tout autant que la relation de l’artiste avec ces dernières. « L’exposition s’intéresse à la place de la tradition dans la société contemporaine, et s’interroge s’il s’agit d’une belle nécessité ou, au contraire, à un ralentissement du progrès », explique Akopyan à The Creators Project.
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Akopyan fait appel à ses expériences passées, notamment une enfance au sein de doctrines orthodoxes — qu’elle a fuies — mais aussi entourée d’art religieux. « Je pense que l’art religieux est simplement beau », continue-t-elle. « C’est plaisant à voir et je ne peux pas m’empêcher de l’aimer — ses motifs, ses couleurs, ses sujets épiques, les scènes d’enfer et de paradis… Je dois avouer qu’il y a aussi des sujets intéressants, parfois sombres. Mais comme les gens qui utilisent souvent la religion comme prétexte au sectarisme et au jugement, je n’ai pas de problème pour utiliser la religion pour son symbolisme décoratif et piocher dans ses idées. »
La particularité du travail d’Akopyan est d’intégrer cette iconographie dans les codes vestimentaires du fétichisme. Les poupées russes deviennent des personnages en latex, décorées de clous et de sangles. La jeune femme fait partie de la scène fétichiste londonienne depuis une dizaine d’années, familière du célèbre club Torture Garden, l’un des plus gros clubs fétichistes d’Europe.
« Je pense que ça a largement agit comme catharsis dans ma passion pour l’art fétichiste, qui n’en était alors qu’à ses balbutiements », fait remarquer Akopyan. « J’ai appris d’artistes comme Tom of Finland, John Willie, Carlo et Eric Stanton. Je trouve beaucoup d’inspiration simplement en parlant avec des gens, en m’informant, mais aussi des performances et de la culture vestimentaire de cette scène. Un truc, qui peut être vu comme bon ou mauvais, c’est qu’il y a beaucoup de créativité qui reste là mais ne sort pas à la lumière du jour et à un public plus large, mais je pense que c’est quand même un endroit formidable pour trouver l’inspiration. »
« Je me demande souvent ce qui m’attire tant dans la scène fétichiste et je pense que la répons est que c’est l’échappatoire parfait des normes dans lesquelles je vivais en Russie », conclut Akopyan.
« Martyrs & Matryoshkas » est à voir à l’Old Truman Brewery, à Londres, jusqu’au 18 décembre. Pour en savoir plus, cliquez ici, et là pour retrouver le travail de Karina Akopyan.