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Les marques veulent analyser votre visage à partir de vidéos Youtube

Et personne ne semble décidé à les envoyer paître.
Janus Rose
New York, US

Si vous vous demandiez si les publicitaires seraient un jour intéressés par les myriades de vidéos personnelles uploadées chaque jour sur les réseaux sociaux, vous avez trouvé la réponse à votre question.

La dernière mode en matière de surveillance vient de Mattersight Corporation (basée à Chicago) et de son système de « vidéo prédictive. » L'entreprise désire utiliser des outils d'analyse de la parole et des expressions faciales afin de « prédire le comportement des consommateurs à partir de leur état émotionnel et de leur personnalité. » Des informations extraites à partir de simples vidéos YouTube.

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« Les marques peuvent désormais exploiter les données sur la personnalité d'un utilisateur en analysant les vidéos publiques accessibles en ligne par l'intermédiaire des réseaux sociaux tels que YouTube et Vine, » se vante la société dans un communiqué de presse annonçant qu'elle a récemment déposé un brevet pour sa technologie. L'objectif de la plateforme est de laisser les marques faire des prédictions sur le comportement des consommateurs (ce qui induit une forme de manipulation) en étudiant leur discours et leurs expressions faciales, puis en établissant des profils de personnalité à partir de ces informations.

« Ces idées nous permettront de prédire plus précisément les réactions des individus à tel produit et tel service, et d'anticiper leurs comportements de consommation, » explique le responsable technique de Mattersight, Chris Danson. La société affirme que sa mission est « d'aider les marques à mieux communiquer avec leurs clients, » ce qui signifie apparemment « scanner le visage des gens sans leur consentement. »

Les technologies telles que la vidéo prédictive ont récemment poussé les annonceurs à affluer vers les plateformes vidéo, leur permettant d'exploiter des données (de plus en plus intimes) qui leur étaient auparavant inaccessibles, puisqu'elles portent directement sur les comportements humains. IBM a promu sa technologie de reconnaissance faciale et d'analyse de la personnalité comme un moyen pour les spécialistes de vente et de marketing d'obtenir des informations en temps réel sur les réactions des individus lors d'un achat. De nouvelles plateformes de vidéo comme Facebook Live semblent s'être positionnées de telle manière à profiter de ces nouvelles technologies, destinées à devenir de plus en plus précises.

« Ce qui est terrifiant là-dedans, c'est qu'il est possible de lire en vous comme à livre ouvert. Le système tente, littéralement, de comprendre ce qu'il se passe dans votre tête en observant votre visage, » explique Adam Harvey, artiste et chercheur s'étant prononcé contre la généralisation de la reconnaissance faciale.

Mattersight explique que son système est destiné à « améliorer l'expérience utilisateur, » mais on voit bien qu'il pourrait facilement être adapté par les forces de l'ordre ou l'armée dans un but de surveillance civile. Aux Jeux Olympiques d'hiver de 2014 à Sochi, une technologie similaire appelée Vibralmage a scanné les expressions faciales du public dans le but de donner au Service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie (FSB) la capacité à « détecter quiconque semblerait dans un état mental agité » au sein d'une foule, c'est-à-dire « représentant une potentielle menace, » selon un article du New York Times.

Les agences de sûreté nationale américaines sont très intéressées par les données récoltées par les entreprises comme Mattersight. Le FBI possède une base de données biométriques massive qui, selon des estimations, contiendrait plus de 52 millions de visages, dont plusieurs millions appartiennent à des citoyens américains qui ont jamais été soupçonnés de quoi que ce soit. Dans un document public publié ce mois-ci, le FBI explique qu'il ne devrait pas être tenu de révéler si tel ou tel individu est effectivement dans sa base de données ; il souhaite également conserver ces données pour une durée indéfinie dans le but de prédire de futurs crimes.

Même si ces technologies restent entre les mains des spécialistes de marketing, il y a fort à penser que les citoyens ne seront pas très à l'aise avec l'idée que leur visage soit régulièrement scanné à des fins commerciales. Même s'ils ont consenti à signer les Conditions d'Utilisation obscures de YouTube.