trafic d'êtres humains

Avec les mineurs exploités par des réseaux de trafiquants parisiens

« Il te prévient. Si tu le dénonces, t’es mort »
Une manifestation contre les trafiquants
LUCAS BARIOULET / AFP

« On vivait dans des grands squats à Paris, dans le 93 ou le 94. Ce sont des endroits dangereux », explique Adam, 17 ans, originaire d’Alger. En cause, des tauliers pas toujours fréquentables. « Ce sont des gens qui ont entre 26 et 35 ans et qui ont déjà passé beaucoup de temps à Paris. Ils ont fait de la prison. Il y a les gens qui volent, ceux qui vendent des cigarettes Marlboro, ceux qui travaillent sur les marchés trois fois par semaine, à Clignancourt, Barbes et dans le 93 ». Des dizaines de jeunes mineurs marocains, tunisiens ou algériens tentent de survivre à Paris. Condamnés à l’errance, faute de prise en charge à leur arrivée, ils sont la cible de réseaux organisés qui les exploitent.

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« Marlboro ! Marlboro ! Marlboro bled ! », lance une nuée de gamins parfois très jeunes aux voyageurs qui sortent de la station de métro La Chapelle dans le 18e arrondissement. Depuis quelques semaines, ils ont agrandi leur territoire et pris le contrôle des trottoirs qui bordent la station, place hautement stratégique pour écouler les cigarettes de contrebande.

Jusque-là, l’emplacement était occupé par des demandeurs d’asile afghans qui parvenaient à gagner de quoi survivre grâce à cette activité. Les jeunes mineurs originaires d’Algérie, du Maroc ou de Tunisie, présents non loin, ne vendaient alors que des médicaments. Cette répartition tacite de l’espace garantissait un certain équilibre entre les groupes. Mais récemment, plusieurs face-à-face tendus ont forcé les réfugiés, plus vulnérables, à céder le terrain pour se rabattre vers des positions moins lucratives.

La bande qui animait joyeusement le passage sous le métro aérien a déserté les lieux. Désormais, les demandeurs d’asile vendent leurs cigarettes à l’extrémité nord de la place de La Chapelle, devant le café qui fait le coin de la rue Max Dormoy. De l’autre côté du trottoir, les gamins marocains, algériens ou tunisiens règnent sans partage sur les artères du quartier de la Goutte d’Or. « Tout le monde vient traîner dans le 18e. Il n’y a pas seulement des Marocains, il y a des Algériens, des Tunisiens, des renois… », explique Adam.

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« Chaque matin, une file de mômes affamés et fatigués se presse devant le dispositif d’accueil des mineurs isolés non accompagnés (MNA) à Couronnes »

Plus loin, sur le boulevard de La Chapelle, le métro aérien marque un dernier arrêt avant de replonger dans les entrailles de la capitale vers les stations plus gentrifiées du 18e. Dehors, le carrefour des boulevards Barbes et Rochechouart bouillonne. Alors que le prix du paquet dépasse 10 euros chez les buralistes, les « Marlboro bled » vendues sur l’asphalte du Nord parisien, connaissent un succès certain. L’envers de ce commerce s'avère cependant peu reluisant.

À leur arrivée en France, la première désillusion frappe souvent les enfants lorsqu’ils se présentent aux services sociaux. Chaque matin, une file de mômes affamés et fatigués se presse devant le dispositif d’accueil des mineurs isolés non accompagnés (MNA) à Couronnes, lisière du 11e et du 20e arrondissement. Les mineurs que nous avons rencontrés disent tous avoir été refoulés. Chaque soir, l’association ferme délibérément ses portes à des dizaines d'enfants auxquels le département doit pourtant assistance. Les bambins malchanceux vivent dans l’errance au milieu de l’opulente capitale.

Principal point de chute des mineurs isolés maghrébins, la Goutte d’Or (18e) concentre toutes les attentions. En cause, la présence récurrente de deux groupes identifiés totalisant une trentaine d'enfants particulièrement incontrôlables qui chahutent le quartier. C’est le Centre d’action sociale protestant (CASP) qui est missionné en décembre 2017 par la ville de Paris pour répondre à l’urgence et prendre en charge ces mineurs. Le dispositif s’adresse uniquement aux jeunes identifiés comme marocains. L’association dispose d’un local dans le quartier et ses équipes effectuent des maraudes. Le soir, elle ouvre un abri de nuit qui peut accueillir douze jeunes. Coût de ce dispositif inédit : 1,3 million d’euros annuels, dont 700 000 € versés par la mairie de Paris.

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Parallèlement, la préfecture de Paris a noué d’étroites relations avec la police marocaine en vue d’expulser les jeunes Marocains. « S’il y avait un tel accord, on n’aurait pas de raison d’être », conteste-t-on au CASP. « Il y a vraiment eu un déploiement de policiers marocains », confirme pour sa part Alexandre Le Cleve, membre de l’association Trajectoire et auteur d’un rapport sur les mineurs non accompagnés marocains. « Ça n’a pas complètement fonctionné. Notamment parce que vous n’avez pas le droit de faire de la reconduite à la frontière pour des mineurs ». Les pressions exercées par le milieu associatif et le Défenseur des droits auront finalement raison du sinistre projet du ministère de l’Intérieur.

Les bénéficiaires du pactole offert par la ville de Paris boudent la presse. Au début du mois de mars, Chansia Euphrosine, responsable du dispositif, a finalement accepté de communiquer avec nous, non sans s’assurer au préalable de la bénédiction de la ville de Paris. Nous avons donc eu le privilège de nous rendre à l’abri de nuit du CASP, sous son étroite supervision. Elle a cependant refusé que nous ayons des contacts ultérieurs avec des éducateurs du dispositif. La communication de l’association est bien verrouillée.

Pour les jeunes mineurs qui n’accèdent pas au refuge du CASP, les nuits sont bien sombres. « Pendant les maraudes, on retrouve régulièrement des enfants en sanglot la nuit à la Chapelle », nous raconte Julie* bénévole dans une organisation humanitaire de soutien aux migrants. De son côté, Chansia Euphrosine assure pourtant que les jeunes ne quittent pas la Goutte d’Or. Mais au fil de la discussion, il apparaît que le CASP n’a, en réalité, pas la moindre idée de l’endroit où dorment les enfants qui n’ont pas été choisis dans la journée pour intégrer son refuge.

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La combine pour passer une nuit à l’abri des intempéries : les Autolib’ de la ville de Paris. « Il faut ouvrir la voiture et la laisser à six heures du matin, comme tu l’as trouvé », précise Anis, un Algérois de 17 ans. Une technique réservée aux plus aguerris. Ces derniers ne tiennent cependant pas longtemps. Ayoub, 17 ans, a préféré dormir avec un ami dans les jardins du Sacré-Cœur à Montmartre (18e). « Il y avait des alcooliques qui dormaient avec nous. Les gens venaient fumer du crack. C’était la merde en vérité. J’ai attrapé la gale », se souvient l’adolescent originaire d’Annaba, dans le nord-est de l’Algérie. Le jeune homme est arrivé dans l'hexagone six mois avant notre rencontre. De son côté, Anis est en France depuis huit mois. Adam, arrivé il y a un an, fait figure d’ancien. Nous partageons un café rue Stephenson (18e) avec les trois adolescents. Ils ne se connaissent pas mais les trajectoires dont ils témoignent présentent de nombreuses similitudes.

« Personne ne veut en entendre parler » se désole Simon*, éducateur de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) dans le 93. « Les MNA vivent dans les squats, mais personne ne veut savoir ce qu’ils font ni comment ils vivent ni pourquoi ils sont là. C’est un gros tabou parce qu’il y a un gros problème au niveau des politiques publiques ». La réforme de la protection de l’enfance du 5 mars 2007 renforce le rôle prééminent des conseils généraux dans la protection de l’enfance et désigne les présidents de départements comme chefs de file de cette politique. « Il y a eu un jeu de passe-passe. La mairie de Paris en tant que conseil général dit qu’elle fait tout bien et qu’elle assume sa part de la prise en charge. Ce qui n’est pas vrai. Paris n’assume pas et le 93 n’a pas de moyens alors que ce sont les deux départements les plus touchés par ces phénomènes », se désole l’employé du ministère de la Justice.

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« Tu ne peux pas partir parce que tu ne sais pas où aller. Alors ils profitent de toi » – Adam

Pour échapper à la rue, la plupart des enfants rejoignent les squats de la région parisienne. Le séjour n’est pas gratuit pour les jeunes mineurs qui cherchent désespérément un toit. « Tu peux dormir dans les squats, mais il faut ramener de l’argent à la fin de la journée, raconte Adam. Il y a des gens qui te disent ce que tu dois faire. Ils te demandent de voler, de vendre des médicaments ou des cigarettes ». Adam a écumé les lignes de métro pour détrousser des passagers. « Les premiers temps, ils restent avec toi. Tu vas dans le métro et ils te montrent ce que tu dois voler », expose-t-il. « Une foi que les jeunes sont dans ces réseaux-là, on n’arrive plus forcément à les accrocher », constate Simon de la PJJ de Seine-Saint-Denis. C’est la première étape d’un processus qui s’apparente à de la traite des êtres humains. « Pour la qualification de traite des êtres humains, il faut d’abord que vous ayez un acte du type recrutement, hébergement, transfert, etc. », nous explique-t-on à l’ONG ECPAT-France qui lutte contre l’exploitation des enfants.

Les adultes désignent les cibles et se tiennent en retrait quand les adolescents se font arrêter. « Il te prévient. Si tu le dénonces, t’es mort », rapporte Anis qui travaillait aussi dans les transports. Les enfants sont régulièrement punis. « Dans le squat, il y a le couteau, la gazeuse, le marteau. Je les ai déjà vus en frapper d’autres », affirme Anis. Les pickpockets moins zélés subissent des mauvais traitements. Adam a été battu pour avoir refusé d’aller voler, il a été hospitalisé pour se faire recoudre le visage.

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« Tu ne peux pas partir parce que tu ne sais pas où aller. Alors ils profitent de toi », raconte Adam. Les jeunes mineurs maghrébins, sans-abri et perdus fournissent une main-d’œuvre très bon marché à leurs hôtes peu scrupuleux. « C’est comme du chantage », dénonce à son tour Anis. L’adolescent a tenté sans succès de mener des activités plus honnêtes. « Ils m’ont dit que je n’avais pas d’argent, mais que j’étais mineur. Alors il fallait voler », résume-t-il. Arrêté à plusieurs reprises, Adam a dénoncé ses oppresseurs aux policiers. Sans suite. Adam sera relâché et contraint de poursuivre ses activités. « Malheureusement, je ne suis pas étonné », soupire Alexandre Le Clève, « Aujourd'hui, il n’y a pas vraiment de dispositifs adaptés pour la protection des victimes de la traite quand elles commencent à témoigner ».

« J’ai vendu des cigarettes à La Courneuve. Après je volais. Ce que tu voles, tu leur donnes. Eux, ils te donnent un tout petit peu d’argent », rapporte Adam. D’après les jeunes que nous avons rencontrés, les adultes garderaient ainsi plus de 70 % du butin et des recettes de la contrebande. Une situation d’emprise et d’asservissement qui caractérise de manière prégnante la traite d’êtres humain. « « Pour les adultes, il faut démontrer qu’il y a, par exemple, de la violence ou du mensonge pour qualifier la traite des êtres humains. On n’a pas besoin de ça pour les enfants », précise-t-on chez ECPAT-France. « Pour la qualification juridique de traite des êtres humains on a juste besoin d’un deuxième fait en plus de l’acte, c’est l’exploitation. Ça peut être de la délinquance forcée ».

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Les jeunes mineurs isolés doivent se contenter de ce que leur laissent les receleurs et les trafiquants pour subvenir à leurs besoins. « Ça ne suffit pas, affirme Adam. Tu laves tes habits une foi tous les quinze jours. Tu dois parfois aller réclamer de quoi manger à la mosquée ». Les enfants qui n’intègrent pas les squats sont, eux aussi, souvent contraints de travailler pour ces réseaux. « Je vendais des médicaments à La Chapelle », confirme Ayoub qui ne parvenait pas non plus à survivre dans les jardins de la butte Montmartre.

« Quand tu en prends, tu es super ! Ça va bien, tu as de l’énergie et tu ne peux pas avoir mal. Tu peux faire n’importe quoi, tu t’en bats les couilles » – Adam

Pour mettre les enfants au charbon, leurs hôtes utilisent une recette bien à eux. « Quand je suis arrivé, les gens du squat m’ont donné du Rivotril. Mais je ne savais pas ce que c’était. J’ai oublié tout ce que j’ai fait après », relate Adam. Le produit est familier des polytoxicomanes qui l’utilisent depuis une trentaine d’années. « C’est un médicament de la famille des benzodiazépines, un anxiolytique puissant qui détend et qui peut être facilement détourné pour ressentir des effets d’amnésie et de défonce… », résume Arnaud Plat, médecin addictologue au CSAPA Charonne dans le 13e. La défonce n’est pas en option et les récalcitrants doivent plonger aussi. « Si tu refuses d’en prendre, au début ils le mettent dans ton café sans rien te dire. Après c’est toi qui en demandes parce que sans le prendre, tu ne peux pas partir voler ou travailler », explique Adam.

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Les enfants privilégient un autre médicament, le Lyrica, dont les effets seraient moins puissants que le Rivotril. Leur cœur s’emballe, leur vision se trouble, mais le produit donne un sacré coup de fouet. « Quand tu en prends, tu es super ! Ça va bien, tu as de l’énergie et tu ne peux pas avoir mal. Tu peux faire n’importe quoi, tu t’en bats les couilles », explique Adam. Au refuge du CASP, l’infirmière fait état de pratiques dangereuses. Les excès de colère des jeunes se traduiraient par des automutilations et des scarifications.

La prégabaline, commercialisée sous le nom de Lyrica, est un antiépileptique, aux effets anxiolytiques et analgésiques, moins connu des professionnels de santé. « On en entend parler, mais ces dernières années, on n’a vu personne venir pour un mésusage de Lyrica, nous répond Arnaud Plat. Ces jeunes usagers ne viennent pas consulter. Bien évidemment, ceux qui distribuent ces médicaments ne donnent pas beaucoup de conseils sur les risques et l’orientation quand on va mal ».

Pour les jeunes mineurs isolés, les médicaments deviennent indispensables pour supporter leurs conditions de vie insalubres. « Dans le squat, tu manges des médicaments pour oublier parce qu’il n’y a rien. Ni la lumière, ni l’eau, rien… Tu restes sur ta chaise à respirer du shit et tu dors comme ça », expose Anis. Rapidement, le produit s'avère très addictif et le manque insupportable. « Tu prends un Lyrica et le lendemain il t’en faut deux, puis trois, puis quatre… Quand tu n’en manges pas, tu ne peux même pas te réveiller, parler ou marcher. Tu ne peux rien faire. Il faut en manger pour être soulagé », constate Adam. La consommation des enfants augmente. Ayoub et Anis consommaient 6 à 8 cachets de Lyrica par jour. Adam en avalait quotidiennement quatorze doses.

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Maltraités, dépendant du réseau pour dormir à l’abri et contraint de travailler pour celui-ci, les jeunes mineurs isolés deviennent toxicomanes à leur corps défendant. Les cachets de Lyrica constituent un levier supplémentaire pour leurs bourreaux. « C’est un piège. Ils te les donnent, mais après tu dois les acheter », s’étrangle Anis. La majorité de l’argent que reçoivent les enfants revient ainsi dans les poches de leurs hôtes qui fournissent en échange les médicaments.

Au CASP, Chansia Euphrosine reste néanmoins catégorique. « L’hypothèse de la traite d’être humain a été écartée », nous assène-t-elle avec insistance. À notre grand étonnement, elle s’appuie sur le rapport commandé par la mairie de Paris à l’association Trajectoire. Dans ce document paru en avril 2018, les enquêteurs écrivent pourtant : « Au cours de nos entretiens avec des jeunes et des associations en France et en Europe, plusieurs situations semblent pouvoir relever de la traite des êtres humains ». Les auteurs se gardent bien d’émettre un diagnostic définitif. « Dans notre rapport, on n’écarte pas du tout l’hypothèse. On dit que l’on n’a pas réussi à tout déterminer et qu’il semblait qu’il s’agissait d’une structure locale », confirme Alexandre Le Cleve. « Pour l’instant on a travaillé sur les Marocains et on n’a pas abordé le sujet des Algériens, précise-t-il. Mais ce sont des trajectoires assez communes qu’il s’agisse des Marocains, des Algériens ou des Tunisiens. Des mômes exclus du système de protection de l’enfance qui se retrouvent dans des situations d’emprises ».

À Bordeaux, le parquet a ouvert une information judiciaire pour « traite des êtres humains en bande organisée » après l’arrestation de plusieurs personnes, dont un homme suspecté d’exploiter de jeunes Marocains. Une procédure similaire serait en cours à Brest. Mais dans la capitale rien ne bouge. Les témoignages répétés et concordants des enfants exploités conduiront peut-être le parquet de Paris à prendre conscience à son tour du phénomène de traite des mineurs isolés originaire du Maghreb. Mais cette réaction de la Justice ne sera possible que si les fonctionnaires de police daignent prendre en considération le témoignage des enfants qu’ils interpellent. Pour les associatifs avec lesquels nous avons échangé, seule une multiplication des signalements peut forcer le parquet à réagir.

La nature de ce qui peut être qualifié de traite des êtres humains ne relève pas d’un positionnement des associations et n’est pas sujette à interprétation, elle est définie par la convention de Palerme des Nations Unies en 2000, ratifiée par la France. Elle fait l’objet d’un protocole additionnel spécifique dont la lecture est limpide. Cette définition est reprise dans la convention de Varsovie du Conseil de l’Europe en 2005.

Comment une telle situation a-t-elle pu s’installer à Paris et dans le 93 ? Personne ne semble vouloir se mouiller pour répondre. Plusieurs sources au sein des institutions judiciaires, des associations et des ONG ont accepté de nous éclairer un peu sans qu’on ne leur attribue leurs propos. Dans le cas des mineurs isolés originaires des pays du Maghreb, différents intérêts qui ne sont pas forcément contradictoires entrent malgré tout en collision : l’ordre public d’une part avec ses aspects policiers et judiciaires, la municipalité de Paris avec la dimension politique indéniable que la prise en charge complète des mineurs étrangers induirait et enfin la protection de l’enfance qui apparaît comme la grande perdante. La mairie semble se satisfaire de son dispositif, le parquet de Paris n’ouvre pas d’enquête et les fonctionnaires de la PJJ font ce qu’ils peuvent au bout de la chaîne. De cette dichotomie entre des acteurs censés travailler de concert résulte une inertie dont les enfants sont les premières victimes.

Chanceux, Ayoub a été pris en charge par les autorités suite à un banal contrôle de police, deux mois après son arrivée. Il sera hospitalisé pendant une semaine pour se débarrasser de la gale avant d’être confié par un juge aux services sociaux. Il vit aujourd’hui à l’hôtel, suit des cours et souhaite devenir soudeur. La semaine prochaine, il a rendez-vous chez le médecin pour essayer d’arrêter de prendre du Lyrica. Devant ses aveux et son visage tuméfié, la justice a également confié Adam à l’Aide sociale à l’enfance et à la Protection judiciaire de la Jeunesse. Inscrit au lycée, il souhaite devenir électricien. Dans la même situation, Anis attend pour sa part de pouvoir s’inscrire à l’école pour devenir coiffeur. Dans moins d’un an, ils seront majeurs. La protection de l’enfance cessera de les prendre en charge et les jeunes adultes, livrés à eux-mêmes, devront trouver une nouvelle solution pour survivre.

*Les prénoms ont été modifiés pour préserver leur anonymat.

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