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Mali

Une vingtaine de djihadistes présumés, arrêtés dans un bus au sud du Mali

Les opérations contre-terroristes se multiplient ces derniers jours au Mali, alors que des actions de groupes djihadistes de la région semblent préciser leur souhait d’ouvrir un front au sud du pays.
Pierre Longeray
Paris, FR
Photo via Flickr / Hugues

Une vingtaine de djihadistes présumés a été arrêtée par les forces de sécurités maliennes, alors que les hommes voyageaient à bord d'un car, ce lundi soir, dans le sud du Mali, près de la frontière avec la Côte d'Ivoire voisine. L'opération s'est déroulée dans la ville de Zégoua, dans la région de Sikasso.

La ville de Zégoua, où le car a été stoppé dans le Sud du Mali. Via Google Maps.

Depuis début juin, opérations terroristes et contre-opérations des autorités maliennes se multiplient dans l'extrême Sud du pays, près de la frontière avec la Côte d'Ivoire. Une situation nouvelle puisque depuis les débuts de la crise malienne, en 2012, les groupes djihadistes frappaient principalement dans le Nord du pays, au-dessus de Bamako.

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À l'époque, divers groupes islamistes — tel qu'Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI), Ansar Dine ou Al-Mourabitoune — se déployaient dans le nord du Mali pour s'y établir et réclamer l'Azawad — le nom donné à la moitié nord du pays. La France était alors intervenue dans le cadre de l'opération Serval dès janvier 2013 pour casser la progression des groupes islamistes dans le Nord. Serval a depuis été remplacé par l'opération Barkhane qui couvre toute une partie de la région du Sahel.

2 passeports français retrouvés

Les présumés djihadistes ont été appréhendés par les autorités maliennes, alors qu'ils étaient à bord d'un car de transport qui arrivait de Côte d'Ivoire, un pays d'Afrique de l'Ouest, qui se trouve au Sud du Mali. Ils seraient partis d'Abidjan, capitale économique de la Côte d'Ivoire, selon l'AFP. Toujours d'après l'agence de presse française, le car pouvait avoir pour destination finale Bamako, la capitale du Mali, ou Gogui, une localité du nord-ouest malien, selon les témoignages des autres passagers. Les forces sécuritaires maliennes ont fait savoir, ce mardi, que la vingtaine d'hommes avait été escortée jusqu'à Bamako, où ils vont être interrogés.

L'agence de presse Reuters cite une source sécuritaire, ce mardi en fin de journée. D'après celle-ci, les individus arrêtés lundi sont « tous des islamistes, tous barbus ». La plupart sont originaires de Mauritanie, un pays situé à l'ouest du Mali. Un média local indique que le groupe aurait un chef, arrêté lui aussi, un certain Samir Enrique.

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Interrogé par VICE News, ce mercredi, sur les détails de l'arrestation, le Ministère de la Défense malien n'a pas pu donner suite à notre demande dans les délais de publication de cet article.

Des Maliens et deux personnes en possession de ce qui est présenté comme des passeports français viennent compléter le contingent. Pour ces deux derniers, il pourrait s'agir de Franco Maliens ou de faux papiers français. Des vérifications sont en cours par les autorités.

Contacté par VICE News, ce mercredi après-midi, le Quai d'Orsay a déclaré ne pas être en mesure de confirmer cette information, ajoutant que « Notre ambassade est en contact avec les autorités maliennes à ce sujet. »

Cette nouvelle prise de présumés djihadistes s'inscrit dans un effort récent des forces sécuritaires du pays qui multiplient les opérations pour démanteler les divers groupes djihadistes qui menacent la région.

Ainsi, ce dimanche, la police malienne a annoncé avoir arrêté Saouty Kouma dans la ville de Melo, dans le centre du Mali. Kouma est l'un des assaillants présumés du restaurant La Terrasse, à Bamako, en mars denier. Trois Maliens, un ressortissant belge et un Français avaient perdu la vie dans cette attaque revendiquée par l'organisation terroriste Al-Mourabitoune.

La menace d'un second front au Sud se précise

La semaine dernière, un homme présenté comme un émissaire d'Iyad Ag Ghali — le chef du groupe terroriste Ansar Dine — a lui aussi été arrêté par les services de sécurité du Mali alors qu'il se dirigeait vers Bamako. Sur lui, les forces de l'ordre ont retrouvé des vidéos de propagande dans lesquelles Ag Ghali appelle ses partisans à se mobiliser au Nord comme au Sud du Mali. Les vidéos auraient été enregistrées le 1er juillet 2015. Selon Reuters, 6 personnes — dont deux femmes — auraient été arrêtées lors de cette opération, en plus de l'émissaire présumé.

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Fin juin, Ansar Dine avait mené plusieurs attaques contre des soldats de la Minusma (la mission onusienne de maintien de la paix au Mali) et des militaires maliens — à Bamako, mais aussi dans les zones frontalières de la Côte d'Ivoire et de la Mauritanie.

Selon des informations révélées suite aux auditions de l'émissaire présumé d'Iyad Ag Ghali, la semaine passée, le groupe Ansar Dine chercherait à sévir au sud. L'émissaire aurait aussi eu pour mission d'encourager l'installation de groupes djihadistes dans le sud du Mali.

À lire : Première attaque terroriste dans l'extrême Sud du Mali

Interrogé au début du mois de juin suite à la première attaque terroriste dans l'extrême Sud malien, Pierre Boilley, le directeur de l'Institut des mondes africains (IMAF), expliquait à VICE News, que « Le but de ces attaques pour les mouvements djihadistes est de montrer leur présence et faire parler d'eux. Il s'agit de communication, ils veulent montrer qu'ils sont capables de frapper n'importe où, au Nord comme au Sud. »

Une coalition de djihadistes serait en train de se monter dans le sud du pays, à cheval sur la frontière entre le Mali et la Côte d'Ivoire, selon des informations concordantes de la radio RFI et du magazine Jeune Afrique. Ansar Dine serait au centre de cette nouvelle coalition de 4 groupes terroristes et souhaiterait ouvrir un front au sud. Selon des médias locaux, dont le site d'information Mali Actu, ce front djihadiste au sud pourrait se développer dans la forêt de Sama, le long de la frontière avec la Côte d'Ivoire. En avril dernier, l'ONG Human Rights Watch s'inquiétait de la même manière du développement de forces djihadistes dans le centre du pays.

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La mission française change de tactique

L'armée française est toujours impliquée au Nord du Mali, et plus largement dans la région du Sahel, dans le cadre de la mission Barkhane (qui est présente en Mauritanie, au Mali, au Burkina-Faso, au Tchad et au Niger), lancée il y a maintenant bientôt un an.

Depuis quelque temps, les missions des forces françaises auraient quelque peu évolué : il ne s'agit plus avant tout d'affrontements entre militaires et djihadistes dans le nord du Mali. Les terroristes de la région ont été relativement affaiblis dans le nord du pays, et éviteraient de se confronter aux troupes françaises. D'après le Colonel Luc Laine, interrogé par Associated Press ce mardi, depuis la base française de Gao au Mali, « Les opérations sont isolées et ciblées et dépendent grandement du renseignement, » comparant la traque à une partie de cache-cache.

À lire : Qui sont les deux chefs djihadistes que l'armée française a tués au Mali ?

Suivez Pierre Longeray sur Twitter : @PLongeray

Bus se rendant à Bamako, photo via Flickr / Hugues