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Crime

L’Amérique vous présente son nouveau laser de la mort

Les avancées dans le domaine des lasers militaires pourraient bientôt rendre la stratégie des bombardements obsolète, trop chère et trop peu efficace.
Photo via Lockheed Martin

La semaine passée, Lockheed Martin a fait une démonstration de son laser Advanced Test High Energy Asset (ATHENA) pour mutiler une Ford F-150. Le test a une nouvelle fois prouvé que le laser est sans doute l'arme la plus efficace développée par l'homme pour déclencher des crises d'hystérie et lancer un flot de références de science-fiction bas de gamme dans les médias.

Les armes détruisent des trucs. En règle générale, les armes appliquent suffisamment d'énergie ou de force sur un objet pour le briser, le réduire en cendres, ou au moins faire exploser les limites physiques de la cible visée. Pour ce qui est des armes conventionnelles — comme les couteaux, les pistolets et les bombes — ce qui se passe est assez simple : l'objet subit soit la pression d'une explosion ou l'énergie cinétique délivrée par des objets tranchants et / ou pointus.

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Les lasers, comme n'importe quelle arme, transfèrent de l'énergie à une cible. Mais au lieu de transférer quelque chose de dur comme l'énergie cinétique d'une balle, les lasers communiquent de l'énergie thermique à travers de la lumière. Les lasers de combat fonctionnent de la même manière qu'une loupe tenue un jour de soleil au-dessus de pauvres fourmis : cela ne provoque pas une explosion hollywoodienne — les fourmis fondent, chauffent, ou cuisent comme dans les flammes de l'enfer. Jusqu'à ce que ça lâche.

Théoriquement, si vous envoyez assez d'énergie thermique sur une zone, elle peut fondre ou s'évaporer — ou même se transformer en plasma. Cela peut ensuite créer une réaction cinétique qui peut donner une belle explosion. Mais aujourd'hui, les lasers développés par l'armée sont loin d'avoir la puissance nécessaire pour produire un type d'explosion à la Michael Mann.

Un super-ralenti de lasers qui font exploser de toutes petites choses

Les projectiles — type balles, shrapnels… — ont, certes, le grand avantage de transférer beaucoup d'énergie sur une cible d'un coup d'un seul. Les lasers, eux, peuvent appliquer cette énergie sur un temps plus long. Un laser, c'est persistant et brûlant.

Pointer un laser sur le même point pendant un certain temps, ne va pas forcément le faire exploser, mais peut au moins faire fondre une surface visée. Comme vous avez déjà pu le constater — pendant votre période — « petit bandit armé d'une loupe, furieux exterminateur de fourmis » —, c'est aussi un moyen plutôt efficace pour faire un trou dans quelque chose.

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Certaines cibles, comme, disons, les tanks, nécessitent des heures de visée pour être transpercées par des lasers. En revanche, d'autres cibles militaires sont bien plus fragiles. Par exemple, la surface de certains missiles est légère— si vous vous y faites un trou, le missile se désintégrera en l'air. Les avions sont plus robustes, mais sous une petite couche de métal, vous pouvez rapidement avoir accès à des choses comme des réservoirs de carburants ou des boîtiers électroniques. Exploser un tank avec un laser ce n'est pas pour demain, mais pas mal d'objets volants sont des cibles accessibles à nos amis les lasers.

Vous vous demandez sans doute : si les lasers sont efficaces pour des cibles un poil moins robustes que des tanks, qu'est ce qu'il pourrait se passer sur des objets loin des standards de robustesse des tanks — comme les hommes, ou pire, un oeil ? Dans une de ces rares et étonnantes démonstrations de bon sens commun et civique, la plupart des pays ont interdit l'utilisation des lasers pour aveugler les gens, grâce au Protocol on Blinding Laser Weapons.

Ou sinon vous pouvez vous la jouer à la soviétique, et foutre des énormes lasers sur des tanks (Photo via Wikimedia Commons)

Bien avant que les lasers ne servent à faire des trous dans des trucs et bidules, ils ont été utilisés sur le champ de bataille comme capteurs, télémètres ou marqueurs d'objectifs. Comme prévu, cela n'a pas pris longtemps avant que certains se rendent compte que :

1) Ils pouvaient très facilement aveugler des gens avec des lasers

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2) Ça pourrait rapidement être relou si tous les conflits se résumaient en un flot ininterrompu de soldats aveuglés pour toujours dès l'instant où ils posaient le pied sur le champ de bataille. « Rejoignez l'armée ! Voyez le monde comme vous ne l'avez jamais vu ! Pas pour longtemps par contre ! »

Donc assez rapidement, les armées du monde entier ont estimé qu'aveugler les soldats avec des lasers était une technique pas super honnête, même dans le cadre de la guerre. Bon, rien ne dit que vous ne pouvez pas faire fondre un type avec un laser — mais puisque vous ne pouvez pas l'aveugler, le type aura sans doute la bonne idée de bouger avant d'être réduit en cendres. De fait, les lasers anti-personnels, c'est pas franchement possible.

Mais les lasers peuvent donc quand même détruire des missiles et je ne sais quoi d'autre. Cela dit, si les lasers prennent quelques secondes pour traverser la couche d'une cible volante, cela ne va pas vraiment être efficace. Il est difficile de croire que la cible va rester gentiment immobile attendant de se faire perforer par votre laser. Ce que Lockheed est parvenu à faire avec son nouveau modèle en termes de gain de puissance est important : réduire le temps nécessaire pour faire cramer un missile.

Lockheed fait a mis en oeuvre une technique qu'on appelle « la combinaison de faisceaux spectraux ». Pour faire simple, cela consiste à combiner plusieurs petits faisceaux dans un gros faisceau. Combiner 3 faisceaux de lasers de 10 kilowatts pour en faire un de 30 kilowatts est bien plus simple et moins gourmand en énergie que de faire un laser de 30 kilowatts. Cette puissance est largement suffisante pour cramer un moteur de petit camion.

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Malheureusement, pour les compagnies spécialisées dans le business des lasers militaires, dire que ça va vous prendre 1,2 au lieu de 1,9 seconde pour trouer une couche d'aluminium, ça ne fait pas décoller vos likes sur Facebook. Donc les petits malins qui travaillent chez Lockheed ont décidé de faire des démonstrations marquantes de leurs lasers : ils font un gros trou dans un objet connu du grand public, comme un pick-up.

Comme c'est expliqué dans le communiqué de presse de Lockheed: « Le prototype de laser a permis de faire un trou dans un moteur à près de 1,6 kilomètre. Le camion était monté sur une plateforme avec le moteur et les roues qui tournaient pour simuler une situation plausible. »

Peut-on s'attendre à voir les militaires utiliser des lasers basés au sol pour protéger nos frontières de hordes pick-up et / ou des véhicules tout-terrain ? Cela ne semble pas être pour tout de suite, parce que cela serait un peu idiot. Si vous pouvez toucher un pick-up avec un laser, vous pouvez aussi le toucher avec une arme ou un missile.

Mais cela nous ramène au fait que les lasers peuvent être efficaces contre des cibles volantes pas spécialement très robustes. Le communiqué de Lockheed à propos du laser ATHENA explique qu'il fait partie du sytème ADAM (Area Defense Anti-Munitions). Ce système est lui aussi intégré à la famille des systèmes C-RAM (contre-roquettes, artillerie et mortiers). Histoire d'être complet, les systèmes C-RAM peuvent (du moins en théorie) être utilisés pour éclater des missiles ou des drones. Généralement, ces systèmes sont utilisés pour défendre une zone (comme une base militaire) de voisins un peu fatigant qui vous balancent à longueur de journée un assortiment de roquettes et mortiers.

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Le système C-RAM le plus connu est le fameux « Iron Dome » israélien qui est plutôt efficace face aux explosifs lancés depuis Gaza sur le sud d'Israël. Le système de l'Iron Dome utilise des missiles pour intercepter et détruire les roquettes qui arrivent, avant qu'elles ne puissent atteindre leurs cibles. Mais les missiles utilisés par l'Iron Dome sont issus de la très haute technologie et coûtent bien plus cher que les roquettes faites maison par le Hamas. Un missile intercepteur coûte 100 000 dollars — une roquette made in Gaza, 1 000 dollars. Le ratio de 100 contre 1 est clairement en faveur de l'assaillant gazaoui. Pire, un système C-RAM peut être dépassé si l'assaillant lance une attaque coordonnée de multiples roquettes pour doubler le système défensif.

D'autres systèmes C-RAM existent comme le Phalanx américain ou le Nächstbereichschutzsystem MANTIS, petit bijou de syntaxe et de la défense à l'allemande. Ils utilisent des canons à mitraille Gatling qui sont capables de tirer 1 000 balles ou plus à la minute (en gros 15 balles par seconde). Ces systèmes sont bien moins chers que les systèmes avec missiles comme l'Iron Dome — mais ils sont loin d'être parfaits.

Et c'est là que les lasers pourraient être utiles. Une fois que vous avez jeté suffisamment de fric dans la recherche & développement pour mettre au point un système C-RAM à lasers opérationnel sur le champ de bataille, vous changez l'économie de la tactique défensive. Plutôt que d'avoir un système C-RAM/VSHORAD qui balance des missiles à 100 000 dollars l'unité pour éclater des roquettes qui coûtent à peine 1 000 dollars, vous pouvez utiliser un laser pour détruire la roquette pour moins d'un euro. Le ratio de 100 pour 1 en faveur de l'assaillant, devient de 1 000 pour 1 pour celui qui se défend.

Entre l'incapacité des lasers à faire exploser des tanks, l'inutilité d'utiliser des lasers pour éliminer des soldats, et la formidable possibilité offerte par les lasers de rendre les bombardements inefficaces et chers pour les ennemis, les lasers pourraient devenir une de ces rares armes qui rendent la guerre un peu moins guerrière.

Suivez Ryan Faith sur Twitter @Operation_Ryan