Les manifestations d’opposition au gouvernement organisées ce vendredi au Caire ont été violemment réprimées. On compterait trois militaires et trois manifestants morts.
Un officier supérieur de l’armée égyptienne a été tué dans un attentat en marge des manifestations, et une centaine de personnes avaient été arrêtées avant le début de plusieurs manifestations antigouvernementales.
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Selon des sources militaires citées par l’AFP, des inconnus à bord d’une voiture non immatriculée ont ouvert le feu sur un brigadier général et sur deux soldats, tuant le général. Les autorités ont également confirmé la mort d’un second officier. Les attaques sont survenues en marge de rassemblements islamistes dans la capitale, appelant à renverser le gouvernement et à proclamer l’identité religieuse du pays.
Dans le quartier de Matariya, à l’est du Caire, la manifestation aurait fait trois morts — des décès qui n’ont pu être confirmés. En milieu d’après-midi, le centre-ville était redevenu calme, malgré un climat tendu et une forte présence militaire. Le gros des manifestations s’est limité aux quartiers périphériques du la ville.
Dans la ville portuaire d’Alexandrie, des milliers de manifestants —surtout des femmes— ont défilé dans les rues, faisant le signe « Rabia » [les 4 doigts de la main droite avec le pouce reposant sur la paume], le symbole du massacre d’environ 800 Frères musulmans qui manifestaient contre le coup d’État et l’éviction du président Mohamed Morsi, au square Rabaa Al-Adawiya, en août 2013. Certains auraient scandé, « Sissi, tu es le chien de Mubarak. Tu seras exécuté, » en référence à Abdel Fattah al-Sissi, président actuel de l’Égypte et ancien général responsable du coup d’état militaire du 3 juillet 2013.
Des manifestants prennent les rues d’Alexandrie. Video via YouTube/Alexandria Revolution.
Les groupes salafistes ont appelé à « une révolution de la jeunesse musulmane, » et ont encouragé les manifestants à brandir le Coran.
La coalition islamiste anti-coup a encouragé les Égyptiens à participer à « une semaine de manifestations révolutionnaires » dans un communiqué, mais a demandé à ses partisans de ne pas affronter les forces de sécurité.
Samedi, le verdict de la révision du procès de l’ancien chef militaire Hosni Moubarak est attendu. Il est jugé pour des faits liés au meurtre de plus de 900 manifestants dans le soulèvement de 2011 contre son régime.
Des quartiers entiers du centre-ville étaient complètement verrouillés par les militaires. Dans le quartier d’ Aguza, des soldats dans un tank brun suivaient un convoi de jeeps, de sirènes hurlantes, et une patrouille le long de la corniche du Nil. Au-dessus, un hélicoptère militaire faisait un bruit sourd.
Place Tahrir, le point de départ de la révolution de 2011 qui a fait tomber le dictateur Moubarak, des douzaines de manifestants anti-islamistes ont agité des drapeaux égyptiens et brandi des portraits du président Abdelfattah el-Sisi. Des barbelés fermaient toutes les entrées de la place. Un homme habillé en civil, une mitraillette sur la poitrine, a conduit un groupe de jeunes hommes vers une rue latérale.
« C’est un festival ! » a dit un homme qui portait des lunettes et une veste en cuir, souriant, tandis qu’il se dirigeait vers la foule. Un autre homme, assis sur une barrière en métal qui entoure la place marmonna « Les frères vont les tuer. »
Quelques instants plus tard, un convoi de véhicules des forces de sécurité centrales, la police antiémeute égyptienne a traversé la place.
Les manifestations sont plus centrées sur la religion que par le passé. Les précédentes manifestations appelaient au retour de Mohamed Morsi, l’ancien président islamiste élu démocratiquement et qui a été renversé par les militaires en juin 2013.
Néanmoins, Maha Azzam, chef de la coalition de l’opposition, le Conseil révolutionnaire égyptien a dit à VICE News que d’autres manifestants antigouvernementaux pourraient aussi prendre part à la manifestation. « Elle a été organisée par une partie particulière de l’opposition, salafiste et très religieuse, mais cela ne veut pas dire que c’est la seule partie de l’opposition. L’appel à la jeunesse musulmane à sortir dans les rues fait partie du mouvement plus global de manifestations qui ont déjà eu lieu… donc cela ne signifie pas que d’autres groupes ne se joindront pas aux manifestations. »
Des troupes ont été déployées à travers le pays avant les manifestations et le ministre de l’Intérieur avait prévenu que les dissidents seraient attendus avec « la force létale ».
Azzam affirme que les forces de sécurité pourraient utiliser les manifestations comme une excuse pour frapper fort sur l’opposition et montrer clairement que toute forme de révolte ne saurait être tolérée. « La situation est très précaire et le régime a peur pour sa propre sécurité. Il emploiera tous les moyens possibles pour arrêter les manifestations » dit-elle. « Cette présence importante des forces de l’ordre est révélatrice… Elle illustre moins la force de l’opposition que la faiblesse du régime. »
Elle pense que d’autres appels à manifester suivront. Depuis que Morsi a été renversé, les forces de sécurité répriment les partisans du président déchu et les frères musulmans durement, tuant et arrêtant des centaines de personnes.
La primature égyptienne a approuvé mercredi une nouvelle loi antiterrorisme qui comprend une définition très large des « entités terroristes », qui concerne quiconque bloque des bâtiments publics ou privés ou perturbe le travail des autorités. Les peines appliquées pour les actes terroristes avaient déjà été augmentées en avril lors d’un amendement du Code pénal. En février les frères musulmans avaient été déclarés organisation terroriste.
Un tribunal pour mineurs d’Alexandrie a condamné mercredi 78 enfants âgés de 13 à 17 ans à des peines allant de deux à cinq ans de prison. D’après les médias locaux, ces enfants ont été condamnés pour avoir été membres des Frères musulmans et avoir participé à des manifestations non autorisées. Les détenus se sont plaints de nombreux abus durant leur emprisonnement.
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