Drogue

Il y aurait 20 fois moins de points de vente de cannabis au Québec que de SAQ

Québec va dévoiler demain la manière dont il compte mettre en marché le pot, au sein de la Société québécoise du cannabis.

La vente de cannabis serait chapeautée par la SAQ, mais dans des succursales distinctes de son actuel réseau, selon ce que rapporte Radio-Canada. Combien de succursales? Seulement une vingtaine.

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Les Québécois pourraient également se procurer du cannabis en ligne sur le site de la future filiale de la SAQ, et ce sera au moment de la livraison, assurée par Postes Canada, que l’âge du destinataire du colis sera vérifié.

Une succursale par tranche de 300 000 Québécois

Qu’il y ait une vingtaine de succursales a de quoi faire sourciller. Si on présume que l’âge légal sera fixé à 18 ans, comme pour l’alcool, ça ferait une succursale par tranche de 339 000 citoyens majeurs.

C’est de cette manière qu’on compte enrayer le marché noir?

S’il se dit rassuré de voir qu’il y aura de la vente par la poste, le professeur spécialiste en toxicomanie, Jean-Sébastien Fallu, a tout de même des doutes sur l’effet que pourrait avoir une vingtaine de boutiques. « C’est trop peu pour le Québec, ça, c’est clair, martèle-t-il. Je comprends qu’on veuille limiter l’accès, mais si on le limite trop, ça va effectivement favoriser le marché noir et ses conséquences négatives. »

Parmi ces conséquences : l’absence du contrôle de qualité, l’ignorance du taux de THC ou de CBD des produits, la fréquentation de personnes peu recommandables, l’exposition à d’autres substances. M. Fallu ajoute que le marché noir entraîne une certaine insécurité et de la violence pour le contrôle des territoires.

Il déplore également le fait que Québec envisagerait la tolérance zéro au volant pour le cannabis, l’arrimage à la politique du tabac et l’interdiction de l’autoproduction de weed. « Depuis le début, tous les spécialistes, on dit qu’il faut un juste milieu. Mais, actuellement, on n’est pas dans le juste milieu, on est du côté du trop contraignant, ce qui va maintenir les problèmes. »

Justin Trudeau a souvent répété que la légalisation permettrait d’éradiquer le marché noir du cannabis. Sa preuve : il n’y a pas de marché noir de l’alcool.

Certes, mais l’alcool est plus complexe à produire… et il est surtout plus accessible. La SAQ compte 400 succursales dans la province et un total de 840 points de vente. C’est sans compter toutes les épiceries et dépanneurs où il est possible d’acheter de l’alcool, les centaines de bars et de restaurants qui en servent, et les gens qui en produisent pour leur consommation personnelle.

Il y aura certainement une demande pour le produit. Quelqu’un se rappelle des files immenses qu’avait provoquées l’ouverture de six dispensaires illégaux par Cannabis Culture seulement à Montréal l’automne dernier? À ce rythme, l’ouverture de cette vingtaine de succursales à la grandeur du Québec a toutes les chances de ressembler au bureau de renouvellement de la carte OPUS étudiante de Berri-UQAM en période de rentrée scolaire.

Ce qu’il reste à savoir

Rien n’est annoncé encore, on en est encore à l’étape de la spéculation.

Qui sait, peut-être que cette vingtaine de succursales ne serait qu’une première vague de boutiques? Québec disait souhaiter arrimer sa législation à celle de l’Ontario; or, chez nos voisins à l’ouest, la LCBO (la SAQ locale) prévoit d’abord ouvrir 40 boutiques l’été prochain et 80 autres l’année suivante.

C’est ce que nous pourrons peut-être confirmer demain, lors du dépôt du projet de loi québécois. Seraient alors confirmés l’âge légal et les lieux de consommation du cannabis, entre autres.

Dans une conférence de presse mercredi matin, la ministre responsable de la Santé publique, Lucie Charlebois, et le ministre des Finances, Carlos Leitao, ont rappelé que le projet de loi évoluerait au fil du temps.

Québec a aussi demandé à Ottawa un an de plus avant de légaliser le cannabis, en insistant sur le fait que la question du financement n’était pas réglée entre le fédéral et le provincial.

Jean Sébastien Fallu s’oppose à cette demande. « Je pense que ça presse, même si on sera pas tout à fait prêts. Les gens qui sont criminalisés pour ça, ça doit cesser. »

Justine de l’Église est sur Twitter.