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Mali

Qui sont les deux chefs djihadistes que l’armée française a tué au Mali ?

Les forces spéciales françaises ont annoncé avoir éliminé Abdelkrim Al-Targui et Ibrahim Ag Inawalen dans la nuit du 17 au 18 mai, deux chefs djihadistes présents au Mali et membres respectivement d’AQMI et d’Ansar Dine.
Pierre Longeray
Paris, FR
Image via Ministère de la Défense

Le ministère de la Défense français a annoncé, ce mercredi en fin de journée, que les forces spéciales françaises ont abattu quatre terroristes dans le Nord du Mali. L'opération a eu lieu dans la nuit du 17 au 18 mai. Parmi les cibles abattues, on compte Hamada Ag Hama d'AQMI (Al Qaida au Maghreb Islamique) et Ibrahim Ag Inawalen d'Ansar Dine (groupe djihadiste touareg basé à Kidal, au Mali). Selon les informations de la radio RFI, les deux chefs terroristes auraient été tués avec leurs gardes du corps respectifs.

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Hamada Ag Hama, dit Abdelkrim Al-Targui ou Abdelkrim le Touareg, est suspecté d'être le responsable de l'assassinat de deux journalistes de la radio RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon (en 2013), et d'être lié aux enlèvements de trois autres ressortissants français : Serge Lazarevic (libéré en décembre dernier), Philippe Verdon (exécuté en 2013) et Michel Germaneau (tué en juillet 2010).

À lire : Libération de l'otage Serge Lazarevic

Ibrahim Ag Inawalen, connu sous le surnom de « Bana, » est un ancien officier de l'armée du Mali qui a déserté en 2006. C'est un proche du leader d'Ansar Dine, Iyad Ag Ghali. Il était aussi chargé de la liaison avec AQMI. Il serait aussi le chef de la police religieuse d'Ansar Dine, selon les informations d'Europe 1.

D'après le Quai d'Orsay, Al-Targui et « Bana » faisaient partie des principaux chefs de groupe qui avait pris le contrôle du nord du Mali au cours de l'année 2012, avant que les forces françaises ne viennent chasser les rebelles de la zone. Ceux-ci menaçaient de s'étendre jusqu'au sud du pays où se trouve la capitale malienne, Bamako.

Les forces spéciales françaises le 6 avril 2015, se posent avec un otage néerlandais, tout juste libéré dans le nord-Est du Mali. (Image via Ministère de la Défense)

L'armée française est présente au Mali depuis janvier 2013, et le début de l'opération Serval — qui avait pour but de déloger les groupes djihadistes. Serval a depuis été remplacée, en août 2014, par un dispositif antiterroriste étendu, baptisé Barkhane, qui couvre une partie de la région du Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina-Faso).

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Le communiqué du ministère de la Défense, publié ce mercredi, rappelle le précédent coup porté aux djihadistes de la région avec l'élimination d'Ahmed El Tilemsi en décembre dernier. El Tilemsi était un des hauts responsables du MUJAO (Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest) et avait été éliminé dans la région de Gao (nord du Mali). La première neutralisation française d'un chef djihadiste au Mali remonte à mars 2013 et la mort d'Abou Zeid, le chef d'AQMI au Mali de l'époque.

Al-Targui, le spécialiste des prises d'otages sanglantes dans la région

Cette fois, avec la mort d'Al-Targui, un des plus vieux leaders d'AQMI, il semblerait que les troupes françaises aient à nouveau frappé fort. Un officiel malien de la région de Kidal a confié au New-York Times qu'Al-Targui était « un gros poisson ». L'officiel révèle qu'Al-Targui était « à la fondation de tout ce qui se décidait. […] C'était toujours lui qui était présent, dans l'ombre. C'est un coup dur porté au groupe [AQMI]. Ils en payent le prix fort. »

Les groupes terroristes présents dans le nord du Mali se sont spécialisés dans l'enlèvement de ressortissants européens et principalement français, ce qui leur permet de financer l'achat d'armes et de faire fonctionner leurs organisations. Al-Targui semblait en avoir fait sa spécialité et faisait du kidnapping un véritable business.

Seuls les États-Unis et le Royaume-Uni refusent catégoriquement de payer des rançons. Les pays européens, la France notamment, sont connus pour payer (bien que la France s'en défende totalement) — ce qui explique le choix des terroristes, et notamment d'Al-Targui, de cibler des ressortissants Français.

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Des prises d'otages de Français aux issues heureuses comme tragiques

Serge Lazarevic a été enlevé dans sa chambre d'hôtel au Mali, à la fin de l'année 2011. Il va être l'otage revendiqué du groupe d'Al-Targui, pendant 3 ans, pour finalement être libéré le 9 décembre 2014. Si la France a toujours nié avoir payé une rançon pour sa libération, l'ex-otage pense avoir été libéré grâce à de « l'argent. » Selon RFI, Al-Targui est très probablement impliqué dans la libération des quatre otages français d'Arlit, au Niger, en octobre 2013. Les 4 employés d'Areva auraient été libérés contre une rançon de 20 millions d'euros.

Michel Germaneau avait été kidnappé au Niger en 2010 pour être éliminé après seulement trois mois de captivité. L'ancien chef d'AQMI au Mali, Abou Zeid avait commandité cet enlèvement, mais Al-Targui aurait été chargé de la surveillance du Français de 78 ans, et aurait sans doute été celui chargé de le tuer, selon les négociateurs en charge de Germaneau.

Philippe Verdon avait été enlevé en même temps que Serge Lazarevic. Les deux Français ont été compagnons de cellule. Verdon aurait été tué en juillet 2013 par les hommes d'Al-Targui alors qu'il essayait de signaler sa présence à un avion français, qui survolait la zone, grâce à un miroir reflétant les rayons du soleil, selon le New-York Times.

Les journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, ont été tués le 2 novembre 2013, à Kidal au Mali, quelques heures après leur enlèvement par des hommes d'Al-Targui. Selon l'enquête menée par le parquet de Paris, ils auraient été abattus par leurs ravisseurs, alors que le pick-up utilisé pour leur rapt serait tombé en panne. Les otages ont soit essayé de fuir, ou les ravisseurs n'ont pas voulu s'encombrer des deux otages français, selon le procureur François Mollins. Quelques jours après la mort de Dupont et Verlon, Al-Targui contactait l'agence de presse Sahara Médias et pour revendiquer l'assassinat des deux Français au nom d'AQMI.

À lire : Comment les forces spéciales françaises ont libéré un otage néerlandais au Mali

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