Environnement

Si le climat vous déprime, la religion est là pour vous aider

Les personnes souffrant de désespoir climatique se tournent vers les chefs spirituels pour avoir des conseils et des réponses.
un prédicateur debout dans une église remplie d'eau
Illustration : Lia Kantrowitz

Le révérend Jim Antal parcourt les États-Unis pour prononcer des sermons sur le réchauffement climatique. Partout où il va, il rencontre des gens qui ont peur de l'avenir. « Si vous allez en Californie, vous rencontrerez des gens qui connaissent quelqu'un qui a été tué ou qui a survécu à l'un des incendies, dit-il. C'est le cas dans tout le pays, qu'il s'agisse d'inondations, d'incendies ou d'autres formes de phénomènes météorologiques extrêmes. »

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Lorsque ces craintes surgissent, Antal, qui fait office de conseiller en matière de justice climatique et ministre de la conférence à l'Église unie du Christ, encourage les gens à passer à l’action. « Souvent, les gens ont de l’espoir et de l'optimisme, dit-il. Mais quand ils voient un gros titre déprimant, cet optimisme disparaît, tout comme leur espoir. »

Après des années de déni face au changement climatique, de plus en plus d'Américains y voient maintenant l'enjeu majeur de notre époque. La dernière édition du Climate Change in the American Mind, un sondage réalisé par les universités Yale et George Mason, a révélé que 69 % des Américains étaient au moins « quelque peu préoccupés » par le changement climatique et que 72 % estimaient que le problème était « personnellement important » pour eux – les scores les plus élevés enregistrés au cours des onze années d’existence de l'étude.

« Au cours des quinze dernières années, nous avons développé une technologie nous permettant de nous affranchir des combustibles fossiles »

Mais avec la prise de conscience vient le désespoir. Le changement climatique risque d'aggraver les incendies de forêt et d'accroître la fréquence des sécheresses ; les zones côtières sont menacées par des tempêtes plus destructrices, le temps violent affectant de manière disproportionnée les populations déjà pauvres ; et à mesure que le monde se réchauffe, des maladies peuvent se propager. Le fait de reconnaître ces conséquences nous donne l’impression que nous n’avons plus le choix et que nous devons agir sérieusement. Nous savons qu'au fond de nous, échanger du plastique contre du papier ne suffira pas. Pour les nombreux Américains croyants qui d’ordinaire pensent qu'une puissance supérieure interviendra, la menace du changement climatique peut devenir paralysante.

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Certains groupes religieux, en particulier les évangélistes américains, sont devenus le symbole de la résistance à la science du climat. Une étude Pew de 2015 a révélé que seulement 28 % des évangéliques croient que la Terre se réchauffe en raison de l'activité humaine, et seulement 24 % considèrent cela comme un problème grave. Mais à mesure que les préoccupations concernant l'évolution du monde grandissent, de plus en plus de leaders religieux s’intéressent au changement climatique. Ils deviennent des activistes du climat et, dans certains cas, apaisent l'inquiétude des fidèles.

Antal qualifie la politique climatique de la Représentante des États-Unis Alexandria Ocasio-Cortez, dont il se réjouit, de « deuxième Green New Deal ». Il dit que Dieu nous a donné le premier, en abondance, sous forme d'énergie provenant du soleil, du vent et de l'eau. Selon lui, les humains possèdent déjà les outils nécessaires pour réparer les dommages causés à notre planète. « Au cours des quinze dernières années, nous avons développé une technologie nous permettant de nous affranchir des combustibles fossiles, dit-il, une pointe d’exaspération dans sa voix. Et ce qui nous a empêchés d'adopter cette technologie sans combustible fossile, c’est la campagne de lobbying de l'industrie des combustibles fossiles. »

Mais les responsables des congrégations n'ont pas seulement à s'inquiéter du défi politique de l'inaction climatique : ils doivent faire face aux craintes individuelles quant à l'avenir. « Personne n’est venu dans mon bureau pour me dire : "Rabbin, cela me préoccupe", mais dans beaucoup de conversations informelles, des gens m’ont avoué leur désespoir, leur désolation, leur sentiment d'être bloqués quant à ce qu’il faudrait faire à ce sujet », déclare le rabbin Ruhi Sophia Motzkin Rubenstein, du temple Beth Israel à Eugene, dans l’Oregon.

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Motzkin Rubenstein essaie de relier les principes fondamentaux du judaïsme et de la foi à la question du climat. Protéger la terre n'est pas un programme de récompenses – des mesures comme le recyclage et la prise des transports en commun n'empêcheront pas le destin tragique qui nous attend, mais nous devrions le faire quand même. « Je trouve, personnellement, que ce langage de l'obligation est vraiment très fort et très encourageant en ce moment, dit le rabbin. Nous n'agissons pas parce que nous sommes sûrs de pouvoir sauver X espèces particulières. Nous agissons parce que nous avons l'obligation d'essayer ; nous agissons parce que nous sommes obligés de prendre toutes les mesures que nous pouvons. »

Lee Plenty Wolf, chef spirituel des Lakotas, une tribu autochtone américaine du groupe ethnique sioux, donne des conseils similaires. Il vit à Denver mais voyage régulièrement. Il dit aux membres de sa communauté qu’ils doivent faire tout ce qu’ils peuvent, qu'il s'agisse d'attirer l'attention du gouvernement local ou de participer à des actions quotidiennes qui permettront d'économiser l'eau et l'énergie, comme prendre le bus plutôt que la voiture ou prendre des douches plus courtes. Le plus important, selon lui, c'est de faire quelque chose – l'inaction est une condamnation à mort. « Je pense que les gens du monde entier ont réalisé que le changement climatique affecte tout le monde, que nous devons éduquer le plus grand nombre possible de personnes, que nous devons penser à l'avenir de nos enfants et petits-enfants, et au-delà, dit-il. Les problèmes du changement climatique sont réels pour nous tous et nous avons besoin de changements maintenant. »

« Je parle souvent de la définition de la foi, dit Motzkin Rubenstein. Et la foi, ce n'est pas croire que si vous faites la bonne chose, le résultat que vous espérez arrivera. La foi est l'espace entre le déni et le désespoir. La foi est l'espace où l'on peut regarder d'un œil réaliste une situation et dire : "Oui, c'est en train de se produire, c'est terrible, et nous ne savons même pas quelles en seront les conséquences", et pourtant, nous comprenons que nous sommes appelés à faire quelque chose, même si nous nous sentons désespérés, même si nos efforts ne peuvent faire aucun bien. »

Opheli Garcia Lawler est sur Twitter.

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