Je lisais cet article sur Adam Vourvoulis l’autre jour. Vourvoulis est connu comme bro sommelier qui s’amuse à troller le monde du vin californien. Il disait, comme à son habitude, des trucs douteux, du genre : « Je préfère le Wallaroo Trail à un Domaine de la Romanée-Conti 1981. »
Mais il a aussi évoqué un phénomène qui m’était tout à fait étranger jusque-là : le vin en canette. Quelqu’un a visiblement pensé que ce serait une bonne idée de prendre le nectar des dieux et d’en faire une commodité aussi vulgaire qu’un Fanta à l’orange. Pourquoi, qui, où, comment? J’ai tellement de questions et si peu de réponses…
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J’imagine que c’était un peu inévitable. C’est une suite logique pour une génération qui s’est nourrie à l’information rapide et aux doubles Big Macs, le tout rincé avec du Mountain Dew X-Treme. Une bouteille de vin en verre, avec un bouchon de liège, ça ne passe pas. Une canette, c’est beaucoup plus pratique et amusant. Ça fait de bons Snaps, de boire du Merlot en canette avec une paille, t’sais… C’est certain que d’un côté, il y a une volonté de démocratisation du vin derrière tout ça, ce qui est louable en soi. C’est dans l’exécution que le bât blesse. Il n’y a même pas la prétention de vouloir vendre un produit de qualité. C’est un produit de consommation rapide, et on le vend exactement pour ce que c’est : du fucking vin en canne. Mais est-ce qu’il y a vraiment une bonne raison de mettre du vin en canne?
Outre l’utilité, le seul vrai argument pour le vin en canette, c’est l’aspect écologique. D’abord, parce que l’aluminium se recycle beaucoup plus facilement que le verre. Une canette en aluminium contient en moyenne 40 % de matières recyclées, alors qu’une bouteille en verre en contient environ 20 %. La canette réduit aussi notre empreinte de carbone : vu que l’aluminium pèse moins, il faut consommer moins d’énergie pour le transporter. Par contre, pour le fabriquer, il faut de la bauxite et une myriade d’autres minéraux qui nécessitent des extractions qui, elles, causent des dommages irréparables à la Terre, souvent dans des pays défavorisés. Pour faire du verre, il faut essentiellement du sable et de la chaux.
C’est un peu compliqué à condenser, mais il y a de très bonnes raisons pour lesquelles on utilise du verre pour le vin. Au début, la bouteille en verre ne servait qu’à permettre aux restaurants de transporter le vin du baril au sous-sol jusqu’à la table dans la salle à manger, mais sa fonction a évolué. Une bouteille en verre clair permet d’en voir la quantité et d’observer la couleur du vin blanc. On va préférer un verre coloré pour les vins rouges, parce qu’il bloque mieux la chaleur de la lumière, qui pourrait potentiellement gâter le vin. Quand on a développé le format actuel de 750 millilitres, on a quantifié les portions (six verres par bouteille). La canette répond plus ou moins bien à cela, en offrant deux portions par unité.
La canette est donc plus ou moins pratique et écolo. Mais est-ce que ça goûte bon, du vin en canette?
La réponse courte : non. La réponse longue : non, vraiment pas, mais ce n’est peut-être pas la faute à la canette.
Avec mon collègue Nick Rose, j’ai décidé de faire un test. Nous nous sommes acheté du Big House Cardinal Zin, le seul vin en canette plus ou moins facilement trouvable à la SAQ, dans trois formats différents : en canette de 250 millilitres, en bouteille à capsule de 750 millilitres et en vinier de 3 litres.
Au nom de la science et du journalisme, on a décidé de faire une dégustation à l’aveugle, pour voir si on pouvait faire la différence entre le même vin dans différents contenants. Ma première préoccupation était que le vin ne serait pas assez mature. Je ne sais pas si un vin contenu dans de l’aluminium a la possibilité de continuer à vieillir et à se bonifier comme le fait un vin en bouteille. C’était dur à déterminer, vu que le produit lui-même laisse à désirer. Je suis bien sûr biaisé : je ne suis pas un très grand fan de vins californiens et encore moins du zinfandel parmi les cépages. Mais au-delà de ça, je dois dire que j’ai préféré le goût de la canette, probablement parce qu’il était moins expressif et ne me permettait pas de discerner les arômes qui d’habitude me gênent dans un zin californien ordinaire.
Ce n’est pas très concluant comme test. Des experts s’entendent pour dire que si l’initiative du vin en canette est louable, les vins mis en canette pour l’instant sont de piètre qualité. Mais avec de plus en plus de vins de soif sans prétention de qualité font leur entrée dans le marché, peut-être qu’un jour on arrivera à un résultat décent. Pour l’instant, par contre, je vous conseille d’éviter les vins en canette. À part pour vous faire des sangrias cheap à la plage cet été, je n’y vois pas encore d’utilité.