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Jean-Pierre Adams, ancien stoppeur de l’équipe de France dans le coma depuis 34 ans

Au milieu des années 1980, il n’était pas rare d’entendre le duo Thierry Roland et Jean-Michel Larqué prononcer cette petite phrase : « Une pensée pour Jean-Pierre Adams qui est dans le coma ». Et puis au fur et à mesure, le temps aidant, de moins en moins de personnes ont eu une pensée pour Jean-Pierre. Aujourd’hui cela fait 34 ans que le natif de Dakar n’a pas ouvert les yeux.

Né en 1948 à Dakar, celui qui a été élevé par sa grand-mère est arrivé en France à l’âge de 8 ans, à la faveur d’un pèlerinage de Mémé, comme il l’appelait, à Montargis. Sa grand-mère est repartie, mais pas Jean-Pierre. Il entre dans une école religieuse dans un univers et un pays totalement inconnus. C’est l’amour de ses parents adoptifs et celui du football qui ont permis au petit Jean-Pierre d’échapper à la rue et à l’Assistance Publique. Une famille adoptive qu’il a toujours considérée comme sa vraie famille et à qui il n’a jamais manqué de rendre visite tout au long de sa vie.

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Dans le football comme dans la vie, tout a commencé à Montargis. Vite repéré pour ses qualités techniques et physiques, il rejoint rapidement l’équipe première qui évolue alors en Promotion d’honneur. Le tournant se fait lors de son service militaire ou Adams rencontre Beudot, joueur à l’Entente Fontainebleau qui convainc ses patrons d’engager son pote. Déjà le sort va s’abattre sur le jeune joueur puisqu’au retour d’un déplacement à Châteauroux, un accident de voiture enlève la vie de Beudot et laisse Adams miraculeusement en vie. Mais détruit moralement. Toujours joueur de Fontainebleau, Jean-Pierre Adams est un joueur sans éclats qui traine cette blessure morale et son mal-être. Un joueur déprimé qui arrive quand même en finale du championnat de France amateur en 1968, retransmis à la télévision. Un match devant lequel s’est installé Kader Firoud, alors ex-entraineur de Nîmes. « J’avais découvert Adams sur mon petit écran de télévision lors d’une finale du championnat de France amateur. Jean-Pierre, ce jour-là, occupait un poste d’avant-centre qui n’était pas tellement dans ses cordes, mais il m’avait impressionné par ses moyens physiques et son allant ». Une découverte dont Kader Firoud se souvient lorsqu’il revient aux affaires des « Crocos » en 1969.

Des débuts avec l’équipe réserve, une présence vite indispensable en équipe première et une première sélection en équipe de France en 1972, face à une sélection continentale : l’Afrique. Passé à l’OGC Nice en 1973, il réalise sa saison la plus prolifique avec 9 buts marqués mais se mue au fur et à mesure en stoppeur sous l’impulsion du coach Markovic. Pari gagnant, il devient rapidement l’un des meilleurs stoppeurs au monde et forme avec Marius Trésor en équipe de France ce que l’on appelle « la Garde Noire ». Une place en équipe de France qu’il perd lorsque Michel Hidalgo arrive à la tête de la sélection.

Marius Trésor et Jean-Pierre Adams.

En club, Jean-Pierre Adams s’offre un nouveau défi en signant dans le nouveau club de la capitale : le Paris Saint-Germain, en 1977. Le club connait alors de gros problèmes, sur le terrain et en dehors (avec notamment le scandale de la double billetterie) et Jean-Pierre Adams, qui a déjà la trentaine, sait que ce pari est le dernier. Une dernière pige en D2 à Mulhouse et c’est le retour au monde amateur pour Adams qui signe à Chalon-sur-Saône pour garder un pied dans ce qui a toujours été sa grande passion. Marié, 2 enfants, Jean-Pierre ouvre un magasin de sports et s’apprête à vivre sereinement sa vie de retraité du foot. Sauf qu’une banale rupture de tendon l’envoie à l’hôpital pour une opération comme il s’en fait des centaines en France.

Nous sommes le 17 mars 1982 et Jean-Pierre Adams s’adresse à sa femme : « Tout va bien, je suis en pleine forme. C’est à 11 heures que je vais être opéré. Pense à moi quand même, mais viens me chercher dans huit jours, et n’oublie pas alors, une paire de béquilles ! » Ce sont ses derniers mots. Jean-Pierre Adams ne s’est toujours pas réveillé. Un seul anesthésiste présent sur place au lieu de deux, un stagiaire qui se mélange dans les doses, et c’est une vie qui se termine. Enfin pas vraiment puisqu’aujourd’hui Jean-Pierre Adams a 68 ans, toujours dans le coma et toujours visité quotidiennement par sa femme Bernadette. Depuis 34 ans.