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Maltraitance dans les centres pour enfants handicapés français

Céline Boussié, ancienne aide médico-psychologique et lanceuse d'alertes, dénonce les abus dont elle a été témoin.

Comme Edward Snowden, Hervé Falciani et de nombreux autres, Céline Boussié est une lanceuse d'alertes. Si elle n'a pas dévoilé l'existence de programmes de surveillance de masse ni les noms d'évadés fiscaux, ses révélations sont tout autant dramatiques.

En 2008, alors qu'elle vient de se faire embaucher en tant que aide médico-psychologique dans un établissement privé pour enfants handicapés du Gers (Midi-Pyrénées), elle est témoin d'abus : « J'ai pu voir des manques de soins, des camisoles chimiques, des enfants attachés, enfermés et bourrés de médicaments dans des boxs minuscules sans eau et sans toilette toute une nuit », explique-t-elle.

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Si elle a aussitôt tenté d'alerter l'organisme de formation où elle suivait ses cours, elle a fait face à une grande indifférence, avant d'être « mise à l'écart » dans son équipe.

« Pendant ces 7 longues années de calvaire où j'ai tout vécu, il était très compliqué pour moi de dénoncer ces méfaits étant donné je n'avais pas de véritable preuve, explique-t-elle. Or cela est essentiel pour être crédible et entendue. J'ai donc préféré mener la résistance au sein même de l'établissement. »

Elle finit par « craquer » en 2013, quitte son poste et dénonce publiquement ces méfaits. Si elle a depuis tenté d'entrer en contact avec François Hollande, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, et les autres ministres concernés, là aussi, elle fait face à un « silence total ». Avant elle, dans les années 90, trois membres du personnel avaient pourtant déjà alerté sur les conditions déplorables du centre. Peu après, tous ont été condamnés pour diffamation.

« Si Céline a été victime d'insultes sur les réseaux sociaux pour ses déclarations, nous avons été directement menacés de lynchage », explique Bernadette Bongage, l'une de ces lanceuses d'alertes de l'époque qui a ensuite été licenciée.

« Les lanceurs d'alertes du secteur médico-social ne bénéficient d'aucune protection. C'est un grave problème », affirme Céline. Après de nombreuses menaces et de déménagements forcés, elle est placée sous protection policière l'été dernier, « trop tard » selon elle. Dans le même temps, elle crée « Hand'ignez vous », une association dont le but est de dénoncer les situations de maltraitance et d'inciter ceux qui en ont été témoins à déposer plainte, et lance une pétition.

Selon Bernadette, ce centre du Gers n'est pas le seul à avoir connu des cas de maltraitance. En janvier dernier, M6 consacrait d'ailleurs un épisode de Zone Interdite à ces établissements.

« Aujourd'hui, je ne souhaite à personne et à aucun parent d'avoir affaire à l'un de ces centres », explique Céline.

Jointe par téléphone, Aurélie Doazan, directrice de l'établissement depuis 2012, explique aujourd'hui être « fatiguée » par cette affaire et « souhaiter se concentrer sur l'avenir et non le passé ». « L'agence régionale de santé (ARS) a pointé un problème de locaux mais en aucun cas des maltraitances », affirme-t-elle.

Pourtant, selon Céline Boussié, jointe alors qu'elle sortait d'une réunion avec l'ARS, un blâme pour « châtiments corporels » ayant eu lieu ces derniers mois a récemment été prononcé. « Nous sommes très inquiets pour l'avenir de ces enfants », conclut-elle.