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N'importe quoi

Les oracles ont un plan de vie fabuleux pour moi

Ce que j'ai appris sur mon avenir au Salon Entre 2 Mondes.
Toutes les photos : Benoit Palop

Tu vas me prendre pour un weirdo ou un con, et tu as probablement raison, mais avoue que tu ne connais pas grand monde qui sacrifierait son dimanche pour aller zoner au Salon Entre 2 Mondes. Pendant que tu subissais ta misérable brosse hebdomadaire du samedi soir, je suis allé écouter parler ésotérisme, médecine marginale, élixirs, runes et magie blanche. Il était absolument inconcevable que je rate cette vitrine de l'étrange.

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La question était de savoir lequel de mes amis allait être assez open et vaillant pour bien vouloir me suivre. Finalement, ce fut un peu trop facile de convaincre ma BFF, surtout quand je lui ai pitché les highlights : une poignée de mots-clés magiques du genre paranormal, fée, musique vibratoire de l'âme, OVNI, petits-gris, pierres et cristaux chamaniques, mantras et chants sacrés méditatifs. Puis après tout, Élodie m'avait déjà suivi dans un de ces soupers ufologiques qui ont lieu, « secrètement », tous les premiers vendredis du mois à l'étage d'un shish-taouk dans Montréal-Nord.

Après un long trajet de bus matinal, direction le centre Roussin à Pointe-aux-Trembles où nous sommes accueillis par deux jeunes sympatoches qui tiennent la caisse à l'entrée. Ils n'ont rien à voir avec les personnes qu'on va croiser deux minutes plus tard à l'intérieur et je mettrais ma main à couper que l'un comme l'autre ne connaissait pas la différence entre l'améthyste et le lapis-lazuli.

Après un premier tour des kiosques, tous plus loufoques les uns que les autres, nous nous lançons dans la première conférence. Direction une salle de cours au premier étage de l'édifice. «Qui es-tu, Benoit? Qu'es-tu venu chercher? As-tu trouvé ton chemin dans la vie?», me demande Guylaine, massothérapeute arc-en-ciel, quelques minutes à peine après m'être posé autour d'une poignée de femmes quinquagénaires perdues, de jeunes mi-punk mi-émo dépressifs et de gens whatever venus chercher un sens à leur vie. Elle explique ensuite comment elle accompagne ses «patients» dans leur cheminement vers l'amour total, l'empathie et l'acceptation de soi grâce au toucher thérapeutique, une méthode de guérison alternative sans contact physique fondée sur les auras et les flux énergétiques qui entourent le corps.

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Je reste sceptique quant à l'approche de Guylaine et ses collègues du congrès, mais je suis le seul. Les autres congressistes n'hésitent pas à se rattacher à des croyances non fondées et font confiance aveuglément à de telles pratiques marginales. C'est là où ce salon prend tout son sens.

Élodie et moi nous échappons un moment sur les heures du midi. Un hot chicken dans un diner à l'hygiène douteuse fera bien notre affaire. De retour au salon, la sieste post-lunch frappe à grands coups de massue, mais les conférences nous tiendront éveillés — surtout qu'on commence l'après-midi avec une présentation offerte par l'E.P.P.I. (Enquêtes sur les phénomènes paranormaux inexpliqués).

Habillés tout en noir et un peu pâlichons pour certains, les membres de cette équipe de passionnés - qui n'a rien à envier à celle de Peter, Raymond, Egon et Winston - déballent certains détails de leur processus d'enquête et nous tiennent en haleine avec des histoires «extraordinaires» d'entités malveillantes et de lieux hantés. D'ailleurs, à leurs dires, le centre Roussin serait hanté par une fillette retrouvée morte ici même dans les années 1930.

On rencontre ensuite Bradfield, un pseudo Legolas en moins beau, idole des « madames » de 60 ans et plus. À la fois ménestrel 2.0 et guide spirituel, le visionnaire nous introduit aux différentes lois du karma, ces douze préceptes de vie qui sont censés faire de nous des créatures divines meilleures et nous aider à rejoindre Gaïa, la terre mère des anciens. Tel un maître bienveillant, Bradfield fait un tour de «classe» pour prendre connaissance de nos aspirations dans la vie et nous offrir sa bénédiction — ou pas — avant d'essayer de nous refourguer un de ses disques folk-spirituo-celtique et nous vanter les bienfaits de ses ateliers. Son travail de persuasion n'a pas grand effet sur moi, mais je ne lui en tiens pas rigueur.

Enfin, pour conclure cette journée, je me fais lire l'avenir par Zéphyr, géomancienne ou plutôt lithovisionnaire, un terme qu'elle trouve plus approprié à sa pratique. Elle me prédit une existence trépidante en déplaçant des pierres «brillantes» sur un tapis feutré pendant près de 30 minutes. «Ça paraît que les oracles ont un plan de vie fabuleux pour toi», me dit-elle avant de marmonner des choses dans un dialecte incompréhensible qui sont, dans tous les cas, semi-étouffés par le bruit des «tambours de l'âme» qui s'échappe d'un kiosque avoisinant. Une chose est sûre, à ce que j'ai cru comprendre mon avenir semble prometteur. ¯\_(ツ)_/¯