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Au cœur de la sphère la plus parfaite de notre univers

Une nouvelle méthode d’observation nous ouvre la porte de l’intérieur d’une étoile.

Les sphères parfaites existent, et pourtant, elles ne devraient pas. Les étoiles et autres objets célestes tournent sur eux-mêmes au gré de leurs déplacements dans l'espace, ce qui est la conséquence du moment cinétique hérité de la turbulente jeunesse de notre univers, en perpétuelle expansion. Or, les objets qui tournent sont la proie des forces centrifuges : sur une sphère céleste, la région équatoriale a tendance à s'écarter du centre de la rotation. Ainsi, même les étoiles les plus sphériques sont un peu aplaties aux pôles.

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Dans le dernier numéro de Science Advances, des astronomes du Max Planck Institue de l'Université de New York décrivent pourtant le phénomène inverse, illustré par l'étoile KIC 11145123. Grâce à une technique de mesure alternative basée sur l'astérosismologie, ils ont constaté que cette étoile était beaucoup moins aplatie que le commun des objets célestes, au point de pouvoir affirmer qu'elle était l'étoile la plus sphérique connue à ce jour. En d'autres termes, cette grosse boule de plasma frise la perfection.

Depuis les années 1920, les astronomes ont mesuré les dimensions des étoiles basées grâce à une technique connue sous le nom d'interférométrie optique. Dans ce cadre, la lumière diffusée par un objet céleste est échantillonnée à partir de deux ou plusieurs « prélèvements lumineux » (grâce à deux ou plusieurs télescopes optiques) pris en deux ou plusieurs points sur l'étoile. Ces signaux sont ensuite combinés par l'interféromètre ; les modèles d'interférence ainsi obtenus fournissent un niveau de détail que l'on ne peut obtenir avec un seul télescope.

Image: Laurent Gizon et al/Max Planck Institute for Solar System Research/Mark A Garlick

L'interférométrie optique trouve rapidement ses limites, cependant, lorsqu'un grand niveau de précision est exigé. C'est là que l'astérosismologie entre en scène. La méthode consiste généralement à étudier les oscillations d'une étoile donnée. En effet, les étoiles ne se contentent pas de reposer, immobiles, dans le vide spatial : elles pulsent. Notre soleil, ou encore Alpha Centauri A et B, par exemple, subissent des oscillations résultant des phénomènes de convection turbulente qui se produisant au niveau de leurs couches extérieures.

L'équipe à l'origine de l'article a effectué des observations astérosismologiques de CCI 11145123 en séparant les fréquences des ondes acoustiques émanant de l'intérieur de l'étoile. Après avoir utilisé ces ondes pour visualiser « les tripes » de l'étoile, les scientifiques ont découvert que les couches extérieures de KIC 11145123 tournaient plus vite que le noyau. Cela explique la forme inhabituellement ronde de l'étoile, dont la surface et le noyau sont relativement isolés l'un de l'autre. En bref l'étoile tourne moins vite qu'elle n'y paraît lorsqu'on l'observe au télescope.

Il n'y a pas trente-six explications à ce phénomène. L'étude du Max Plack Institute suggère qu'il est le produit du champ magnétique faible qui entoure l'étoile. « Les vagues se propagent plus rapidement dans les régions magnétisées, de sorte que les champs magnétiques de surface, aux basses latitudes, font apparaître une étoile moins oblate par ondes acoustiques », explique-t-il. « C'est notre meilleure hypothèse actuellement. Il faudra mener de nouvelles études pour affiner notre connaissance des oscillations stellaires à ce niveau de précision. »

Le papier ne se contente pas de décrire l'aberration géométrique d'une étoile perdue au milieu des autres. C'est avant tout une preuve de concept à part entière de la puissance des méthodes astéroseismologiques, qui nous permettront d'en apprendre davantage sur l'intérieur des étoiles.

« Ce travail constitue un premier pas dans l'étude des formes stellaires par l'astérosismologie » conclut l'étude. « La méthode détaillée ici sera réutilisée pour étudier d'autres étoiles notamment les étoiles tournant plus rapidement et les étoiles possédant des champs magnétiques plus forts, ce qui engendre des déformations plus importantes. »