Je me suis gentiment fait expulser d'un party de la Formule E
Toutes les photos sont de Bruno Guérin

FYI.

This story is over 5 years old.

société

Je me suis gentiment fait expulser d'un party de la Formule E

Je sais qu’à la fin de la journée, je vais montrer mes seins à n’importe qui, parce que ma robe sera trop lousse, ma posture décevante et ma maîtrise de soi imbibée de champagne.

Pourtant, lorsque j'attends l'autobus pour me rendre à la Formule E, je n'ai que du café et la moitié d'une boisson énergétique au citron dans le corps. Comme j'ai trop baisé en matinée, je porte aussi une petite culotte, bien que ma robe se porterait vraiment mieux sans couture de g-string apparente, pour ne pas laisser du foutre couler contre ma cuisse sur un circuit automobile.

Une baby-sitter pour m'apprendre à vider des verres de champagne

Super excitée parce que j'ai la permission de boire du champagne toute la journée, je descends à la station Papineau. Je note mentalement le prix des bouquets de fleurs et je marche jusqu'à l'accueil, où Erika, une responsable de marque pour Mumm, m'attend. Je pensais passer la journée à placoter avec des fonctionnaires de la Ville et des touristes, mais j'ai une baby-sitter pour m'expliquer la course, me pointer les gens importants ainsi que les terrasses où il est possible de fumer en cachette, et avec qui parler de génétique familiale et de marques de bronzage.

Publicité

Nous croisons des mecs avec des t-shirts de Star Wars, des Expos et à l'inscription « Only Human ». Lorsque nous passons devant des policiers surveillant l'entrée de la tente Emotion Club à 5055 $ la paire de billets, Erika me dit qu'elle se sent toujours coupable de quelque chose quand elle en voit, même si elle n'a rien à se reprocher. Je lui dis avec mon accent de blanche privilégiée à grosses lunettes Marc Jacobs : « Oui, moi aussi, imagine si on était des Noires. » Elle ne répond rien, ou ne m'entend pas, et nous trinquons à notre diète de champagne pour la journée. Il y a des cupcakes, du fromage bleu sur des craquelins, des beignets qui sentent l'érable et la cannelle, et des salades de légumes verts, mais c'est clair que nous sommes là pour nous enfiler verres de champagne et eau aromatisée au concombre.

Tout est possible avec 220 volts et un chirurgien mexicain

Bruno, le photographe, nous rejoint un peu plus tard, et nous parlons de la première fois que nous avons trop bu. Personne n'a bu de champagne à sa première cuite, et c'est dommage. Moi, la première fois que j'ai bu, je me suis ramassée à mimer des animaux et à faire l'ange dans la neige, avec un mec qui m'a amenée ensuite voir un très mauvais film au cinéma. Après, je n'ai pas bu pendant deux ans. Bruno a bu de la vodka très sucrée, un cadeau de la grande sœur d'un ami, qui est devenue policière depuis. À ce moment-là, je voudrais juste m'asseoir sur le faux gazon de la terrasse de la tente Emotion et parler de ma petite culotte avec Bruno. Quand celui-ci part fumer avec Erika, je tente de converser avec deux mecs qui ne me parlent que de leur patron, de lab marketing et de ce qui est impossible avant de devenir possible grâce à 220 volts et une switch dessous.

Je regarde des familles se régaler de friandises glacées. Un mec en veston de lin turquoise attend pour se faire servir du champagne ou une slush au rosé et aux fraises. Je trouve qu'il ressemble à une star de téléréalité américaine ou à un vendeur de duplex à Notre-Dame-de-Grâce. Aux toilettes, je me remets du gloss sur les lèvres. Une fille me dit qu'elle s'est fait botoxer avant l'arrivée de l'été. Elle passe sa main sur son front et proche de ses yeux pour me montrer où elle a reçu des injections, et m'apprend que si je veux me faire faire une abdominoplastie, je dois impérativement me rendre au Mexique. Je prends en note son prénom et son nom, mais je ne lui dis pas que je n'ai aucune intention de crier abdominoplastie dès que je sors d'un avion au Mexique. Le Mexique est pour moi synonyme de vacances dans un tout-inclus avec un gentil organisateur qui me demande de lui dire je t'aime après que je lui ai sucé la queue dans sa villa, et des photos de Teresa Margolles.

Publicité

Le responsable de l'entretien des salles de bains, de la compagnie Les Cabinets, m'indique qu'il préfère la Formule E à la Formule 1, raisonnant que sans vomi à nettoyer ni coke près des lavabos, les gens sont plus sages lors de la course ayant lieu dans le centre-ville de Montréal.

Groupie de Youppi et de vernis couleur pêche

Juste avant la course, le représentant du coureur automobile Jean-Éric Vergne, nous guide sur le circuit et se fait légèrement passer sur le pied par une automobile électrique. Il ne dit rien, et ses yeux d'un bleu surréaliste ne trahissent pas d'énervement. Les seules choses qui le stressent sont la cigarette du photographe et les spectateurs qui ne retweetent pas suffisamment des encouragements au coureur de l'écurie Techeetah.

Après avoir embrassé et serré dans mes bras le bonhomme Michelin et Youppi, et photobombé Denis Coderre qui ne voulait pas se faire photographier avec moi, je retourne vers la tente Emotion boire d'autres bulles et tenter de convaincre Erika de monter sur une table. Nous regardons la course avec un couple. La femme s'offusque gentiment que je parle de mari et femme, précisant qu'elle ne veut jamais entendre ces mots. Nouchik* préfère dire boyfriend, et je me demande soudainement si elle n'est pas la maîtresse du mec qu'il amène à des événements sportifs pendant que son épouse fait du zumba.

Sauf que c'est bien sa femme, depuis vingt ans, et elle est adorablement cheesy, comme je le suis. Elle me révèle le nom de son vernis à ongles : « Flip-flop fantasy. » Nouchik porte des couleurs pastel en été et se réserve les teintes de rouge pour l'hiver. Je dis que j'aurais voulu que ce soit mon travail, donner des noms à des flacons de vernis, et elle ne semble pas trop savoir quoi me répondre. Son mari me propose d'interviewer leur fils de 18 ans, qui souhaite devenir le prochain Georges St-Pierre. Leur fils, tout juste arrivé à notre table, ne semble vraiment rien vouloir savoir de mon sourire et de mon intoxication au champagne, et fait juste un signe de refus de la tête. Je dis que c'est très important pour moi, le consentement, et que je ne forcerai rien.

Publicité

La lingerie ne se déchire pas et les tétons se montrent

Quand je me retrouve seule avec la femme de Saint-Léonard, elle me parle de son couple : « Nous devons garder la flamme, tu sais, essayer de nouvelles choses, comme les jeux de rôle. Le sexe devient si ennuyant, mais we need to spice it up. J'adore la lingerie, mais il n'a pas la permission de la déchirer. Nous ne sommes pas dans un film », me dit Nouchik.

Pour plus d'articles comme celui-ci, inscrivez-vous à notre infolettre.

Jean-Éric Vergne gagne, et Erika m'accompagne près du podium. Mes sandales Nine West se brisent, je n'ai plus de semelles, je suis pratiquement nu-pieds avec dix ampoules, mais j'oublie tout quand je suis aspergée de champagne, parce que je suis véritablement cheesy et que le champagne me pousse à tout accepter et à tout oublier. J'ai envie d'embrasser toutes les ambassadrices et mascottes, mais je ne fais que piquer un énorme ballon blanc et montrer mes seins pour recevoir gracieusement une casquette de Formula E. Personne ne juge mon bronzage, mais le photographe et moi sommes gentiment dirigés vers la sortie.

C'est sans doute la faute de mes tétons. C'est qu'après la course, il ne reste plus rien, tout le monde quitte, il reste plus de Coke diète que de bouteilles de champagne. Les invités plus sages de la tente Emotion Club à 5055 $ ne veulent pas marcher dans du faux gazon en sifflant le reste des bouteilles d'alcool : ils se rendent chez eux, de manière plus distinguée que moi, en souliers plats, prennent une douche et se rendent au gala de la Formule E, dans de la nouvelle lingerie, qui n'est ni à montrer ni à déchirer.

*Nom fictif