Ces photos s'inspirent d'une expérience de mort imminente

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Ces photos s'inspirent d'une expérience de mort imminente

Après un accident de la route, Cig Harvey n'arrivait plus à parler. Alors, elle pris un appareil photo pour ausculter la frontière entre la vie et la mort.

On ne sait que trop bien à quel point frôler la mort peut chambouler le rapport d’une personne à la vie. Traumatisée par un accident de voiture au point de ne plus pouvoirparler, la photographe Cig Harvey s'est tournée vers son art. Son tout dernier livre, You an Orchestra You a Bomb, rappelle par des couleurs vives et une noirceur d'encre la brièveté de notre existence. À travers les photographies et le texte, le livre célèbre et déplore la nature éphémère de l'existence. « Sous cette fine peau, avec notre salive, nos organes, nos os, nous sommes des orchestres », écrit Harvey, « Mais quand nous ouvrons la bouche, entre larmes, nerfs et cartilages, nous sommes des bombes. »

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En feuilletant le livre, je me suis vue pousser des soupirs. Ma gorge s’est serrée, non pas par frustration, mais plutôt pour contenir mes larmes. La peur de Harvey, celle de perdre les choses qui lui sont chères - la famille, l'amour, l'expression - traverse le livre avec une telle force que ses angoisses deviennent celles du lecteur. « Que serait la vie sans eux ? » nous demande-t-elle.

Le travail de Cig Harvey, photographe des beaux-arts accomplie, figure parmi les collections permanentes du Musée des beaux-arts de Houston et du Musée international de la photographie et du cinéma de la George Eastman House, entre autres. You An Orchestra You A Bomb est son troisième livre – précédé en 2012 de You look at me like an emergency nommé comme l'un des meilleurs livres de l'année par Photo District News (PDN) et écoulé à chacune de ses impressions - et Gardening at Night en 2015 - qui a reçu des éloges dans Vogue, le New York Times, le Wall Street Journal, et plus encore.

Dans un autre contexte, des photos d'une jeune femme faisant une bulle avec son chewing-gum ou d'un mur couvert de grues en papier pourraient sembler tout simplement jolies. Mais la photographe les a intentionnellement placés dans son livre. Ces moments vus à travers les yeux d'Harvey nous font comprendre sa définition de l'être vivant : des prothèses dentaires dans un verre, un ornement solitaire de Noël contre les nuages de charbon, un enfant qui nous regarde à travers le pare-brise d'un camion rouge.

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Harvey explique que chaque photo est un contraste entre les ténèbres du monde extérieur - la misère du cycle des nouvelles, les luttes de la vie intérieure - et la façon dont un enfant voit le monde - toute la luminosité et les paillettes, la curiosité et l'émerveillement. Chaque image ensoleillée offre un contrepoint sombre.

« Nous luttons avec cette minutie du temps », déclare Harvey. Une grande partie de son travail concerne la nature des relations, la fragilité de l'existence, l'expérience générale de l'être humain.

Harvey est parfois catégorisée comme « mère photographe », une description qu'elle trouve absurde et inexacte. Bien que sa fille Scout apparaisse dans son travail, dans You an orchestra you a bomb, Scout est la métaphore de ce que Harvey pourrait perdre.

« Ça me frustre d'être interrogée sur mon rôle de mère et de femme. Ce sont deux choses différentes. Et ce n’est pas parce que cela ne joue pas un rôle dans ma vie, mais c'est une partie de qui je suis en tant qu'humaine et en tant qu’artiste », déclare-t-elle. Elle reconnaît qu'il y a quelque chose d’intrinsèquement féminin à son travail, et quand on lui envoie un mail débutant par « M. Harvey, » – ce qui arrive souvent, elle est surprise de voir que les gens ne se doutent pas qu’elle est une femme. Quoi qu’il en soit, son travail porte avant tout sur l’humanité.

En ce moment, Harvey travaille sur un nouveau projet dans lequel elle déconstruit la physicalité du halètement et exploite le mouvement dans les photographies. La curiosité dont elle fait preuve au sujet des réactions involontaires découle de son expérience suite à You An Orchestra You A Bomb. Après son accident, Cig Harvey ne se sentait en sécurité que dans les bois, jusqu’à ce qu’un jour, elle a trébuche sur une parcelle de jacinthes qui lui a coupé le souffle. C’est là qu’elle a commencé à se demander si l'intellect et l'émotion sont stockés dans le cerveau ou s’ils sont, en fait, plus corporels. « Nous conservons la mémoire dans nos corps », dit-elle. « On halète lorsqu'on voit quelque chose de beau, mais aussi lorsqu'on voit quelque chose de terrible. »