L’expérimentation de drogues n’a jamais été aussi risquée

Vos parents aussi vous répétaient que la drogue pouvait vous tuer, même si vous n’en preniez qu’une seule fois? Avant, c’était tiré par les cheveux. Mais en 2016, la paranoïa de papa et maman à propos des drogues récréatives commence à être justifiée.


Avec des substances comme le fentanyl, un opioïde mortel beaucoup plus fort que l’héroïne, ajoutées ou substituées à d’autres drogues – cocaïne, MDMA, faux Xanax et une liste croissante de poudres et de comprimés –, le moment n’a jamais été aussi mal choisi pour accepter après plusieurs verres dans un bar une ligne d’un inconnu. L’expérimentation s’accompagne maintenant d’un avertissement : si vous essayez par exemple le MDMA ou un comprimé de Xanax, il est possible que la substance contienne du fentanyl ou un autre dangereux opioïde et, par conséquent, vous risquez de faire une surdose. Le nombre de décès des suites d’une surdose au fentanyl a bondi en Amérique du Nord ces dernières années :655 au Canada entre 2009 et 2014, et plus de 700 aux États-Unis en 2013 et 2014 seulement. Et le nombre continue d’augmenter, car on trouve de plus en plus de fentanyl dans d’autres drogues récréatives. Un expert a décrit la surutilisation des opioïdes comme la « pire épidémie causée par l’homme de l’histoire médicale moderne ».

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Oui, vous avez bien lu. Ce n’est plus drôle du tout. Vous pourriez vraiment mourir. Même si vous êtes sorti de l’école secondaire sans avoir fait plus que de fumer quelques joints, quand vous entrez à l’université, vous êtes plus susceptibles que jamais d’essayer des drogues. Et si vous le faites — on est certainement mal placés pour juger — voici les conseils les plus judicieux que nous avons à offrir.

On dirait du Xanax, mais, qui peut en être sûr aujourd’hui? Photo : Dean sur Flickr

Ne vous fiez pas à l’apparence

Au Canada et aux États-Unis, du fentanyl et des opioïdes semblables sont parfois déguisés en médicaments d’ordonnance. On a jusqu’à maintenant découvert de faux comprimés d’OxyContin, de Percocet et de Xanax qui en contenaient, et liste s’allonge. Selon un revendeur, le faux Xanax est fabriqué de façon à ressembler au vrai médicament : des comprimés en forme de petites barres blanches, mais ils sont plus épais et s’effritent plus facilement. Quant au faux OxyContin, qui a envahi la côte ouest du Canada, ce sont de petits comprimés ronds bleu-vert avec le nombre 80 sur l’une de ses faces. Comme la fabrication de ces comprimés est illégale, la quantité de drogue dans chacun peut beaucoup varier, ce qui accroît le risque de surdose.

Lori Kufner, qui travaille pour Trip! Project, un groupe d’aide, affirme que « n’importe qui peut fabriquer des comprimés de nos jours. Ce n’est ni dispendieux ni difficile. Même si vous faites des recherches et que l’apparence des comprimés est la même que ce que vous voyez sur internet, ce peut vraiment être n’importe quoi ».

Quand A’lisa Ramsey, 20 ans, de Calgary, a commencé à acheter de l’OxyContin dans la rue, elle ne savait pas qu’il s’agissait de fentanyl. « Je l’ai su quand on est allés voir le dealer qui les vendait au gars à qui je les achetais. Il m’a dit que ce n’était pas de l’OxyContin, mais du fentanyl. » À ce moment, elle était déjà accro.

Photo : Jake Kivanc

Dites non aux inconnus sur le plancher de danse

Soyons francs : accepter une ligne d’un nouvel ami rencontré dans un bar n’a jamais été sans risque. Rien ne ressemble plus à une poudre blanche qu’une autre poudre blanche.

Chelsea, 27 ans, de Surrey en Colombie-Britannique, a vécu une expérience le soir de l’anniversaire d’un ami qui l’a poussée à jurer que la drogue, c’était fini pour elle. Après avoir rencontré une fille blonde à l’extérieur du bar, elle a accepté de faire une ligne de cocaïne avec elle. Chelsea en prenait à l’occasion depuis ses 18 ans. Devant le revendeur, elle a opté pour une clé plutôt qu’une ligne. Aujourd’hui, elle dit qu’elle serait peut-être morte si elle avait pris une ligne. « Tout ce que je me rappelle, c’est d’avoir marché vers mon ami. Une minute plus tard, c’est arrivé. Quelqu’un a dit : “Ton amie fait une surdose.” »

Quand Chelsea a repris connaissance, elle était dans un lit d’hôpital et son chandail avait été découpé. On l’avait sauvée à l’aide de naloxone, l’antidote aux surdoses d’opioïdes. D’après l’analyse toxicologique qu’on lui a fait passer, la seule drogue dans son organisme était le fentanyl. Elle a plus tard appris que la blonde qui l’accompagnait était morte et qu’une autre personne au même bar avait fait une surdose. « On ne peut pas faire confiance, et ça ne vaut pas la peine de risquer sa vie », conclut-elle.

Chelsea n’est pas la seule. Le 31 août dernier, à Delta en Colombie-Britannique, neuf surdoses en 20 minutes pourraient avoir été causées par la présence de fentanyl dans de la cocaïne.

Ne consommez pas seul

Procurez-vous une trousse de naloxone

En Colombie-Britannique, en Alberta et en Ontario, la naloxone — antidote aux surdoses d’opioïdes — devrait être disponible sans ordonnance. Dans les autres provinces, une ordonnance est nécessaire. Que vous soyez au Canada ou aux États-Unis, les programmes d’aide sont souvent la meilleure source pour savoir comment mettre la main sur une trousse. Cependant, vous ne pouvez pas vous injecter la naloxone vous-même, car vous perdrez conscience si vous faites une surdose. Une autre personne doit être présente avec vous.

Si possible, demandez une trousse à votre médecin ou à votre pharmacien, prenez connaissance des signes d’une surdose d’opioïdes et ayez-la à portée de main. Par contre, notez que vous pourriez avoir du mal à entrer dans un bar ou une salle de spectacle avec la naloxone : c’est une seringue.

Sachez qui est votre fournisseur

Comme toujours, si vous prenez de la drogue, mieux vaut connaître celui qui vous la fournit et d’autres personnes qui peuvent confirmer que les substances sont bien celles que vous voulez. Essayez si possible de trouver un ami d’un ami. À tout le moins, adhérez au principe « ne pas accepter de drogue d’un inconnu ». « Ce n’est certainement pas un bon moment pour ceux qui n’ont pas de contacts, et même si on en a, ce n’est pas génial… Les risques sont élevés », déplore Lori Kufner.

Prenez de petites quantités

Comme on le lit dans beaucoup d’avertissements au sujet des drogues, il est conseillé de prendre une petite quantité et d’attendre de 45 minutes à une heure pour voir ce qui se passe avant d’en prendre plus. Mais Lori recommande d’en prendre une petite quantité aussi après l’essai. « Surtout avec le fentanyl, il peut y avoir une toute petite quantité dans la substance, peut-être pas assez pour faire quoi que ce soit la première fois, mais assez pour vous tuer la seconde fois. »

Lori ajoute que, dans son groupe d’aide, on a entendu parler de cas récents de personnes décédées même s’ils étaient plusieurs à partager un sachet de poudre ou un comprimé, par exemple. Selon elle, il est tout à fait possible qu’une personne décède d’une surdose alors que d’autres, qui ont partagé le sachet, en sortent indemnes. Comme une infime quantité de fentanyl peut être néfaste, il suffit parfois de quelques particules ajoutées dans un sachet de cocaïne pour causer une surdose.

Ne mélangez pas les substances (oui, même l’alcool)

Certaines des pires situations dans lesquelles Lori a travaillé sont survenues quand des personnes ont mélangé des substances, en particulier l’alcool. Quand vous buvez, prévient-elle, vous risquez de consommer plus. « Si on boit beaucoup, surtout dans les partys où il y a des invités de tous les âges et dans les partys de première année à l’université, on est susceptibles de boire un Mickey d’un coup, puis de consommer ensuite d’autres drogues. »

Photo : Jake Kivanc

Procurez-vous une trousse d’analyse de substances

Les trousses d’analyse sont un excellent moyen de s’assurer que la substance qu’on prend est bien celle qu’on a envie de prendre. On en trouve sur internet ou auprès de certains services d’aide. Les prix varient en fonction du type de substance à analyser. Toutefois, sachez que le fentanyl et les opioïdes semblables en minuscules quantités ne seront pas toujours détectés, mais peuvent quand même être néfastes.

Si vous décidez de prendre de la drogue, faites-le de façon intelligente

Si vous terminez vos études sans avoir touché à l’Adderall ou vu quelqu’un en prendre en désespoir de cause avant un examen, avez-vous mis les pieds à l’université? Pour l’instant, on ne rapporte aucun cas de « drogues d’aide à l’étude » contenant du fentanyl. Par contre, on en a trouvé dans de la méthamphétamine.

« C’est la même chose qu’avec tous les stimulants, parce qu’à la base, c’est toujours du speed : hydratez-vous et reposez-vous », recommande Lori. À son avis, ceux qui ne dorment pas pendant des jours grâce aux stimulants s’exposent à des problèmes de santé. Mélanger des médicaments comme le Ritalin avec la caféine peut entraîner une hausse du risque de crise cardiaque. Tandis que le manque de sommeil, de nourriture et d’eau (besoins primaires dont on se fiche quand on prend des stimulants) combiné à la consommation d’alcool peut entraîner des convulsions. Elle rappelle que de s’enfiler des stimulants et de passer quelques nuits blanches, ce n’est pas la recette du succès à un examen.

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