OSHA Condos, un important projet immobilier s’apprête à voir le jour dans Hochelaga-Maisonneuve. Le mégacomplexe du promoteur Groupe Altius comptera 208 unités et s’installera dans un secteur considéré comme le plus pauvre du quartier. En branle depuis maintenant quatre ans, OSHA Condos est dénoncé par plusieurs organismes communautaires, dont le Comité de base pour l’action et l’information sur le logement social (BAILS).
Le porte-parole d’OSHA Condos, Hugo Deschênes, a assuré, au Journal Métro, que « la réponse du quartier à [leur] venue est très positive en général, le comité BAILS faisant exception ». Il a également ajouté avoir tenu plusieurs rencontres pour « valider que [leur] offre correspondait aux attentes » de la communauté.
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Toutefois, les résidents se sont également exprimés au moyen d’une pétition du Comité BAILS exigeant qu’aucun condo ne soit construit sur le terrain de Goyette Auto, situé sur la rue Sainte-Catherine entre les rues Nicolet et Chambly (où se situe maintenant le bureau de vente d’OSHA Condos). Plus de 2000 noms ont été récoltés par cette initiative.
Les personnes qui s’opposent au projet croient qu’il aura des « conséquences énormes » sur le quartier : fermeture de commerces abordables et de maisons de chambres, reprise et conversion de logements locatifs en condo, hausse de loyer, nettoyage social dans les espaces publics, répression policière, etc.
C’est le cas de l’organisatrice communautaire du Comité BAILS, Émilie Trépy-Lecavalier, qui évalue la possibilité d’un départ forcé du quartier pour les locataires à plus faible revenu. « On comprend que, lorsqu’un quartier où il est généralement possible de se loger de manière réellement abordable devient plus tendance, il y a des hausses de loyer ou des reprises de logement. Des gens doivent donc quitter leur quartier ou encore déménager dans des logements qui ne conviennent plus à leurs besoins », explique-t-elle à VICE au téléphone.
Selon les chiffres du « dossier noir » du FRAPRU compilés par Statistique Canada, les loyers du quartier ont augmenté de plus de 13 % entre 2006 et 2011. Puis, selon une étude de l’Institut national de recherche scientifique (INRS), plus de 800 logements ont été retirés du marché locatif du secteur d’Hochelaga-Maisonneuve en raison de conversions en condos ou de reprises par les propriétaires entre 2003 et 2014.
Comme premier effort, le BAILS a organisé, le 16 février dernier, un rassemblement populaire afin que ce mégacomplexe ne puisse pas voir le jour. La même journée, OSHA Condos célébrait l’ouverture officielle de son bureau de vente au coin des rues Nicolet et Sainte-Catherine.
Plusieurs dizaines – voire une centaine – de personnes s’y sont rassemblées. Sous le thème « OSHA Détruire un quartier – bloquons OSHA Condos », des membres d’organismes communautaires, des militants de tout acabit, des résidents d’Hochelaga-Maisonneuve et des quartiers avoisinants se sont réunis pendant près de trois heures.
Ils ont défilé dans les rues en scandant des slogans comme « Foutez le camp de notre quartier », rappelant que les promoteurs immobiliers n’y sont pas les bienvenus. Une manifestante avec une pancarte avec la question « Est-ce que je vais avoir un logement social avant de mourir? » a notamment retenu l’attention.
Des organismes présents au rassemblement croient également à ces conséquences.
Pour Dopamine, qui travaille notamment avec les personnes en situation de précarité, ce genre de projet ne fait « qu’augmenter la stigmatisation et la répression sur les personnes qui habitent dans le quartier depuis des décennies », explique le représentant de l’organisme lors de la prise de parole.
Chez Stella, un organisme qui accompagne de son côté des travailleuses du sexe, on croit qu’un tel projet amènerait encore plus d’insécurité et de jugements vis-à-vis des femmes qui fréquentent les rues du voisinage. « C’est inacceptable que la Ville ait autorisé un projet comme ça. Il faut interpeller Valérie Plante et tous les autres élus qui ne sont pas présents aujourd’hui pour le remplacer par quelque chose de plus respectueux », tranche Sandra Wesley, directrice de Stella.
Sur place, Émilie Trépy-Lecavalier, du Comité BAILS, en a profité pour distribuer des tracts concernant le projet d’opposition à des passants. Elle raconte que le commentaire qui revenait le plus souvent de leur part était qu’il y avait déjà trop de condos et que ce n’était pas le besoin principal d’Hochelaga-Maisonneuve. Une situation dont ont témoigné les voisins qui habitent en face du nouveau bureau de vente et qui ont installé une banderole devant chez eux disant « Stop OSHA Condos ». Ils sont sortis sur leur balcon à quelques reprises pour encourager la foule qui s’était déplacée.
Jusqu’à présent, le sud-ouest d’Hochelaga-Maisonneuve est le seul coin du quartier qui n’a pas encore été touché par l’embourgeoisement. Il n’existe actuellement aucun complexe de condos de cette ampleur dans le secteur. C’est ce qui inquiète d’autant plus les résidents du quartier.
« Nous, on croit beaucoup à la pression populaire. En ce moment, comme l’arrondissement a accepté le projet, OSHA Condos a tous les droits. Ce qui nous reste, c’est de montrer que les gens du secteur pensent qu’ils ne sont pas les bienvenus. C’est donc une mobilisation à moyen-long terme », a expliqué Émilie Trépy-Lecavalier, qui préfère garder secrètes les futures actions pour préserver l’effet de surprise. Le 4 mars prochain, une rencontre est organisée afin de discuter des activités qui seront menées afin de bloquer OSHA Condos.
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Dès le lancement de sa campagne publicitaire, OSHA Condos a été critiqué pour des panneaux géants installés à plusieurs endroits dans Hochelaga-Maisonneuve et a fait l’objet de multiples dénonciations sur les réseaux sociaux. Les panneaux en question présentaient une illustration de la rencontre, en 1535, entre Jacques Cartier et le chef du village iroquois d’Hochelaga.
La Presse a révélé que cela a aussi suscité la grogne du Conseil mohawk de Kahnawake, puisque les condos OSHA ont baptisé leur projet en citant une histoire de l’ex-chef Billy Two Rivers. «This is wrong », a affirmé le chef Ross Montour du conseil de bande, qui considère qu’on utilise l’image de sa communauté pour faire la promotion de condos.
Le projet immobilier a depuis retiré sa campagne publicitaire.