Voilà, la Ligue 1 peut de nouveau s’extasier sur un jeune prodige. Depuis la blessure de Nabil Fékir et notre accoutumance aux performances de Sofiane Boufal, on restait un peu sur notre faim. Mais heureusement, Ousmane est arrivé. Il pourra envoyer la cassette de son match de dimanche face à Nantes à la LFP en mai prochain : elle lui vaudra à elle seule de dépasser Georges-Kévin Nkoudou au titre de meilleur espoir de Ligue 1.
Lors de ce grand derby de l’Ouest, on a eu donc cette bonne surprise d’assister à un triplé de Dembélé. Cela a commencé après 56 secondes de jeu et un pointard dans la lucarne de Riou. Puis, ce fut un coup-franc vicieux qu’on a cru dévié par M’Bengue, mais qui était finalement bien à mettre au crédit du jeune ailier. Et enfin, un raid solitaire depuis le milieu du terrain avec un crochet sur Cana et une finition au poil. Pour passer en un match de grand espoir à jeune prodige confirmé, Dembélé a aussi eu la chance d’avoir en face de lui Lorik Cana et Oswaldo Vizcarrondo, soit deux trentenaires avec des camps de gitans accrochés aux derches.
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Ousmane Dembélé est donc ainsi devenu la nouvelle attraction de la Ligue 1, voyez-vous cela, faisant passer Paul-Georges Ntep pour un joueur du siècle dernier. 18 ans, et des statistiques folles, qui font faire aux médias moult comparaisons douteuses : dans cette ère #DataRoomCanal où les stats sont présentées comme des vérités immuables qui certifient de la qualité d’un joueur, Dembélé est l’Elu des chiffres à virgules, l’OptaChrist, Ousmane-tout-puissant. Meilleur buteur parmi les moins de vingt ans dans les cinq grands championnats européens avec neuf réalisations, il est aussi l’un des meilleurs dribbleurs en moyenne par match. Un classement des dribbleurs dominé par Giannelli Imbula, qui, comme chacun le sait, réalise la meilleure saison de sa carrière.
Bref, comme un match de foot ne s’est encore jamais joué sur un tableur Excel, reste le terrain. Là, le frêle attaquant de 18 ans est tout ce dont Rennes a toujours rêvé depuis une décennie. Le Stade rennais a ainsi longtemps eu ce tropisme particulier pour l’empilement d’ailiers et attaquants stéréotypés “rapides et techniques” (en se basant généralement sur leur couleur de peau certainement, c’est le racisme ordinaire du football français), très certainement par nostalgie de Shabani Nonda. Mais d’Olivier Thomert à Razak Boukari en passant par Jonathan Pitroipa et Victor Hugo Montano, il y a eu peu de bonnes pioches, tout juste un Moussa Sow ou un Paul-Georges Ntep par-ci par-là.
Mais, là, Dembélé, c’est le stade ultime de l’évolution du joueur typiquement rennais. Un ailier aussi habile du pied droit que du pied gauche, dribbleur et vif : on pourrait limite croire que François Pinault a financé son élaboration à partir de l’ADN de tous les anciens ailiers passés par le club.
Et le pire, c’est qu’on ne l’a pas vu arriver. Peut-être est-ce aussi dû à son patronyme : Dembélé est le nom de tellement de joueurs pros qu’on a du mal à s’y retrouver. Il suffit de regarder la page Wikipédia du nom Dembélé. Du coup, Tottenham a la volonté de les regrouper pour tenter, comme le Red Star avec les Pierrick Cros, d’avoir un onze de départ uniquement composé de Dembélé. Peut-être pour des questions d’économie de flocage. Ainsi, pour aller avec leur Moussa Dembélé belge, ils ont tenté l’hiver dernier de débaucher le Moussa Dembélé français de Fulham, sans succès. Et, comme à peu près toute la Premier League on imagine, ils sont sur les rangs pour récupérer Ousmane Dembélé aussi vite que possible.
Mais ils vont sûrement devoir s’incliner devant la concurrence du FC Barcelone. En effet, Ousmane Dembélé a eu la bonne idée de marquer son triplé devant Robert Fernandez, le directeur sportif du Barça qui était au Roazhon Park pour le derby de l’Ouest. Le Barça, c’est le club préféré d’Ousmane, il l’a dit dans une interview chez BeInSports. Du coup, on l’imagine très bien aller rapidement faire banquette au Camp Nou, histoire de jouer des fins de match quand Neymar sera fatigué.
En réalité, voir un talent comme celui de Dembélé éclore comme ça à 18 ans en Ligue 1 tient du petit miracle. A l’heure où les recruteurs des clubs de Premier League se postent autour des mains courantes des tournois d’U14, voir un jeune talentueux finir son apprentissage dans son club formateur est de plus en plus rare. D’ailleurs, on a bien failli ne pas le voir en Ligue 1 : Dembélé a commencé sa saison 2015-2016 en allant au clash avec la direction du Stade rennais, faute de contrat professionnel.
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Il aurait alors pu signer à Manchester City, au Red Bull Salzbourg ou au Benfica sûrement sur les bons conseils de ses agents ou de son entourage. Finalement, tout est rentré dans l’ordre grâce à Mikaël Silvestre, qui n’occupe pas un emploi fictif comme pourrait le faire croire son titre de “chargé de missions auprès du président Ruello”.
Mais la hype est telle qu’il serait assez tristement normal qu’il parte déjà au prochain mercato, après une sélection dans les 23 pour l’Euro. Sans avoir joué 30 matches de Ligue 1. Mikaël Silvestre n’y pourra pas grand chose quand le Barça aura proposé un Anthony Martial et demi pour acquérir Dembélé.
C’est pour cela, pour nous faire redécouvrir ce qu’est un jeune qui explose en Ligue 1 tout en étant un Frankenstein réussi de dix ans d’ailiers rennais, qu’Ousmane Dembélé est le joueur de Ligue 1 VICE Sports du week-end.