Le Ku Klux Klan recrute à grands renforts de bonbons

Le Ku Klux Klan a quelques soucis pour recruter de nouveaux membres. Ça peut se comprendre : ils ont de plus en plus de concurrence au sein des milieux d’extrême droite et des nostalgiques de la guerre de Sécession. La semaine dernière, des membres du Klan ont donc décidé de distribuer des sacs remplis de bonbons et de flyers pro-blancs aux habitants de Caroline du Sud.

Sans surprise, les habitants en question furent surpris de trouver à l’intérieur du sac des bonbons à la menthe, des Smarties, et un prospectus sur lequel était inscrit : SAUVEZ NOTRE PAYS / REJOIGNEZ LE KLAN. L’inscription était accompagnée d’une adresse mail et d’un numéro de téléphone qui renvoyait aux Loyal White Knights of the Ku Klux Klan, une section regroupant les membres du Klan qui résident dans le sud des États-Unis. En appelant le numéro, on pouvait tomber sur un message pré-enregistré qui parlait de Mexicains et des « maladies du tiers-monde » qu’ils véhiculent.

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« Il est temps pour les États-Unis de renforcer leurs lois sur l’immigration, de renvoyer les étrangers chez eux, et de déployer des troupes à la frontière, avec pour consigne de tirer à vue », suggère un homme à l’accent sudiste prononcé. « Souvenez-vous : si ce n’est pas blanc, ça dégage. White power. »

Dans une interview pour FOX Carolina, Robert Jones, le chef de la section, a confirmé que les sachets de bonbons étaient distribués dans le cadre d’une campagne de recrutement à grande échelle du Klan.

Comme l’Amérique d’aujourd’hui est celle d’Obama, et que des Noirs vivent parfois dans les mêmes quartiers que les Blancs, certains membres des minorités que le Klan déteste tant se sont retrouvés avec un des fameux sachets dans leur jardin. Jones a expliqué à cet égard qu’ils avaient distribué leurs sachets dans toutes les maisons – car faire une distinction en fonction de la couleur de peau des gens qui y habitent aurait été raciste, vous comprenez.

« On ne peut pas savoir qui vit dans telle ou telle maison ! On ne peut pas savoir s’ils sont Noirs, Blancs, Mexicains, gays – c’est impossible. Il faut être raciste pour tirer, en voyant une maison, des conclusions sur les gens qui y vivent ». Il a ensuite ajouté qu’il ne fallait pas avoir peur des membres du Klan, à moins qu’on ait quelque chose à se reprocher – c’est-à-dire, à en croire le site web des Loyal White Knights, si l’on est un consommateur de drogue, un homosexuel, si on a eu recours à un avortement, ou si on a eu des relations inter-raciales.

La tentative de séduction du Klan n’est pas une initiative isolée. Même s’il reste le principal groupe prônant la haine raciale outre-Atlantique, leur nombre de membres est en baisse depuis plusieurs décennies, la faute à des scandales, des tensions internes, et leur mauvaise réputation en général. Le Southern Poverty Law Center estime entre 5 000 et 8 000 le nombre de membres actuels, répartis entre les diverses sections du Klan.

Le KKK est un peu aux racistes ce que Windows est à l’ordinateur. Tout le monde connaît, les plus vieux restent souvent fidèles à la marque, mais leur part de marché vacille de plus en plus.

C’est pourquoi de nombreuses sections ont redoublé d’efforts ces derniers mois pour trouver de nouveaux membres. À l’aide des réseaux sociaux et de stratégies empruntées au web marketing, ainsi que des méthodes plus classiques comme la distribution de tracts, ils tentent de cibler leurs recrues potentielles : des racistes en devenir, âgés de 13 à 17 ans. En Pennsylvanie, par exemple, la section locale a annoncé en avril dernier qu’elle mettait en place un service de surveillance du voisinage, informant les riverains qu’ils pouvaient « dormir en paix en sachant que le Klan veillait pour eux ». Plus inquiétant encore, des sections basées en Virginie-Occidentale aurait entrepris de former leurs membres au combat en leur proposant des entraînements militaires – une première dans l’histoire du KKK moderne.

Plus généralement, le KKK a tenté de profiter du regain de tensions à la frontière mexicaine pour faire grossir ses rangs. Des flyers ont recouverts les pare-brises et les trottoirs du Texas, du Tennessee et de la Floride au cours des dernières semaines, au point d’inquiéter les habitants quant à la possibilité que le Klan retrouve une seconde jeunesse.

Il est difficile de déterminer s’il faut s’y attendre ou si cette résurgence est improbable. Le KKK a déjà réussi à convaincre des non-initiés de les rejoindre, notamment lors de la vague d’immigration des années 1920, mais aussi sous le gouvernement Bush, au moment des débats sur la réforme sur l’immigration. Mais à en croire le SPLC, le nombre de sections locales du KKK a diminué de manière significative depuis 2010, ainsi que d’autres groupuscules d’extrême droite.

Bien sûr, les membres du Klan ne sont pas les seuls à fermer les yeux sur la misère des migrants qui tentent la traversée, parfois en famille : des milices privées patrouillent depuis plusieurs semaines le long de la frontière, n’hésitant pas à mettre en place des « postes de contrôle » informels, à bloquer la passage à des bus remplis d’enfants guatémaltèques, et à tenter de recruter tous ceux qui, comme eux, pensent que les gamins qui tentent de venir aux États-Unis représentent un danger d’effondrement imminent de l’économie américaine.

Là encore, le KKK a mal choisi son mode d’action : qui veut manger des bonbons quand des enfants meurent à quelques dizaines de kilomètres de là ?