Le mouvement anti-islam Pegida a fait 10 pour cent à une élection municipale en Allemagne

Les élections municipales de la ville de Dresde, la capitale de la Saxe, à l’Est de l’Allemagne, ont vu la percée surprise de la candidate du mouvement anti-islam Pegida, ce dimanche. Selon les résultats officiels provisoires, la candidate du mouvement, Tatjana Festerling a récolté 9,6 pour cent des voix, se plaçant en quatrième position. En février 2015, la maire (CDU) Helma Orosz démissionnait pour raisons de santé, c’est ce qui a motivé cette nouvelle élection municipale.

Pour cette première élection à laquelle participait Pegida, acronyme allemand de « Mouvement des Patriotes européens contre l’Islamisation de l’Occident », ce score est une surprise car le seul sondage publié avant l’élection créditait Pegida de 1 à 2 pour cent des voix, rapporte l’AFP.

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C’est Eva-Maria Stange, la candidate commune des sociaux-démocrates du SPD, des écologistes et de la gauche radicale Die Linke, qui arrive en tête du premier tour de l’élection avec 36 pour cent des votes, suivie par le parti libéral FDP avec 31,7 pour cent, puis des conservateurs de la CDU — parti de la chancelière Angela Merkel — avec 15,4 pour cent des suffrages.

Le mouvement Pegida est né à Dresde, en octobre 2014. Depuis, il se réunit chaque lundi en fin de journée dans un parc de Dresde pour manifester son hostilité à la politique d’asile du gouvernement allemand, jugée trop permissive, ainsi que contre « l’islamisation » de l’Allemagne et de l’Europe en général.

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Pegida est généralement qualifié de mouvement d’extrême-droite, au vu des slogans xénophobes et anti-islam brandis lors de ses rassemblements. Pendant sa campagne, Tatjana Festerling a appelé dans des déclarations à une « renaissance » de la culture allemande et a critiqué les demandeurs d’asile qui ont « laissé leur famille et leur maison car ici c’est un lieu agréable et on reçoit du fric de l’État ».

Le mouvement s’est développé dans son fief de Dresde, avant de s’implanter dans d’autres villes d’Allemagne. À la naissance de Pegida en octobre, les rassemblements hebdomadaires réunissaient quelques centaines de personnes à Dresde. En novembre, ils étaient plusieurs milliers. Le 12 janvier dernier, Pegida battait son record de fréquentation à Dresde avec environ 25 000 personnes dans les rues, quelques jours après l’attaque des bureaux de Charlie Hebdo. Ils avaient fait face à environ 8 000 manifestants anti-Pegida qui défilaient également dans les rues. Quelques heures plus tard, un demandeur d’asile érythréen musulman, âgé de 20 ans, avait été assassiné à Dresde, soulevant un débat sur la montée de l’intolérance dans le fief de Pegida.

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Depuis janvier, le nombre de manifestants de Pegida à Dresde a diminué pour se stabiliser à quelques milliers chaque semaine, comme le 19 mai dernier, où ils étaient environ 3 000, comme on le voit sur cette vidéo.

Pendant sa montée en puissance, de nombreuses antennes de Pegida ont été créées dans d’autres villes allemandes, comme Berlin, Leipzig ou Munich. Mais jamais le mouvement n’a pu réunir autant de manifestants que dans son fief de Dresde. Dans toutes ces autres villes, on comptait plus de manifestants anti-Pegida que de partisans du mouvement lors de leurs marches. Le 12 janvier, par exemple, à Munich, Pegida réunissait 1 500 personnes, contre 20 000 anti-Pegida.

Certains groupes qui se revendiquent de Pegida ont également été créés à l’étranger, comme en France ou aux États-Unis, sans atteindre le succès qu’a connu le mouvement à Dresde. Le 25 janvier, une trentaine de manifestants se sont réunis à Bordeaux, une soixantaine à Montpellier. Le même jour, une manifestation de pro-Pegida baptisée « Déséquilibrés, égorgeurs, chauffards… islamistes hors de France » avait été interdite à Paris.

En Allemagne, le mouvement a connu, cette année, de grandes difficultés internes. Le 21 janvier, le tabloïd allemand Bild révèle une photo du fondateur et leader de Pegida, Lutz Bachmann, déguisé en Hitler. Cette photo avait déclenché une polémique et mis à mal la stratégie du mouvement, qui se défend d’être raciste. Lutz Bachmann avait démissionné le jour même.

Peu après cet épisode, le 28 janvier, Pegida a fait face à cinq nouvelles démissions parmi ses dirigeants, dont la remplaçante de l’ancien chef déchu, Kathrin Oertel, car elle se sentait « menacée » et harcelée par des « photographes », rapporte le journal Le Monde.

Un deuxième tour de l’élection est prévu le 5 juillet prochain, car aucun parti n’a atteint la majorité absolue, mais les résultats du premier tour laissent à penser que la CDU devrait perdre la ville.

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Image via Flickr / blu-news.org