L’Union africaine (UA) a prévu d’envoyer des milliers de soldats pour une mission de maintien de la paix au Burundi, afin d’endiguer la vague de violence qui fait rage dans le pays. Mais le président burundais, Pierre Nkurunziza, a menacé ce mercredi de combattre tous les soldats qui franchiront la frontière sans sa permission.
Plus tôt ce mois-ci, l’UA a déclaré être prête à envoyer 5 000 soldats de maintien de la paix pour protéger les civils burundais qui se retrouvent au milieu d’un cycle de violences qui dure depuis plusieurs mois. C’était la première fois de son histoire que l’UA invoquait le pouvoir d’intervenir dans un pays membre contre sa volonté.
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En avril, des manifestations avaient éclaté dans la capitale du Burundi, Bujumbura, pour protester contre la décision controversée de Nkurunziza de briguer un troisième mandat. Des dizaines de milliers de Burundais ont depuis fui le pays alors que les manifestations violentes et les meurtres ont lieu jours et nuits.
Nkurunziza est un ancien leader rebelle âgé de 52 ans, qui a eu une attitude de défiance envers la communauté internationale au cours des derniers mois. Il a notamment refusé d’annuler sa campagne de réélection, et plus récemment, il a refusé la proposition de l’UA.
« Tout le monde doit respecter les frontières du Burundi, » a déclaré ce mercredi, à la radio d’État, le président Nkurunziza. « S’ils violent ces principes, ils auront attaqué le pays et tous les Burundais se lèveront et les combattront… Le pays aura été attaqué et le pays répondra. »
D’autres membres du gouvernement avaient déjà annoncé que l’arrivée de soldats de maintien de la paix, sans la permission du Burundi, représenterait une violation de sa souveraineté. L’annonce de Nkurunziza de ce mercredi intervient alors que l’UA a réitéré sa volonté d’engager des discussions avec le gouvernement burundais autour du déploiement de soldats dans le cadre de la Mission africaine de prévention et de protection au Burundi (Maprobu).
Les opposants de Nkurunziza estimaient que son troisième mandat violait la constitution, qui limite le président à deux mandats. La cour constitutionnelle burundaise avait finalement donné raison à Nkurunziza. Selon la cour, il était éligible parce qu’il avait été nommé (et non élu) pour son premier mandat, qui était intervenu après près de 10 ans de guerre civile dans le pays.
Un coup d’État raté, des affrontements continuels et des attaques armées dans ce pays d’Afrique centrale ont remué toute la région, où les souvenirs du génocide rwandais de 1994 sont encore dans tous les esprits. Après la victoire de Nkurunziza à la présidentielle, les assassinats de leaders de l’opposition et de membres du camp de Nkurunziza ont commencé à se multiplier.
Parmi les victimes on retrouve des officiels de l’armée, des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme. Il est même devenu normal de trouver des corps sans vie dans les rues de la capitale — plus de 240 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations en avril dernier.
La situation s’est encore un peu plus tendue en décembre quand des hommes en arme ont attaqué trois bases militaires dans le pays, lors de ce qui semblait être une attaque coordonnée. Les forces de sécurité ont répliqué, déclenchant une journée de violence et de tirs incessants. Le lendemain de la triple attaque, 87 corps ont été trouvés dans les quartiers de Bujumbura, où les combats ont eu lieu. Les Nations unies se sont alors emparées de la situation, puis quelques jours plus tard l’UA a annoncé son plan de déployer 5 000 hommes dans le pays sans la permission de Nkurunziza.
Le gouvernement burundais et l’opposition ont entamé un cycle de négociations de paix ce lundi. Mais un membre de la délégation du gouvernement a immédiatement menacé de quitter les négociations si des participants d’un coup d’État raté étaient aussi impliqués dans les pourparlers. Le parti au pouvoir, le CNDD-FDD, « ne peut pas participer aux négociations si ceux qui ont pris part au coup d’État raté sont impliqués, » a déclaré au début de la rencontre, Victor Burikukiye, un membre de la délégation du gouvernement.
Les pays de la région ont appelé les deux camps à se retrouver en Ouganda pour ces pourparlers afin de mettre un terme à des mois d’affrontements. Lors des discussions de lundi, des membres du gouvernement et de l’opposition burundaise étaient présents, ainsi que des représentants de l’UA et de l’ONU, et des diplomates occidentaux. La prochaine série de négociations doit se tenir dans le quartier-général de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), à Arusha, en Tanzanie.
Reuters a contribué à la rédaction de cet article.
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