Les astronautes de la Station Spatiale Internationale vont bientôt faire un bond dans la réalité augmentée.
Cette semaine, la NASA va envoyer une paire de casques HoloLens dans le cadre de la prochaine mission commerciale de réapprovisionnement de l’ISS. Il s’agit d’appareils permettant à un utilisateur de disposer des objets virtuels dans son environnement.
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À bord, l’équipage doit chaque jour effectuer un grand nombre de tâches afin de garantir le bon fonctionnement de la station. Pour y parvenir efficacement, il reçoit des instructions depuis les centres de contrôle, sur Terre. C’est à ce moment là qu’HoloLens intervient. La NASA a développé un partenariat avec Microsoft, le fabriquant d’HoloLens, dans le but de développer « un manuel d’instructions holographique », selon les mots de Jeff Norris, du Jet Propulsion Laboratory de la NASA. C’est Norris qui mène le projet en collaboration avec Alex Kipman, directeur technique chez Microsoft.
Au premier abord, HoloLens ressemble à n’importe quel casque de réalité virtuelle, comme l’Oculus Rift. Cependant, les deux technologies sont très différentes. Hololens est essentiellement une paire de verres transparents qui tourne sous Windows 10, et fournit une réalité hybride, ou augmentée. Cela signifie que lorsque vous les portez, vous pouvez voir des hologrammes intégrés au monde réel.
« Contrairement à la réalité virtuelle qui vous extrait de la réalité pour vous plonger dans un tout autre univers, avec HoloLens la réalité a d’autant d’importance que les éléments virtuels qui lui sont surimposés. Nous bombardons l’arrière de votre œil avec des photons. Les images que l’on vous montre semblent bel et bien ancrées à votre environnement, cependant, vous pouvez voir à travers » explique Kipman.
HoloLens propose deux modes d’exécution : le mode “expert à distance”, et le mode “procédure”. Dans le mode expert à distance, le centre de contrôle a accès à ce que l’astronaute voit.
« Il est pertinent d’observer le point de vue de l’astronaute au travail pour garantir la bonne marche des opérations. Les informations que l’on peut retirer de cette observation n’ont guère été exploitées jusque là » précise Norris.
Les équipes terrestres pourront également dessiner des annotations virtuelles, par exemple pour indiquer quel bouton utiliser lors d’une manœuvre, directement dans le monde perçu l’astronaute. Dans le même temps, elles lui parleront par Skype.
Sur la station, les astronautes sont responsables de la gestion de centaines d’études scientifiques différentes : l’ISS est une sorte d’immense laboratoire en orbite. Avec l’aide de HoloLens, ils pourraient être directement mis en relation avec les experts et scientifiques concernés en utilisant le mode “expert à distance”.
Le mode “procédure”, quant à lui, est une sorte de manuel d’instructions holographique. À l’époque de la navette spatiale américaine, l’équipage devait compter sur des manuels papier pour les assister dans leurs tâches. Aujourd’hui, ces manuels ont été remplacés par des ordinateurs portables et des tablettes. HoloLens va encore plus loin et propose de placer des hologrammes animés au-dessus des mains de l’astronaute au travail.
Microsoft et la NASA ont passé un long moment à développer ce produit et à s’assurer que l’utilisateur ne fera pas l’expérience d’un inconfort vestibulaire qui peut se manifester par des nausées, céphalées, etc. Cela arrive fréquemment sur les plateformes de réalité augmentée par exemple. Le produit final permet de stabiliser des hologrammes à la fois dans le temps et dans l’espace, ce qui assure à l’utilisateur que sa perception est bel et bien incarnée le monde réel. Les hologrammes ne clignotent pas, ne scintillent pas, afin que l’utilisateur puisse voir à travers eux. Le casque a été conçu pour être porté plusieurs heures par jour, plusieurs jours à la suite, sans que les yeux ne ressentent jamais ni tension ni fatigue.
HoloLens utilise un système de cartographie spatiale pour déterminer où se situent les individus en relation avec leur environnement. Il exploite également une unité de traitement holographique (HPU), dissimulée dans le casque ; elle fonctionne plus ou moins comme un cerveau humain. En effet, comme le cerveau, HoloLens est équipé de capteurs qui travaillent à la manière du cortex visuel. Le HPU traite ensuite les données entrantes, en opérant quelques ajustements automatiques qui permettent à l’utilisateur de percevoir les objets de manière très réaliste.
Plus de 45 études ont été réalisées sur l’utilisation de Hololens en micropesanteur dans l’avion ZéroG de la NASA, le Weightless Wonder. Elles ont permis de s’assurer que l’appareil fonctionnerait correctement en micropesanteur sur l’ISS.
HoloLens est prêt à embarquer sur le vaisseau Cygnus, qui a été réparé après une explosion lors du lancement en octobre de l’année dernière. Ce évènement correspond au premier lancement de vaisseau cargo américain destiné à l’ISS depuis juin. HoloLens devait à l’origine être embarqué dans le SpaceX Dragon, dans le cadre du septième vol commercial de réapprovisionnement de la compagnie. Hélas, la fusée s’est désintégrée lors du lancement et le cargo a été perdu.
Ceci pourrait marquer le début de l’utilisation d’HoloLens dans l’espace. JPL et Norris ont également développé le projet OnSight, qui permettra à des scientifiques et des ingénieurs de travailler ensemble sur les rovers évoluant à la surface de Mars. En exploitant la technologie HoloLens, les scientifiques pourraient explorer la planète rouge dans le confort de leur bureau.
Jusque là, les scientifiques ont exploré Mars en observant des images sur un écran ; à présent, grâce aux systèmes holographiques, ils pourront la parcourir d’une manière qui ressemble davantage à l’activité des géologues sur Terre. Entourés par le paysage martien, ils pourront examiner virtuellement les roches et les sols rencontrés, puis programmer des tâches pour les instruments embarqués.
Non seulement ce type de technologie contribuera à rationaliser les opérations sur l’ISS, mais il permettra également aux astronautes de développer de nouvelles façons de travailler. À terme, il pourra peut-être nous permettre de transformer notre manière d’explorer le Système Solaire.