La compagnie de rasoirs et de produits de toilette Gillette a sorti lundi une nouvelle publicité pour sa campagne The Best Men Can Be (« le mieux que peuvent faire les hommes »). Dans la vidéo d’une minute quarante-huit secondes, réalisée par la réalisatrice australienne Kim Gehrig, on aborde différentes causes, comme l’intimidation, le sexisme institutionnel et le mouvement #MoiAussi, tous des thèmes d’actualités qui alimentent des débats de société.
En somme, la publicité est un appel à l’action, invitant les hommes à intervenir lors de situations problématiques.
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Je peux très certainement comprendre que certains soient mal à l’aise avec le fait qu’une multinationale comme Gillette, qui a pendant des décennies joué la carte des produits « pour les vrais hommes » et qui a parfois utilisé de manière malhabile des stéréotypes de virilité, essaie de faire la morale et soit soudainement woke.
Mais on ne peut pas laisser cela nous distraire du fait que, fondamentalement, ce qui dérange autant d’hommes qui commentent sur les réseaux sociaux, c’est le message. Et leurs plaintes sont des commentaires qu’on entend de plus en plus et que des hommes utilisent comme un bouclier contre le progrès social : la notion selon laquelle l’égalité des genres créerait un débalancement de l’ordre social. L’idée voulant que, si les femmes devenaient égales aux hommes, plus rien ne fonctionnerait. Que les hommes soient en train de « perdre leur virilité », et que tout ça, ce soit un complot féministe. Selon des commentateurs, ce serait même un complot juif.
C’est quand même intéressant comme concept, autant d’hommes, majoritairement blancs, occidentaux et de droite, qui ont peur de devenir une minorité. C’est presque comme si, dans un sens, ils avaient l’impression que les minorités se faisaient maltraiter… 👀
Ne reculant devant rien pour faire avancer leur cause, certains masculinistes ont même commencé à faire circuler une rumeur selon laquelle Kim Gehrig, réalisatrice de la publicité, aurait été accusée « d’agression sexuelle par deux hommes et cinq femmes lorsqu’ils étaient mineurs ». Il n’y a bien entendu aucune information immédiatement accessible qui permette de lancer de telles accusations, mais ça n’empêche pas plusieurs dizaines d’hommes de copier-coller cette information dans leurs commentaires laissés sous la vidéo YouTube.
Certains dénoncent cette publicité parce qu’ils la jugent misandre. Mais comment, exactement, est-ce qu’une publicité qui invite les hommes de partout dans le monde à se rallier contre les inégalités sociales pourrait être misandre? Est-ce que, pour ces gens, être un homme implique forcément de catcaller les filles dans la rue? De laisser leurs garçons se battre et s’intimider entre eux parce qu’après tout, « boys will be boys »? De rendre les femmes autour d’eux mal à l’aise dans des situations professionnelles?
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À un moment, c’est beau de croire en quelque chose et de vouloir défendre une cause qui nous tient à cœur, mais il faut se demander si la cause pour laquelle on se bat est noble. Se battre pour son droit d’être une merde n’est objectivement pas la cause la plus constructive à défendre, mais pour les trolls et les mouvements masculinistes en ligne, c’est devenu le dernier bastion de la liberté.
Il faut vous rappeler une chose, les gars : le monde continue d’avancer, et, avec ou sans votre argent, Gillette s’en sortira sans trop de problèmes, et être une merde ne remplace pas adéquatement le manque de personnalité.
Billy Eff n’est pas viril, mais il est sur internet ici et là.