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Les photos de Jack Lang à la Concrete sont-elles authentiques ?


Publiées dans la foulée d’un week-end ensoleillé et marqué par des poissons d’avril toujours aussi calamiteux, les photos postées par Jack Lang sur son profil Facebook étaient entourées d’emblée d’une aura étrange, ou comme qui dirait d’un flou douteux. Regardez attentivement attentivement chacune des 4 et dites-moi sans sourciller que l’ancien ministre de la Culture et actuel président de l’Institut du Monde Arabe était bel et bien présent sur cette péniche, le dimanche 2 avril, à 19h22 ? Pas évident, n’est-ce pas ? Depuis, des vidéos ont circulé où l’instigateur de la Fête de la Musique déambule au milieu des clubbeurs, mais vous savez comme moi que les progrès en hologramme réalisés ces dernières années sont stupéfiants. Alors ces clichés sont-ils authentiques ? Masquent-ils un projet d’envergure fomenté par le camp d’Emmanuel Macron, déjà responsable du hacking grossier du compte Facebook de Renaud Séchan dit Le Phénix hier (regardez la taille de ses mains, personne n’y croit !) ? Nous avons demandé à quelques graphistes et photographes de nous commenter les photos incriminées. (Leurs noms ont été changés pour les protéger.) 

Lucie, graphiste : « – Aucune interaction avec les autres personnages et des traits d’expressions figés
– Problème d’exposition au niveau du visage, les ombres sont lisses…
– Flou douteux ainsi qu’une ombre portée qui détache la tête du reste du corps
– Conclusion : cheveux poivre et sel ou mauvais détourage ? »

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Zoé, graphiste : « Clairement la plus douteuse. Les premiers indices qui permettent de déceler un photomontage, c’est la lumière, les ombres, et les contours. Sur celle-là, il y a cette zone de flou cheloue derrière la tête de Jack. Si on avait voulu maladroitement effacer un truc pour en placer un autre par-dessus, c’est exactement l’effet qu’on aurait obtenu : une ombre portée cradingue et l’impression d’un contour au couteau sur les cheveux. En plus, l’espace vide autour de lui ne semble pas naturel ; aucune forme complexe ne vient recouvrir ou se superposer à son corps, il a vraiment l’air d’avoir été collé là. » 

Nicolas, graphiste : « Le front de Jack est en surexposition totale ce qui implique une lumière artificielle. Le costume (De Fursac, j’imagine) a été baissé dans les niveaux et les contrastes ont été descendus. La couleur de sa peau a été montée en saturation puis modifiée dans sa teinte, à moins de filer à Marrakech je ne vois comment atteindre ce teint. Le détourage n’est pas clair, à la limite de ce qu’on fait de pire en terme d’incrustation sur fond vert. Le contour de son corps est flou et bien trop sombre pour être physiquement présent à la Concrete. Les cheveux de la rousse ont été détourés de manière imprécise sous entendant une utilisation vulgaire du lasso polygonal… Ridicule. Je ne parle même pas de la vibrance. »

Jules, photographe : « Gros doute, au niveau des cheveux on pourrait se dire qu’il y’a détourage limite avec un contour progressif calé sur Photoshop. Sinon ça se tient, il a bien l’air dans l’ambiance. »

Paul, graphiste : « Jack pose au milieu d’un groupe de jeunes gens au regard hagard et à la langue pâteuse, OK, logique, mais on peut tout de suite voir que quelque chose cloche : si les visages de nos amis fêtards sont relativement lisses, celui de Lang lui, est tout pixellisé. Petite astuce de graphiste : lorsque vous cherchez des images de Jack Lang dans Google images, sélectionner l’option “Toutes les tailles : Grandes”. Bienvenue dans l’ère du HD, les potes. »

Ghislain, photographe : « Il a été incrusté ».

Zoé : « Jack semble vraiment plus petit et frêle qu’eux, comme si on l’avait redimensionné au mauvais ratio. Le teint de sa peau ne correspond pas très bien à l’éclairage de la scène non plus, mais c’est plausible à cause de son auto-bronzant. La grande zone sombre au niveau du bas de son corps est bien pratique pour qui voudrait dissimuler une incrustation, louche. »

Jules : « Tout se tient sur cette photo. Contraste, exposition, ombre, main sur l’épaule. Il est bien là. »

Paul : « Alors là désolé mais personne n’y croit. On est ici de toute évidence en présence de trois mecs cools, trois super potes avec un maximum d’histoires délirantes à raconter, des mecs plein d’énergie, même après 12 heures à danser comme des fous sur un bateau. Et ça m’étonnerait que trois beaux-gosses pareils aient du temps à consacrer à un homme politique, aussi sympathique soit-il. On pourrait penser que le jeune homme à droite regarde en direction de l’Officer de la Légion d’honneur, mais si on observe bien on voit tout de suite qu’il est en train d’admirer les biceps saillants de son ami à la casquette à l’envers, qui n’a pas hésité à retrousser légèrement les manches de son T-shirt pour mieux dévoiler ses bras semi-musclés. Quand au troisième larron, on voit bien qu’il regarde tout droit dans les yeux de son ami, celui à la casquette à l’envers dont on parlait à l’instant. Vous croyez vraiment qu’il y a de la place pour une personne de plus dans ce triangle de fraternité et d’amitié à 130 bpm ? Bien tenté les gars, mais Jack Lang n’a clairement rien à faire sur cette photo. »

Ghislain : « Il a été incrusté. Ou on a retouché son visage pour l’éclaircir. »

Paul : « Celle la est plutôt réussie, c’est déjà du meilleur boulot. Par contre, et c’est à ça qu’on voit qu’un bon graphiste fait toujours attention aux détails, on voit bien que l’ancien ministre de la Culture est complètement hors cadre sur ce soit disant “selfie avec Jack Lang à la Concrete”. La personne responsable de cet astucieux montage avait pourtant pris la précaution d’ajouter de l’ombre sur la jeune fille à sa gauche, mais les lois de la perspective ne mentent pas : il n’ y avait personne à cet endroit, et ce moment de complicité intergénérationnel a été fabriqué de toutes pièces. »

Arnaud, retoucheur : « Après une analyse poussée et un agrandissement à plus de 1500 %, on note que sur chacune des photos, il a l’air plus “compressé” que les autres personnages, je pencherais donc pour de l’image de synthèse très bien faite, et beaucoup de post-prod dans un soft de retouche d’image, pour ne pas citer de marque. »

Ghislain : « Ce n’est pas Jack Lang. »

Lucie : « – Visage figé, cadrage vraisemblablement trop bas et format inadapté
– Correction chromatique, dominance de la couleur mauve (ambiance festive / nocturne)
– Sujet immobile et figé, aucun flou de mouvement
– Problème d’exposition sur le visage malgré un beau travail de grain pour homogénéiser l’incrustation. »

Zoé : « Un grand espace vide qu’on dirait fait exprès pour y incruster qui on veut sans se fouler ; et le cliché a l’air d’avoir subit trois passages coup sur coup aux tons automatiques, le tout recouvert d’un ou deux filtres “bruit” et “grain”, utile dès qu’on veut cacher des différences de chromie et de définition flagrantes entre deux images. Caught. »

Jules : « C’est compliqué de trafiquer une photo dans une ambiance nocturne avec des lights roses. L’appareil monte en ISO, y’a du grain, et bidouiller du grain pour faire un montage photoshop complique l’affaire. En tous les cas, une chose est sûre, la meuf derrière lui a vraiment besoin de boire de la flotte. »

Paul : « Ok celle-ci a l’air plutôt legit. On y voit l’auteur de Faire la révolution fiscale (2006, Plon) visiblement à bord du bateau de la Concrete, plus précisément de “la salle du bas” pour les connaisseurs. Ce qui me pousse à dire que cette photo est potentiellement vraie et que Jack Lang était bel et bien à la Concrete, c’est ce petit sourire faiblard sur son visage, et ce regard dans le vague qu’on peut retrouver sur le visage du clubber fatigué, quand la nuit touche à sa fin, qu’il réalise subitement que tous ses potes sont partis depuis déjà plusieurs heures et que la fille cool, celle avec la jolie plume dans les cheveux et le point rouge sur le front (comme ils ont en Inde) est en train d’embrasser un grand mec torse nu qui n’a pas dormi depuis trois jours, et qu’ils dansent comme des fous, elle avec ses cheveux mouillés qui virevoltent au son de la basse, lui avec son tatouage “we’ll sleep when we’re dead” qui apparaît et se dissipe en rythme sur les lumières des stroboscopes, unis à jamais dans leur amour pour la techno qu’on joue sur vinyle. Bref. Ceci étant dit, y’a un truc très bizarre avec les lunettes de la fille à droite ? Ont-elles été dessinées par dessus la photo pour masquer l’identité d’une personne qui ne devait pas se trouver là ? Je ne sais pas. »

Ghislain : « C’est bien Jack Lang mais est-ce la Concrete ? Je n’en sais rien, je n’y suis jamais allé… »


Rod Glacial, non plus. Mais il est sur Twitter.