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L’extrême droite autrichienne en tête au premier tour des élections présidentielles

L’extrême droite autrichienne a remporté une série de victoires au terme du premier tour des élections présidentielles de ce dimanche. Norbert Hofer, le candidat anti-immigration du Parti de la liberté (FPÖ), a remporté près de 37 pour cent des voix loin devant les cinq autres candidats lors de ce scrutin.

Le deuxième tour de cette élection aura lieu le 22 mai, lors duquel Norbert Hofer devrait affronter le candidat du Parti Écologiste Alexander Van der Bellen. Pour gagner dès le premier tour, un candidat doit obtenir plus de 50 pour cent des votes afin d’être nommé chef de l’État — un rôle qui est essentiellement honorifique en Autriche.

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Toutefois, ces résultats reflètent la frustration des Autrichiens vis-à-vis de leurs dirigeants et de leur réponse face à la crise des réfugiés en Europe. Pour la première fois depuis 1945, l’Autriche aura un président n’appartenant ni aux Sociaux-démocrates (centre-gauche) ni au Parti populaire (de centre-droit).

Norbert Hofer a largement distancé les candidats de ces deux partis — les Sociaux-démocrates et le Parti populaire. Le dernier arrivé au premier tour s’appelle Richard Lugner, un magnat de la construction de 83 ans habitué des soirées mondaines qui est connu pour inviter des célébrités à l’accompagner à l’Opéra d’État de Vienne.

Les résultats de dimanche constituent la plus grande victoire du FPÖ de Hofer depuis la création de ce parti après la Seconde Guerre mondiale.

Marine Le Pen, la présidente du Front National, a envoyé ses félicitations à Hofer via Twitter, saluant dans les médias une « prise de conscience » des citoyens en Europe.

Norbert Hofer, qui a déclaré qu’il emportait presque toujours un pistolet Glock avec lui pour se protéger des réfugiés, est considéré par les médias germanophones comme le visage amical du FPÖ, moins agressif que celui d’Heinz-Christian Strache, le leader du parti.

Pourtant, Hofer veut expulser tous les réfugiés de son pays, bannir le voile islamique et considère que l’Autriche devrait quitter l’Union européenne.

Comme dans d’autres pays européens, les analystes attribuent l’effondrement des partis traditionnels à la montée d’un sentiment xénophobe, qui grimpe en flèche face à l’arrivée massive de demandeurs d’asiles originaires de pays en guerre, comme la Syrie et l’Irak.

En septembre dernier, les cadres de la coalition autrichienne avaient soutenu la Chancelière allemande Angela Merkel dans son souhait d’adopter une réponse morale en autorisant les migrants à demander l’asile en Europe.

Le Chancelier démocrate autrichien Werner Faymann avait même rejoint Merkel dans son réquisitoire farouche contre les autorités hongroises, qui étaient moins disposées à accueillir le flux de migrants et avaient érigé un mur à la frontière pour les tenir hors de leur territoire.

Quelques mois après, les autorités autrichiennes semblent avoir fait volte-face.

Avant l’important sommet européen sur la crise migratoire de février dernier — lors duquel les leaders européens ont eu l’opportunité de trouver une réponse commune face à l’afflux de migrants —, l’Autriche s’est retirée et a annoncé qu’elle imposerait une limite au nombre de réfugiés qu’elle accepterait sur son territoire. L’Autriche a également installé une barrière longue de 2,5 kilomètres le long de sa frontière avec la Slovénie et a déployé des militaires à ses autres frontières.

Ces décisions n’ont toutefois pas suffi à conserver la confiance des Autrichiens dans la coalition gouvernementale des partis politiques.

« Les gens sont vraiment malheureux avec ce gouvernement », a déclaré le politologue Eric Frey au journal Deutsche Welle. « Ils sont bouleversés par la façon dont le gouvernement a géré la crise des réfugiés, ce qui a aggravé les choses pour de nombreux Autrichiens qui souffrent déjà de la hausse du chômage dans le pays, du déficit budgétaire croissant, et des dysfonctionnements du système d’éducation. »

Comme dans d’autres parties de l’Europe, les politiciens d’extrême droite ont misé sur le sentiment de marginalisation de certains Autrichiens, et ont fait des réfugiés le bouc émissaire de leurs frustrations. En juin 2015, il y avait 60 747 réfugiés vivant en Autriche, ainsi que 30 000 demandeurs d’asile. Depuis, les attaques visant ces nouveaux arrivants ont augmenté.

Plus tôt ce mois-ci, 30 personnes se revendiquant du mouvement de la jeunesse d’extrême-droite — la « mouvance identitaire » — ont pris d’assaut un théâtre à Vienne qui accueillait une pièce mettant en scène un casting entièrement composé des réfugiés venus de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan. Les manifestants — en majorité des hommes—, ont couru sur la scène, ont jeté du faux sang dans le public ainsi que des tracts sur lesquels était écrit « le multiculturalisme tue ». Le groupe a également déployé une grande banderole où l’on pouvait lire « Hypocrites : Notre résistance à votre décadence. »

En 2015, les centres d’accueil autrichiens ont été attaqués 25 fois. Lors de certains incidents, de la propagande nazie a été affichée autour des installations. Des réfugiés ont par ailleurs essuyé des tirs de carabine à air comprimé. Des feux d’artifice ont parfois été utilisés, et des incendies volontaires ont été relevés. Selon des médias locaux autrichiens, une seule province du pays a été épargnée par ces attaques contre les camps de réfugiés, sur les neuf États que compte ce pays.

La xénophobie rampante se fait par ailleurs ressentir dans certains discours politiques. Robert Lugar — ancien membre du FPÖ et actuel président du mouvement d’extrême droite Équipe Stronach — a comparé les demandeurs d’asile à des « Néandertaliens ». Lugar a également proposé que tous les demandeurs d’asile de sexe masculin âgés de plus de 14 ans être soient obligés de se soumettre à des tests ADN, au cas où ils deviendraient des délinquants sexuels à l’avenir.

Tous les Autrichiens ne partagent pas ces points de vue, et il y a beaucoup de citoyens ont été déçus par la décision du gouvernement de renforcer ses frontières. En mars dernier, près de 6 000 personnes ont défilé à Vienne sous le slogan « Bienvenue aux réfugiés, Non à la forteresse européenne ».

La question de l’immigration divise, et cela se reflète dans la coalition politique autrichienne. Thomas Hofer, un consultant politique indépendant spécialisé dans les affaires publiques, a déclaré au journal Deutsche Welle que la crise des réfugiés « trahit les querelles entre les partis » et, ce faisant, « approfondit et accélère la fissure ».


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