Musique

La très sensible néo-soul de Léonie Gray

Sur « Sensitive », son premier EP autoproduit, Léonie Gray ramène l’esprit des jazz bars de New York.
leoniegray

Une de mes tâches préférées et les plus intéressantes de mon métier est de parcourir les line-ups de festival. J'écoute chaque artiste pour trouver les prochaines perles rares. C'est encore plus amusant à faire pour des festivals locaux, vu que ça me permet de trouver des artistes émergents. Dans le cas de la programmation du festival Santa Teresa, qui se tient ce week-end à Sainte-Thérèse, on trouve le nom de Léonie Gray, une jeune chanteuse montréalaise qui fait de la neo soul pop très rafraîchissante.

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Ce qui frappe avant tout chez Léonie, c'est qu'elle a quelque chose de vintage dans son caractère. Pas d'une manière corny, comme ces gens qui fétichisent l'idée du passé. Ce côté vintage se fait sentir ni dans son esthétique ni dans ses choix musicaux, mais plutôt dans l’esprit de sa musique. La chanteuse de 26 ans a aiguisé ses talents dans des bars de jazz, avec des orchestres de restaurant, et est entrée au studio faire quelque chose de totalement nouveau et différent.

« Ça t’apprend vraiment à gager ton public, surtout. Surtout dans des bars, où il y a des gens plus intenses, qui ont moins d’inhibitions, donc ça t’apprend comment composer avec des situations comme ça, explique-t-elle. Aussi, quand t’es dans un bar ou un restaurant où les gens ne viennent pas nécessairement pour voir une performance, ou s’ils ne savent pas qui tu es, ça t’apprend à connecter de la bonne manière avec les gens qui vont t’écouter, et ça me prépare pour des plus grandes scènes, où je suis plus à l’aise. »

Il faut dire qu’elle était en quelque sorte prédisposée à faire de la musique. Fille d’un musicien qui a beaucoup tourné dans les années 80, elle sait depuis sa jeune enfance qu’elle désire être chanteuse, et n’a pas vraiment dérogé de son parcours. Originaire de Lavaltrie, dans Lanaudière, elle a déménagé en ville il y a maintenant huit ans, expressément pour entamer une carrière musicale qui n’aurait pas été possible si elle était restée dans sa ville natale.

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Entièrement dévouée à son art, elle est presque autodidacte, n’ayant pris que des cours de chant classique à l’adolescence et des leçons de piano l’an dernier pour la toute première fois. « Quand j’avais six ou sept ans, j’ai demandé à mes parents de m’inscrire à des cours de chant, mais mon père trouvait qu’il était important que je me développe musicalement avant de me faire inculquer quoi que ce soit, de me faire imposer une certaine façon de voir la musique, explique Léonie Gray. C’est certain que j’aurais pu aller à l’école en musique, et je pourrais toujours le faire plus tard, mais, pour l’instant, c’est pas mal ça ma formation. »

C’est donc à l’ancienne et sur le tas, style Édith Piaf ou Amy Winehouse, que Léonie a appris à faire de la scène, se produisant dans des salles comme le House of Jazz, La marche à côté, ou encore L’Escalier. Si la plupart des jeunes artistes délaissent ce parcours plus traditionnel pour parfaire leur art en studio, Léonie Gray décide plutôt de travailler inversement, s’inspirant de ses expériences scéniques pour ses compositions. « Il y a souvent des tounes que je vais essayer en live avant de les sortir. Je comparerais ça à un humoriste qui fait du rodage avant un grand spectacle. »

En parallèle de ses compositions solos, elle publie depuis quelques années sur YouTube des reprises.

Il y a quelques semaines, la chanteuse a fait paraître Sensitive, un premier EP autoproduit, sur lequel elle a planché pendant près d’un an. « Ce que je voulais, c’était d’écrire, composer, produire et mixer mon projet moi-même, vu que j’avais pas les connaissances nécessaires pour le faire. Je suis habituée de faire une partie du travail en studio, donc c’était un processus différent, mais j’aimais l’idée de partir de rien pour le faire. Ça m’a tellement appris de choses, comme utiliser certains logiciels de production. Ça me donne une indépendance musicale. »

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Sur Sensitive, Léonie montre une vaste étendue vocale, alternant entre des falsettos vertigineux et une voix rauque et jazzée, sur un fond qui mélange de sensibles accords au piano et une section rythmique aux sons plus contemporains et expérimentaux. Le tout donne un très cohésif petit EP neo soul qui distille l’esprit des jazz bars new-yorkais d’antan, mais projeté dans un présent où le R’n’B côtoie l’électro.

Pour son passage au festival Santa Teresa, la chanteuse s’est d’ailleurs entourée de musiciens, ce qui ajoutera sans aucun doute de la profondeur à sa performance, qui s’enligne pour être une des plus belles découvertes du week-end.

Billy Eff est sur internet ici et .