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FRANCE

Avant l'arrivée de la délégation ministérielle, la Guyane au ralenti

La « journée morte » de ce mardi a eu le succès escompté. Selon la préfecture, il s'agit de « la plus grosse manifestation » de l'histoire de la Guyane.
Vue aérienne de Cayenne / Photo via Wikimedia Commons

La « journée morte » a eu le succès escompté. Entre 8 000 et 10 000 personnes ont manifesté ce mardi dans les rues de Cayenne. Ils étaient 3 000 à 4 000 à Saint-Laurent-du-Maroni, la deuxième ville de Guyane, département de 250 000 habitants. Les commerces et les institutions étaient au ralenti. Selon la préfecture, il s'agit de « la plus grosse manifestation » de l'histoire de la Guyane. Air France a annulé tous ses vols vers le territoire ultramarin pour le moment.

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Tous les corps sociaux sont mobilisés dans une « grève générale illimitée », à l'appel du collectif Pou la Gwiyann dékolé (Pour que la Guyane décolle) : agriculteurs, professeurs, juges ou encore commerçants. La grève a commencé ce lundi à l'appel de l'Union des travailleurs guyanais (UTG), un collectif de 37 syndicats. Plusieurs marches sont prévues ce mercredi dans les grandes villes du département.

— La1ere.fr (@la1ere)March 28, 2017

En première ligne, les « 500 frères », un collectif cagoulé et vêtu de noir qui dénonce le taux de criminalité élevé en Guyane, département le plus violent de France. Depuis leur apparition impressionnante devant Ségolène Royal, leurs revendications ont été largement diffusées sur les réseaux sociaux. Forts du soutien de la population guyanaise, leurs méthodes divisent, notamment en métropole.

À lire : En Guyane, les « 500 frères » se mobilisent contre la criminalité

L'ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira, a appelé les membres du collectif à retirer leurs cagoules pour négocier. « Il n'est pas concevable qu'ils ne soient pas à visage découvert », a-t-elle déclaré à RTL. Plus tôt, le ministre de l'Intérieur, Mathias Fekl, avait lui aussi fait part de ses réserves quant à l'accoutrement des « 500 frères » : « On ne dialogue pas en cagoule. On dialogue le visage découvert. Il faut que la confiance soit présente ».

L'insécurité reste le problème numéro 1 en Guyane. Comme nous l'expliquait le chercheur Cédric Andriot, les causes de cette insécurité sont à la fois politiques, sociales et historiques. Près de 22 pour cent de la population est au chômage (jusqu'à 50 pour cent pour les jeunes), les armes circulent à foison et les institutions policières et judiciaires sont devenues vétustes. Les « 500 frères » réclament donc un renforcement de ces institutions et des mesures précises telles que l'application de l'état d'urgence en Guyane, l'éradication des squats, la surveillance accrue des frontières et la construction d'une deuxième prison.

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Au-delà de la question sécuritaire, les manifestants réclament un grand plan social de relance de la Guyane. Les domaines les plus « défaillants » sont l'éducation, la formation professionnelle et la santé, selon Nestor Radjou, économiste guyanais interrogé par Franceinfo. Les Guyanais se plaignent d'avoir été oubliés par l'État français, vu comme un « partenaire extérieur », selon Cédric Andriot.

15 000 familles sont placées sur liste d'attente pour les logements sociaux, ce qui multiplie la création de bidonvilles et de squats. Près de 40 pour cent des jeunes sortent du système scolaire sans diplôme au-delà du brevet des collèges, rappelle de son côté Le Monde. Les nombreux problèmes sociaux sont d'autant plus inquiétants que la population guyanaise est appelée à doubler dans les quinze prochaines années, du fait d'une immigration importante et d'une explosion de la démographie.

Une première délégation envoyée par la France s'est rendue en Guyane. Elle a été sèchement accueillie par les « 500 frères ». Le collectif a exigé la présence de ministres. Matthias Fekl, ministre de l'Intérieur, Ericka Bareigts, ministre des Outre-mer, sont attendus en Guyane ce mercredi.

En 2013, François Hollande avait promis la signature d'un « Pacte d'avenir » lors de sa venue en Guyane. Depuis cette date, le texte est discuté à l'Assemblée de la collectivité territoriale de Guyane, à Cayenne. Le plan prévoit quatre milliards d'euros d'investissements sur quinze ans, dont la construction de routes, d'un commissariat à Cayenne, de projets énergétiques, comme le détaille Guyane 1ère.


Suivez Bartolomé Simon sur Twitter : @iLometto