Chez les disciples du messie cosmo-planétaire
L'entrée du Mandarom. Toutes les photos sont de Franck Bessière/Hans Lucas

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Chez les disciples du messie cosmo-planétaire

Une visite du Mandarom, qui réunit les adeptes de l’aumisme – un mouvement religieux considéré comme sectaire –, au beau milieu des Alpes de Haute-Provence.
Glenn Cloarec
propos rapportés par Glenn Cloarec

L'Aumisme est un mouvement religieux considéré comme une secte, qui a pour concept de réunir toutes les religions monothéistes. J'ai découvert son existence dans les années 1990, à l'époque où l'Aumisme venait d'être classé comme mouvement sectaire suite à un rapport de la commission d'enquête parlementaire sur les sectes. Quand j'ai découvert que le Mandarom – le centre spirituel où se regroupent nombre des adeptes de l'Aumisme – existait toujours, j'ai décidé de m'y rendre en juillet 2016 en tant que « touriste » pour prendre quelques images – sachant qu'ils n'aiment pas particulièrement les journalistes. Le Mandarom se trouve dans les Alpes de Haute-Provence, près de la ville de Castellane. Selon un moine que j'ai interrogé à ce sujet, il y aurait une énergie particulière dans cette commune, qui regroupe plusieurs sites religieux remarquablement préservés. Chaque visite est payante et coûte cinq euros. Quand je m'y suis rendu, ils en organisaient deux par jour, et tout était encadré par un moine ou une sœur – lesquels sont habilités à répondre aux questions des visiteurs, tout en tentant de les faire adhérer à leurs causes.

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Sur place, on a l'impression d'être dans un décor de cinéma des années 1980. On peut trouver à la fois des Christ armés de glaives et de boucliers, des archanges à pistolets laser, des Bouddhas, un minaret et l'étoile de David. Il y a aussi plusieurs lieux dédiés à la prière, une synagogue et une mosquée – qui sont bariolées de signes peu orthodoxes et ne ressemblent pas vraiment à celles qu'on peut voir à l'extérieur de la cité –, ainsi que des dortoirs pour ceux qui y résident de manière permanente. Dans leurs pratiques, les Aumistes sont relativement proches de l'hindouisme, bien qu'ils reprennent différents éléments de chaque religion. Ils croient notamment en la réincarnation par palier d'élévation, l'animal de compagnie étant le « presque humain ». Ils sont strictement végétariens, ne portent pas de cuir, mais ne sont pas végétaliens pour autant.

J'ai aussi été surpris de voir qu'il restait plusieurs statues à l'effigie de Gilbert Bourdin, fondateur du mouvement qu'ils appellent « Hamsah Manarah » ou encore « messie cosmo-planétaire ». En septembre 2001, une statue de 33 mètres qui portait son visage a été dynamitée suite à une décision de la cour de cassation, ce que nombre de ses disciples avaient déploré. Décédé en 1998 après avoir été accusé et mis en examen pour viol sur deux de ses adeptes, Bourdin était censé être la seule personne capable de faire accéder les moines à « l'élévation ultime ». Mais depuis sa mort, personne n'a été nommé pour le remplacer – pas même son fils. La communauté des Aumistes a une présence internationale : certains adeptes se trouvent au Canada, en Suisse, en Belgique, en Hollande ou en Afrique – et en 2014, le mouvement revendiquait 1 200 membres à travers le monde. Je pense qu'en réalité, ils sont plutôt proches des 400, dont une cinquantaine au Mandarom, qui constitue en quelque sorte le centre spirituel de leur communauté. Certains vivent de manière tout à fait normale et viennent simplement s'y recueillir pendant plusieurs jours. D'autres y vivent de manière monacale et logent dans de très petits appartements, et passent leur journée à prier et à entretenir la cité sainte. Ils font tous les travaux eux-mêmes – qu'il s'agisse de la maçonnerie ou de l'entretien des espaces verts. À force de discuter avec eux, j'ai quand même été déconcerté par leur embrigadement. S'ils ne sont pas vraiment dangereux, le côté messianique de ce mouvement a quelque chose de très dérangeant.

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Franck Bessière est un photojournaliste français basé à Marseille et membre du studio Hans Lucas. Retrouvez-le sur son site.