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LE NUMÉRO CLOWN

Remballe ton fun

Si j’étais noir, tatoué et baraqué, je me baladerais toujours en slip.

Si j’étais noir, tatoué et baraqué, je me baladerais toujours en slip. Sur scène, le chanteur d’Oxbow se désape petit à petit pour déambuler au milieu de ses musiciens en gémissant, en se bavant dessus et en se malaxant le pénis. L’expression se mettre à nu prend tout son sens dans cette musique brute, rampante et sensuelle, mélangeant rock noise et blues. On en tire le même plaisir qu’en retirant la crasse qui se loge entre nos doigts de pied et sous nos ongles. On a essayé de savoir, avec Eugene, le chanteur, s’il fallait vraiment être perturbé pour aimer Oxbow. La réponse est oui. Vice : Ça y est, vous retournez enfin chez vous, à San Francisco. Alors, c’était comment cette tournée européenne ? Eugene : C’était très sympa. Enfin, je sais pas si sympa est un mot approprié pour parler de la musique d’Oxbow, mais bon, je veux dire par là que personne ne s’est fait tirer dessus et que personne ne s’est fait planter – enfin de ce que j’en sais – alors ça va. Parce que votre musique provoque généralement ce genre de comportements ? Oh, ce sont des choses qui arrivent. Mon histoire préférée, c’est celle d’un mec qui s’est mis à se battre avec sa copine pendant notre show. Ensuite il l’a poursuivie, l’a sortie de force de la voiture en marche, et la poursuite a continué dans la rue pendant que la caisse se retournait sur le bas-côté et prenait feu. Le mec a ensuite appelé la police en disant qu’on lui avait volé sa voiture, et a blâmé Oxbow. Tranquille le mec, t’as appris ça au poste ? Non, c’est mon tatoueur qui m’a raconté l’histoire, c’était un de ses potes. Il m’a d’ailleurs appris que ce mec était flic. Enfin plus maintenant, à cause de ça il a été viré. Je crois que c’est l’histoire la plus improbable qui soit arrivée. Généralement, les fans d’Oxbow se suicident. OK, c’est ma dernière interview, donc. C’est arrivé trois ou quatre fois alors… peut-être. Sur les lettres que ces gens nous ont envoyées, ils nous disent que notre musique sera leur bande-son pour « quitter la planète ». C’est assez bizarre. Mais d’un autre côté, on a l’histoire d’une femme qui était en phase terminale d’un cancer, puis qui a découvert Oxbow et qui est maintenant en rémission. Ceci dit, votre dernier album est un peu plus apaisé, plus sensuel et plus riche. C’est vrai. On a pu utiliser des instruments que l’on n’avait jamais exploités. Mais bon, peut-être qu’en fait les gens ne l’écoutent que pour baiser et que du coup ils s’en foutent. Pas étonnant, Oxbow, c’est un peu une musique qui mélange sexe animal et bagarre. Où as-tu eu l’idée de gémir en musique au lieu de chanter comme tout le monde ? Ce que tu écoutes dépend de ta personnalité et de ton humeur. Et j’ai très vite réalisé qu’il n’y avait rien qui se faisait qui correspondait à la musique que j’entendais en moi. Alors j’ai tenté un truc. À ce moment-là, ce que j’avais en moi, c’était l’idée de me suicider, alors j’ai tenté d’expliquer pourquoi je voulais ça, en musique. Et j’ai noirci des tonnes et des tonnes de feuilles, écrit des tonnes et des tonnes de mots à propos de ce pourquoi. Avec la musique qu’a composée Niko, notre guitariste, ça a donné l’album Fuckfest, en 1990. Et les gémissements, c’est ce que je ressentais, ce que j’étais. Et partout on disait : « Mais, il chante même pas ! » Je savais que je chantais pas, mais pourtant je pensais que je chantais. Euh, j’hésite à comprendre. Et sinon vous vivez de votre musique ? Non, non, on travaille tous à côté. C’est pour ça ton costard cravate, tu pars bosser, là ? C’est un peu ça. Pour être plus précis, j’ai tapé handsome man sur Google, et ça m’a donné cette image-là. Je vois, mais si c’est pour te mettre en slip sur scène, quel intérêt ? Oui, finalement ça sert à rien. The Narcotic Story, le dernier album d’Oxbow, est sorti sur Hydra Head.

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