guerre au yémen

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reportage

Yémen, année zéro

Un an après le début des bombardements saoudiens, nos correspondants reviennent sur la destruction et l'horreur dont ils ont été témoins.
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Des Houthis à Sa'dah, au Yémen. Photo de Spencer Chumbley

Nous nous sommes rendus au Yémen à deux reprises au cours des deux dernières années. Une première fois en 2014, avant que les Houthis ne s'emparent du pouvoir, puis une nouvelle fois en septembre 2015, après les frappes aériennes saoudiennes dévastatrices. Le 26 mars dernier marquait « l'anniversaire » du début de la campagne militaire saoudienne. Le récit ci-dessous est un compte rendu de notre reportage.

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Nous traversons une rue située dans le centre de Sanaa, la capitale du Yémen. La ville est plongée dans le noir – malgré quelques bougies aux fenêtres et les phares de voitures roulant à toute allure.

Nous voulons manger un kebab dans la vieille ville. Les jeunes hommes qui cuisinent nous sourient, alors que le bruit sourd et familier des frappes aériennes se fait entendre. À Sanaa, les tirs de missiles ne sont pas aussi effrayants que ceux dont nous avons été témoins dans le Nord – parce qu'ils sont prévisibles et frappent souvent les mêmes endroits au même moment.

Pourtant, alors que nous rentrons à notre hôtel le ventre plein, un avion de chasse nous survole. Un bruit de sifflement terrifiant emplit la rue, aussi fort que le tonnerre. Quelque chose explose juste devant nous. Nous nous réfugions dans une boutique. Le sol est jonché de verre. Je porte sur mes épaules le neveu d'un ami – âgé de quatre ans – et je lutte pour rester debout.

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Épave d'un avion à l'aéroport de Sanaa. Photo de Peter Salisbury

Les conséquences de cette campagne de bombardements sont visibles dès que l'on arrive à Sanaa. À l'aéroport de la ville, plusieurs avions détruits reposent sur le tarmac, près de la piste principale. Les bases militaires, les écoles d'officiers et les dépôts d'armes qui se trouvaient à proximité ont été anéantis.

Des logements ont été détruits, souvent sans raison, de même que certaines infrastructures cruciales. Parfois, des endroits sont ciblés plusieurs fois ; une maison appartenant au fils de l'ancien président Ali Abdallah Saleh a été frappée à de nombreuses reprises en l'espace de quelques semaines, alors qu'elle était déjà réduite à néant et abandonnée.

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Selon les chiffres de l'ONU, la guerre au Yémen a déjà fait plus de 9 000 morts, les civils étant les premiers touchés. Toutefois, l'ONU évoque uniquement les personnes décédées dans un centre médical – ce qui revient à admettre que le bilan humain est encore plus lourd. Beaucoup de ces décès sont imputables à la coalition militaire dirigée par l'Arabie saoudite.

Cette guerre est un conflit de grande ampleur. Elle a débuté lorsque les Houthis se sont emparés de Sanaa début 2015. Abd Rabbo Mansour Hadi, le président au pouvoir, s'est alors réfugié dans la ville portuaire d'Aden. Dans les régions montagneuses du nord du Yémen, le coup de force des Houthis a été bien accueilli – notamment grâce au soutien de forces restées fidèles à l'ancien précisent Saleh – mais à Aden et dans la ville de Ta'izz, les civils ont pris les armes pour les repousser. Le président Hadi a fini par demander de l'aide aux dirigeants des pays du Golfe.

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Ben Anderson examine une bombe à sous-munitions fabriquée aux États-Unis. Photo de Spencer Chumbley

L'Arabie saoudite a longtemps considéré les Houthis comme des mandataires du Hezbollah – fidèle allié de l'Iran qui, selon elle, a l'intention d'étendre son pouvoir en consolidant son contrôle sur l'Irak, le Liban, la Syrie et le Yémen. Effrayés par un potentiel encerclement, les Saoudiens ont aidé Hadi à échapper aux Houthis et ont annoncé qu'ils mèneraient une coalition militaire comprenant des États à majorité sunnite. Les États-Unis, qui se méfiaient de la perspective d'une autre guerre par procuration, ont tout de même accepté de soutenir la coalition afin de rafistoler leurs relations avec les pays du Golfe, inquiets après la signature de l'accord nucléaire iranien.

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Au début de la guerre, les Saoudiens n'avaient aucun doute quant à leur victoire rapide, mais leur optimisme a rapidement laissé place à la crainte de voir le conflit s'enliser – ce qui s'est produit.

De leur côté, les Houthis ont délibérément bombardé les populations civiles à Aden et Ta'izz, réduisant l'accès à la nourriture, à l'eau, au carburant et aux fournitures médicales, transformant les rivalités géographiques et sectaires en une haine qui ne s'apaisera pas avant plusieurs décennies. Dans le nord-ouest du pays, que nous avons parcouru, les combats au sol sont rares – la principale menace vient du ciel, sous la forme de bombes larguées par la coalition arabo-sunnite. La colère est forte à l'encontre de Riyad, Washington et de l'ONU, coupables d'avoir permis à ces bombes de s'écraser en toute impunité, punissant une population civile pour les agissements d'une milice et d'un ancien président corrompu – Saleh – qu'ils n'avaient aucun intérêt à soutenir.

Septembre 2015. Nous nous baladons dans la vieille ville de Sanaa. Nous parcourons des rues pavées qui serpentent autour de petites maisons richement décorées. Avec ses cent mosquées, ses hammams, ses nombreuses bâtisses qui datent d'avant le XIe siècle et ses maisons-tours à plusieurs étages, ce quartier est inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Il est soi-disant protégé en raison de sa valeur exceptionnelle. Cinq maisons sont pourtant réduites en miettes.

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Le vieux marché de Sa'dah. Photo de Peter Salisbury

Un vieillard nommé Mujahid Al-Aini est assis sur un petit tapis poussiéreux sis près des décombres de l'une des maisons. Elle appartenait à son frère. Il y vient tous les jours depuis qu'elle a été frappée par les bombes – il éloigne les enfants, de peur que les murs restants ne s'effondrent.

« Mon frère dînait avec ses enfants lorsqu'un avion a largué un missile, me raconte-t-il. Tout le monde est mort. Ses quatre filles, sa femme et lui. »

Il s'est précipité sur les lieux dès qu'il a appris la nouvelle. Avec l'aide de ses voisins, il a fouillé les décombres à la recherche d'éventuels survivants. Ils ont commencé à creuser à 22 heures et se sont arrêtés à 7 heures, quand ils ont déterré le denier corps. Je lui demande ce que son frère faisait dans la vie. « Il n'avait aucun lien avec les Houthis, dit-il. Mon pauvre frère vendait des légumes et des tomates. Il ne soutenait aucun parti. »

Les maisons près de chez M. Al-Aini sont gravement endommagées et ont l'air abandonnées. D'après Mujahid, les voisins ont peur de rester dans le coin. « Tout le monde a déserté », précise-t-il.

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Un vendeur de café et d'épices dans les décombres de sa boutique située à Sa'dah. Photo de Spencer Chumbley

Les dégâts à Sanaa ne sont en rien comparables à la situation dans le nord du pays. Autour de Sa'dah, le fief des Houthis, des villages entiers ont été réduits en cendres. Au tout début de la guerre, les Saoudiens avaient distribué des tracts exhortant les habitants à quitter les lieux. La province avait été déclarée « cible militaire ».

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Le blocus aérien, maritime et terrestre mis en place par la coalition menée par l'Arabie saoudite restreint l'approvisionnement en carburant et en produits de base. L'économie s'est effondrée. Certains habitants que nous croisons ne peuvent pas se permettre d'acheter un ticket de bus pour se rendre à la clinique la plus proche.

Nous avions prévu de nous rendre dans le nord du pays quand nous avons appris qu'une fête de mariage avait été prise pour cible près de Moka, une ville située sur les bords de la Mer Rouge. Nous nous rendons donc là-bas dès le lendemain matin. Quand nous arrivons, les habitants sont encore terrifiés.

Un homme mince à la longue barbiche rouge se présente. Il s'appelle Saeed Ali. Il nous fait faire le tour des lieux et nous explique la situation tout en nous montrant les cratères créés par les trois missiles. Aussitôt, un avion rugit au-dessus de nos têtes. Les gens se réfugient dans des bâtiments proches, terrifiés.

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Une station essence touchée par une frappe aérienne qui a fait 21 morts, à Sa'dah. Photo de Spencer Chumbley

Une fois l'avion disparu, Saeed poursuit sa visite : « Il y a de la chair partout. Là, c'est un crâne. Tout ça, c'est de la chair humaine. » Il se dirige vers des arbres et des buissons. « Ces arbres sont remplis de chair, dit-il. Il y a des jambes, des bras. » Nous pouvons apercevoir un morceau de peau brûlée qui pend à une branche. Je retrouve une mâchoire – la rangée de dents inférieures y est encore attachée.

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Une petite femme âgée enveloppée de la tête aux pieds dans un châle vert s'approche de nous. Elle tient dans les mains ce qui semble être un bout de cerveau. Il est calciné. « Les avions ont laissé ça et sont partis », dit-elle en jetant le cerveau par terre. Saeed le recouvre de sable et conseille à la femme de rentrer. Elle s'éloigne, pointe son doigt vers le ciel, et dit : « Ils ont tué tout le monde. Mes enfants, ma sœur, et toute ma famille. »

L'une des cibles des bombardements était la cabane où les hommes s'étaient rassemblés avant le mariage. Elle fait à peine trois mètres de large, mais le missile a atterri en plein centre. Les coussins prévus pour les invités sont maculés de sang. Des mouches se délectent de restes humains. On nous précise que la première frappe a rapidement été suivie d'une seconde. Après celle-ci, les femmes invitées s'étaient réfugiées dans une autre cabane – frappée peu de temps après par un troisième missile.

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Un homme tient un éclat d'obus suite à une frappe aérienne, à Sa'dah. Photo de Peter Salisbury

Un villageois précise qu'il a trouvé les jambes d'une femme, le torse d'une autre et ce qui semble être le sternum d'une troisième. Les habitants ont rassemblé la plupart des restes humains afin de les enterrer à proximité. Ils nous montrent où sont situées les tombes – anonymes, évidemment.

Un autre homme nous invite chez lui. À côté de sa petite bâtisse se trouve une cabane en bois construite à partir de branches, sans portes. À l'intérieur, un lit mutilé. Du sang se mêle à la boue. L'homme nous raconte que sa mère, âgée de 70 ans, a presque été coupée en deux quand un gros éclat d'obus a traversé le mur de la cabane. Ses deux enfants ont également été tués, de même que son frère et sa sœur. Un autre avion nous survole.

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Des enfants dans la tranchée où ils dorment depuis deux mois, tenant un morceau d'une bombe à sous-munitions de fabrication américaine

« Ils volent au-dessus de nous depuis 20 jours, 24 heures sur 24 », déclare l'un des habitants en pleurant. « Jour et nuit. Les enfants deviennent fous. Nous devenons tous fous. Nous n'en dormons plus la nuit. » Après nous avoir parlé, il grimpe sur une mobylette. Il va voir des passeurs pour leur demander s'ils peuvent lui faire traverser la Mer Rouge avec les membres restants de sa famille, jusqu'à Djibouti.

Le général Ahmed al-Asiri, porte-parole de la coalition saoudienne, a nié la responsabilité de l'attaque de Moka, déclarant à Reuters : « La coalition n'a mené aucune opération aérienne dans cette région depuis trois jours. C'est une information complètement erronée. »

Le lendemain, nous nous rendons à Sa'dah. Sur la route, des ponts sont détruits, des stations-service réduites à néant, des camions éventrés. Dans un camp pour réfugiés, beaucoup affirment que la campagne environnante a été « aplatie ». Le camp, dressé sur un monticule poussiéreux de terre stérile, abrite 600 personnes, qui vivent dans des tentes de fortune. Ils brûlent des bouteilles en plastique et du polystyrène afin de cuire leur pain, car le carburant est devenu trop cher.

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Camp pour réfugiés situé dans la province d'Amran. Photo de Peter Salisbury

Je demande à Abdo Ali Salem al-Obali, le « cheikh » autoproclamé du camp, la raison de sa fuite. « Partout où ces bombes ont atterri, tout a été détruit, dit-il. Des gens sont morts. Personne n'a été épargné. Aucun magasin n'a été épargné. Nous nous sommes enfuis sans rien. Ils ont brûlé notre village et maintenant nous sommes ici. »

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Dans un hôpital géré par Médecins sans frontières, l'équipe médicale est dépassée par l'afflux de patients blessés ou sous-alimentés. Une famille est rassemblée autour d'un bébé qui gémit. Sa jambe droite n'est plus qu'un moignon bandé. Son corps entier est recouvert de brûlures et de coupures. Sa mère, couverte d'entailles engendrées par des éclats d'obus, m'explique la situation.

« L'un de mes enfants est mort et l'autre a la jambe coupée, dit-elle en sanglotant. Ils n'ont attaqué aucun camp militaire. Ils ont tué des femmes, des enfants, des personnes âgées et des jeunes. »

Pour les Saoudiens et leurs alliés, la destruction du Yémen est justifiée. Selon eux, il faut rétablir le gouvernement yéménite légitime au pouvoir et annihiler la menace de futures attaques. Il y a peu, la coalition annonçait la fin prochaine des « opérations militaires majeures ». Pourtant, les Houthis contrôlent toujours la majeure partie du territoire.

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Des hommes siphonnent le réservoir d'une voiture. Photo de Spencer Chumbley

En arrivant à Sa'dah, la capitale provinciale, l'ampleur du drame devient évidente. La ville que nous avions visitée 18 mois auparavant est méconnaissable. Dans certaines rues, tous les bâtiments ont été bombardés. Les magasins, restaurants, et maisons ne sont plus que des tas de briques cassées.

Même les bannières vantant les rebelles houthis ont disparu. En 2014, la ville était recouverte de messages tels que : « Dieu est grand. Mort à l'Amérique. Mort à Israël. Maudits soient les Juifs. L'islam triomphera. »

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Des combattants houthis à un poste de contrôle, à Sa'dah. Photo de Spencer Chumbley

Le petit bar à jus que nous apprécions est désormais fermé. Le café autrefois géré par un gamin de dix ans mature et imperturbable n'est plus. La mosquée de l'imam Al-Hadi est l'une des plus vieille au monde. Elle existe depuis 1 300 ans. Elle est désormais fermée, pour la première fois de son histoire.

Beaucoup des bâtiments alentour, y compris le marché autrefois prospère, n'existent plus. Les murs autour de la mosquée sont endommagés, mais le bâtiment tient encore debout. Pas loin, les bâtiments du gouvernement local ont été détruits. Manifestement, la coalition, appuyée par les États-Unis et la Grande-Bretagne, a choisi ses cibles.

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Anderson devant les ruines de la maison d'un barbier à Sa'dah. 27 membres de la famille du barbier ont perdu la vie. Photo de Spencer Chumbley

Nous nous asseyons au bord d'un énorme cratère situé à côté de la mosquée et regardons les maisons ravagées par les bombes. Dans l'une d'elles se trouve une valise bourrée de vêtements, encore ouverte – comme si quelqu'un avait essayé de faire rentrer autant de choses que possible. La bombe a peut-être atterri à ce moment précis, ou peut-être cette personne a-t-elle eu le temps de s'enfuir.

Nous nous rendons ensuite dans un entrepôt loué par Oxfam, en partie détruit. Le missile a atterri pile au centre du bâtiment. Le toit n'existe plus mais les murs tiennent toujours en place – grâce à des poteaux temporaires en acier.

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Sajjad Mohammad Sajid, directeur d'Oxfam au Yémen, me précise par mail la chose suivante : « Le contenu de l'entrepôt n'avait aucune valeur militaire. Il s'agissait de fournitures humanitaires. Heureusement, aucun membre de l'équipe ne se trouvait sur les lieux au moment du bombardement. Des milliers de civils yéménites n'ont pas eu cette chance. »

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Un enfant tient les restes d'une bombe à sous-munitions de fabrication américaine, à Sa'dah. Photo de Peter Salisbury

Alors que je regarde à travers les fissures du bâtiment, une vieille femme, penchée sur sa canne et affublée d'un châle noir poussiéreux – qui couvre l'intégralité de son corps à l'exception de ses yeux et ses mains – s'approche de moi.

« Oh mon fils, me dit-elle. Ils ont bombardé nos tentes. Elles étaient pleines de matelas, de nourriture et de vêtements. Nous n'avons plus rien à présent. »

Portant sur elle un sac en tissu blanc et une casserole, elle nous conduit à ce qui lui fait désormais office de maison : deux tentes de fortune construites à partir de tôle et de rochers. Elle nous fait visiter les lieux. On y trouve une petite cuisinière à gaz, des tomates pourries et un tas de vieux vêtements sur lequel elle dort. Un chat décharné traîne à la recherche de nourriture. « Nous n'avons pas la moindre feuille de khat, précise-t-elle. Pas de matelas, pas de couverture. Pas même un riyal. Nous sommes des réfugiés, mon fils. Nous n'avons plus rien. » Elle tient à nous faire du thé et demande à Dieu de nous protéger.

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Anderson examine les restes d'un missile lancé sur un mariage à Moka, sur la Mer Rouge. Photo de Spencer Chumbley

Son fils et ses quatre petits-fils s'assoient à nos côtés. L'un des garçons semble heureux l'espace d'un instant et terrifié l'instant d'après.

« Il a des problèmes de concentration et des moments d'absence, raconte son père. Il a vu l'explosion, il était tout seul. Sa santé mentale est vacillante. Depuis ce jour, il n'a jamais retrouvé son état normal. »

« Il est fou », ajoute l'un de ses frères.

Les Saoudiens possèdent certaines des armes les plus avancées et peuvent viser avec une extrême précision. Ils ont pourtant détruit des écoles – 159 jusqu'à présent selon l'ONU –, des hôpitaux, des stations-service, des ports, des logements de civils, des magasins et des centres de stockage de produits alimentaires. Le 15 mars dernier, une frappe aérienne a touché un marché dans le nord-ouest du Yémen, coûtant la vie à près de 120 personnes.

MSF, à qui nous avons rendu visite lors de notre voyage, a vu ses centres être détruits à quatre reprises. En octobre, peu après notre départ du Yémen, un hôpital situé près de Sa'dah a été ravagé par une série de frappes aériennes. Il s'agissait du seul centre médical dans une région comptant plus de 200 000 habitants. L'ONG a rouvert une clinique dans la salle du personnel de l'hôpital – la seule partie du bâtiment épargnée – mais se bat actuellement pour convaincre son équipe que le lieu est sécurisé.