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Drogue

Comment j’ai échangé une clope contre de la MDMA

Dans un festival de musique, mes talents de négociateur m'ont permis d'obtenir de la drogue gratuitement.

L'auteur tenant sa cigarette. Toutes les photos sont de l'auteur.

Il y a près de dix ans, un certain Kyle MacDonald est devenu célèbre après avoir échangé un trombone contre une maison. Bon, ce deal n'a pas été aussi simple en fait. Entre-temps, ce Canadien a dû procéder à 14 trocs divers, impliquant notamment le chanteur Alice Cooper, une ville du Saskatchewan et l'industrie du cinéma.

Inspiré par un fait divers qu'Adam Smith aurait aimé décortiquer dans le cadre de la distinction entre valeur d'usage et valeur d'échange, j'ai décidé de profiter du système ancestral du potlach avec pour simple et unique objet en ma possession une clope. Mon objectif était assez ambitieux : obtenir un peu de cocaïne dans le cadre d'un festival australien.

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Je supposais qu'un festival serait l'endroit idéal, tant sa logique de « vase clos » force les gens à apporter tout ce dont ils ont besoin dans l'enceinte de l'événement. Histoire de me compliquer (un peu) l'existence, j'avais oublié de me munir de la cigarette en question. Je suis donc parti à la recherche de la précieuse clope sans avoir aucune possibilité d'échanger quoi que ce soit.

Le mec sur la photo ci-dessus était ravi de me filer une cigarette quand je lui ai révélé mon projet d'article.

Une fois la cigarette en poche, je me suis mis en tête de l'échanger contre n'importe quoi ayant un poil plus de valeur – de l'alcool, un parasol, une casquette, n'importe quoi. Il faisait chaud, et personne ne semblait vouloir pactiser avec moi. J'ai croisé un type trimbalant de la bière dans un shaker normalement consacré aux shakes protéinés – type qui avait l'air de passer plus de temps à parler de systèmes hydroponiques que de muscles sterno-cléido-mastoïdiens. Je lui ai proposé ma cigarette contre son fond de bière. Il m'a envoyé me faire foutre.

Un peu plus tard, un gars avec un t-shirt aux couleurs du lobby LGBT a accepté d'échanger un joint contre ma clope – tout en me forçant à rester avec lui pendant un long moment le temps que ses potes le rejoignent. De la drogue contre du tabac : comment pouvais-je refuser ? Sauf qu'après 40 minutes d'attente, ce mec s'est mis à se rouler par terre sans raison aucune. Sa mâchoire contractée lui donnait l'allure d'un vélociraptor sur le point de bouffer une chèvre. Submergé par mon sens de l'éthique, j'ai décidé de renoncer à cette transaction. Je ne voulais pas que l'on m'accuse de profiter de la faiblesse des autres.

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Ma chance a tourné en me rendant aux toilettes pour chier un bon coup. Là, j'ai croisé deux bros éméchés qui se plaignaient de ne pas avoir de clope. Bingo !

En compagnie d'une copine, ils ont accepté d'échanger quatre bâtonnets d'encens contre ma cigarette. Par la suite, j'ai essayé de repérer un hippie susceptible d'être maniaque quant à l'odeur régnant dans sa tente.

Ça n'a pas manqué. Très rapidement, j'ai croisé un mec désireux de disserter au sujet de la dangerosité des chemtrails et de la présence de fluor dans l'eau. Je l'ai écouté poliment, avant de lui proposer une offre qu'il ne pouvait pas refuser : quatre bâtonnets d'encens contre un joint très mal roulé. Il a dit oui.

Puis, je suis tombé nez à nez avec ce gentleman, lui aussi membre de la confrérie des t-shirts bariolés. La conversation était plutôt sommaire et m'a rappelé mes années collège.

Hey mec, tu veux un joint ?
Ouais.
Qu'est ce que tu peux me filer en échange ?
Deux cartouches de protoxyde d'azote.

Bon, je sais que vous me jugez et que vous traitez avec condescendance les types qui avalent du gaz hilarant. Malgré tout, ce truc revient fortement à la mode, et m'a permis d'obtenir deux bières fraîches de la part d'une jeune fille appréciant elle aussi les hauts bariolés.

Le soleil était très haut dans le ciel. Aucun oiseau ne prenait le risque de survoler l'enceinte du festival, tant l'astre céleste dardait violemment ses rayons. Il faisait plus de 40 degrés et le bar le plus proche se trouvait à plus de 10 minutes de marche. Je me doutais que sur le marché local, mes deux bières étaient fortement valorisées.

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J'ai repéré un type lorgnant impudemment sur mes deux oasis en canette. Je lui ai proposé une transaction que je jugeais équitable : ma bière contre son paquet de clopes. Il a accepté, en me précisant que ses cigarettes venaient de Corée. Je m'en foutais un peu, pour tout vous dire.

Je commençais à être très satisfait de mes qualités de négociateur, quand une jeune fille a déboulé pour me demander une clope – échange interpersonnel le plus courant dans le cadre d'un festival, au coude-à-coude avec la remarque phare : « Putain, y'a Paul Kalkbrenner sur la scène Pitchfork, faut tracer. » Quoi qu'il en soit, cette jeune fille a accepté de me filer trois gélules de MDMA contre l'intégralité de mon paquet de clopes.

J'avoue avoir été tenté d'achever mon article sur ce triomphe. J'avais réussi à gravir les échelons aussi rapidement que Jean Sarkozy au sein de l'EPAD. Sauf que j'étais bien décidé à aller au bout de mon aventure, quitte à me procurer de la merde. C'est ce que j'ai fait quand j'ai croisé un mec de l'âge de mon père, qui m'a proposé un « sachet de cocaïne » contre mes trois gélules.

Je vous laisse juger par vous-même de la qualité de cette coke – qui n'en était sans doute pas. Pour ma part, j'ai tout jeté dans les chiottes, et ai continué à faire la fête sans me droguer, vantant la bonté des êtres humains auprès des autres festivaliers.

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