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Comment aller clubber seul tout

Non, ce n’est pas triste ou bizarre d'enflammer le dancefloor solo — c’est même étonnamment libérateur.
Club solo
Photo : Chris Bethell

Après presque deux années d’incertitude et de fermetures successives, aller en club apparaît aujourd’hui comme une expérience mystique — il flotte dans l’air un hédonisme moite qui n’existait pas en 2019. Mais que faire si vos potes ne sont pas aussi déterminés que vous à intercepter tous les beats sur un rayon de 30 km ?

Avant d’écarter l’idée, prenez un moment pour considérer les avantages de sortir en solo ; ne pas être obligé de subir les pauses clope interminables de votre pote, ne pas passer votre temps à essayer d’en retrouver un autre entre le DJ booth et les vestiaires, aucune dépense altruiste au bar qui fait grimper en flèche le coût total de votre soirée. Et, surtout, la possibilité de quitter les lieux quand vous le voulez — et pas parce que quelqu’un s’est à nouveau fait foutre dehors pour quelques traces sur la lunette des chiottes.

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Croyez-en mon expérience de clubbeuse solitaire. Ma première sortie a eu lieu à Montpellier, en France, alors que j’étais en vacances avec mon père (c’est le danseur le plus incroyable que je connaisse même si nos goûts musicaux sont bien trop différents pour trouver un terrain d’entente sur la playlist qui passe dans la caisse ou la scène électro française).

Mis à part les transitions discutables entre les morceaux, danser toute la nuit en compagnie d’inconnus m’a apporté un sentiment de liberté que je n’avais encore jamais ressenti en faisant la fête avec mes potes. Je ne sacrifierais jamais l’euphorie de partager un dancefloor avec mes plus proches amis, mais le fait de ne pas avoir à suivre un groupe m’a permis de profiter à fond de chaque seconde, comme je l’entendais. Si tout ça vous semble séduisant, lisez les conseils que j’ai récoltés auprès d’autres clubbers solo invétérés. 

Faites-vous de nouveaux potes (et abandonnez-les quand vous voulez)

L’un des trucs les plus cool quand vous sortez seul, c’est la possibilité de nouvelles rencontres dont vous ignorez encore tout. J’ai probablement parlé à plus d’une vingtaine de personnes pendant mes quelques heures de clubbing à Montpellier, mais ce que j’ai préféré, c’est la liberté de passer d’un groupe à l’autre. Profitez de la compagnie de vos nouveaux potes, mais n’oubliez pas la flexibilité dont vous disposez en tant que teufeur solitaire — si vous avez envie de changer de salle ou si la conversation commence à vous emmerder, vous n’avez pas besoin de justifier votre départ soudain.

Sean O’Connor, 29 ans, gestionnaire d’événements, fait la fête tout seul depuis 2011. D’après lui, aller seul en club l’a poussé à créer des liens avec d’autres personnes. « Je suis quelqu’un de très introverti », explique-t-il, « et ces expériences m’ont aidé à m’adapter aux situations sociales et à surmonter l’anxiété lors de rencontres avec de nouvelles personnes. »

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Dan Funke, 20 ans, s’est rendu en club en solo environ quatre fois. Mais pour lui, « aller seul en soirée ne signifie pas faire la fête tout seul ». On a la possibilité de rencontrer plein de nouvelles personnes et se faire des amis est bien plus facile qu’on ne pourrait l’imaginer : « La plupart des gens sont gentils et ouverts, un groupe va sûrement vous adopter ou vous allez d’office rencontrer quelqu’un avec qui passer la soirée. »

« Fake it till you make it »

Quelques heures avant ma soirée, j’étais dans le tram quand j’ai repéré trois mecs en talons hauts avec des paillettes dans la barbe. Je leur ai parlé de mes projets de sortie en solo, leur ai demandé s’ils avaient des recommandations d’endroits où aller et ils m’ont immédiatement invitée à les rejoindre pour une performance drag. La question du before était réglée.

La leçon à tirer ici, c’est de faire semblant d’être hyper à l’aise. Aborder un groupe d’inconnus peut paraître intimidant, mais en réalité, tant que vous n’êtes pas arrogant ou sexuellement agressif, la plupart des gens seront flattés que vous leur demandiez un conseil ou que vous les complimentiez sur leur look.

Si vous avez besoin d’un petit coup de boost supplémentaire, lancez votre playlist favorite en chemin. Ça vous aidera à faire une entrée digne de ce nom dans la salle, même si à l’intérieur de vous, c’est un peu l’angoisse.

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Batterie chargée et argent liquide

Mon sac de soirée contient les essentiels réglementaires : chewing-gum, smartphone, cartes bancaires, baume à lèvres et argent liquide. Gardez à l’esprit que taxer une clope ne sera jamais un problème, mais que si vous avez besoin de 20 balles pour rentrer en taxi parce que votre portable n’a plus de batterie, trouver une bonne âme pour vous aider risque d’être plus compliqué. Soyez autonome et apportez tout ce dont vous pourriez avoir besoin, y compris un portable chargé à 100 %. Et si vous êtes en vacances, pensez surtout à noter l’adresse de votre logement sur un papier, au cas où votre téléphone vous lâcherait. 

Renseignez-vous et revoyez votre état d’esprit

Yazan Saleh, DJ de 22 ans, est allé en club tout seul plus d’une cinquantaine de fois. « Tu es le seul pilote de ta nuit et de ton expérience », s’enthousiasme-t-il. Yazan recommande vivement de planifier un peu la soirée avant de plonger sous les stroboscopes : « Avant d’y aller, faites quelques recherches sur l’artiste, la programmation et le lieu, histoire de vous familiariser avec l’atmosphère. »

Le clubbing est si souvent considéré comme une expérience communautaire que nous passons à côté de la liberté et de la flexibilité qu’il y a à suivre ses propres instincts. Yazan compare le clubbing en solo à la visite d’une ville tout seul — pour moi, l’expérience est similaire à celle d’aller dans une galerie ou au restaurant, voire à un cours de fitness. En d’autres termes, si vous considérez la sortie en club comme une activité normale que vous pouvez pratiquer à votre guise, vous serez peut-être plus enclin à vous lancer.

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Faites attention à vous

Les deux premières heures de ma soirée en solo, j’ai eu du mal à trouver ma place. Chaque spot que je choisissais était directement infiltré par un type qui dansait bien trop près de moi. Un peu plus tard, j’ai pu danser en compagnie de deux personnes avec lesquelles j’avais discuté auparavant et je me suis sentie moins vulnérable, mais ce harcèlement m’avait rappelé l’importance de ne pas négliger ma sécurité.

Ce conseil a d’ailleurs été souligné par toutes les personnes que j’ai interrogées. « Vous devez toujours faire passer votre propre sécurité en premier. Surtout si vous êtes une femme ou une personne transgenre — et je suis les deux », m’a expliqué Dan. « Prévenez vos amis de l’endroit où vous vous trouvez. Partagez-leur votre position en direct. Surveillez votre consommation d’alcool et n’acceptez pas de drogues de personnes que vous ne connaissez pas. »

Sean me rappelle le programme mis en place au Royaume-Uni, Ask for Angela : « Si vous n’arrivez pas à vous débarrasser d’une personne qui vous met mal à l’aise ou que vous ne sentez pas, vous pouvez toujours demander Angela au bar ou au vestiaire. » Le personnel comprendra que vous avez besoin d’aide.

Malheureusement, les dancefloors ne sont pas encore les safe places qu’ils devraient être, en particulier pour les personnes dont le genre et l’identité sont marginalisés. Sortir sans le sentiment de sécurité que procure un groupe d’amis peut donc sembler contre nature, même dans les meilleurs moments. Cela dit, si vous vous sentez suffisamment safe pour faire la fête en solo, la nuit offre une infinité de possibilités. Prenez le temps de vous préparer comme il faut, et pénétrez l’obscurité et l’inconnu avec panache. Vous pourriez bien passer la soirée la plus incroyable de votre vie.

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