FYI.

This story is over 5 years old.

Indonésie

En Indonésie, une fatwa contre les fake news

La fatwa va déclarer la propagation de mensonges et de calomnies comme « haram », donc interdite.
Sipa USA via AP

Le plus haut conseil clérical musulman d'Indonésie a indiqué ce mercredi qu'il préparait une fatwa (un avis juridique religieux) pour réduire la propagation des « fake news » utilisées pour alimenter les tensions ethniques et religieuses et pour influencer les prochaines élections.

La fatwa va déclarer la propagation de mensonges et de calomnies comme « haram », donc interdite. Cependant, les fatwas ne sont pas juridiquement contraignantes et le conseil n'est pas un organe gouvernemental officiel, ce qui veut dire que l'impact de cette décision sera sans doute limité.

Publicité

Le gouvernement essaye aussi de limiter la propagation de fake news. Le mois dernier, le ministère de la Communication a bloqué 11 sites Internet qui diffusaient de la désinformation. En novembre dernier, le ministère avait déjà eu recours à cette technique.

« Nous allons publier la fatwa le plus rapidement possible, parce que la situation est inquiétante, » a dit Maaruf Amin, le président du Conseil indonésien des Oulémas. « Espérons qu'au moins les musulmans ne seront plus impliqués dans ces canulars. » Amin a ajouté que le conseil avait consulté le gouvernement avant de diffuser sa décision « pour que notre approche ne soit pas en opposition avec la politique du gouvernement. »

En Indonésie, les fake news posent problème depuis quelque temps, mais ces derniers mois la situation s'est aggravée — notamment à cause d'histoires ciblant les minorités chinoise et chrétienne du pays.

Parmi les fake news les plus partagées, on retrouve une histoire qui voudrait que 10 millions de travailleurs chinois soient arrivés dans le pays, ou encore que le symbole communiste de la faucille et du marteau soit caché sur les nouveaux billets indonésiens. On a pu aussi lire qu'un vaccin gratuit contre le VPH (virus du papillome humain) pourrait rendre les femmes infertiles — ce qui serait une partie du plan de la Chine pour affaiblir la population indonésienne musulmane.

Une fake news a même mené un homme politique à être accusé de blasphème à cause d'une vidéo mal sous-titrée qui a été largement partagée sur Facebook. Basuki Tjahaja Purnama, surnommé Ahok dans le pays, est en campagne pour se faire réélire gouverneur de la province de Jakarta le 15 février prochain. Cette élection risque d'être sacrément disputée. Purnama est d'origine chinoise et de confession chrétienne, alors qu'il se retrouve face à deux candidats musulmans.

Publicité

Purnama est accusé de blasphème après qu'une vidéo d'un discours de campagne a été éditée. Des musulmans ultra-conservateurs clament que Purnama a insulté le Coran pendant ce discours. De son côté, Purnama et ses soutiens indiquent qu'il critiquait ceux qui s'y référaient strictement. Puisque la vidéo a été diffusée largement, des milliers de manifestants, encouragés par des leaders musulmans rigoristes, ont battu le pavé à Jakarta pour appeler à l'emprisonnement de Purnama.

Le président Joko Widodo, considéré comme un musulman modéré, a promis de s'attaquer au problème des fake news. « Les mensonges, calomnies et discours haineux sur les réseaux sociaux troublent de plus en plus les Indonésiens, » a tweeté Jokowi, le surnom du président, le 29 décembre dernier. « Nous avons besoin d'appliquer la loi de manière rigoureuse. »

Le président sait bien quel impact peut avoir une fake news. Pendant les élections présidentielles de 2014, une campagne de diffamation assurait qu'il était le fils de membres du parti communiste indonésien, que ses ancêtres étaient chinois et qu'il était chrétien. Widodo a été contraint de diffuser son contrat de mariage pour stopper les rumeurs.

Le problème des fake news en Indonésie, un pays de 260 millions d'habitants, est amplifié par l'importance grandissante des réseaux sociaux, notamment Facebook et Twitter. Pour de nombreux Indonésiens, l'Internet commence et s'arrête à Facebook. Le pays affiche le plus haut taux d'utilisation de téléphones mobiles, d'après eMarketer. Et cette influence d'Internet va encore grandir, parce que seulement un tiers des Indonésiens ont un accès à Internet pour le moment.

Le président a appelé les utilisateurs de réseaux sociaux d'arrêter de diffuser des fake news, et le gouvernement a demandé de l'aide à Facebook pour faire face au problème.


Suivez VICE News sur Twitter : @vicenewsFR

Likez la page de VICE News sur Facebook : VICE News FR