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FRANCE

De nouveaux chiffres pour mieux comprendre le suicide en France

La publication ce mardi d’un nouveau rapport de l’Observatoire national du suicide apporte de nombreux renseignements quant aux populations et régions concernées, ainsi que les pistes privilégiées par les spécialistes pour lutter contre le suicide.
Image via Flickr / Frédéric Bisson

À l'occasion de la 20ème journée nationale de prévention du suicide, l'Assemblée nationale a accueilli ce vendredi de nombreux médecins, psychologues ainsi que des responsables religieux et politiques, dans le cadre d'un colloque intitulé « Bien-être et société ».

En amont de cette journée, un rapport de 480 pages réalisé par l'Observatoire national du suicide (ONS), avait été remis ce mardi au Ministère de la Santé. Il porte sur l'année 2012.

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On y apprend entre autres qu'en France, il y a eu 9 715 suicides recensés en 2012, soit presque trois fois plus que le nombre de décès suite aux accidents de la route cette année-là. Cela équivaut à 27 suicides par jour. Parmi ces personnes qui se sont donné la mort, 75 pour cent étaient des hommes.

« Ce sont chaque année entre 10 000 et 11 000 personnes qui mettent fin à leurs jours, et environ 80 000 personnes qui sont hospitalisées à la suite d'une tentative de suicide », avait déclaré ce mardi la ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui préside également l'ONS. Elle l'a créé en 2013 sur demande de nombreux spécialistes.

« Par rapport à d'autres pays, la France est légèrement en retard sur la problématique du suicide, mais nous avançons beaucoup depuis deux ans », nous explique la psychologue Isabelle Chollet. Au sein de l'ONS, elle représente l'association Le Refuge, qui oeuvre contre l'isolement des jeunes. Contactée par VICE News ce vendredi après-midi, la psychologue estime que ce rapport n'est pas « forcément alarmant », mais qu'il met en lumière des pistes de travail « qu'il faut suivre rapidement ».

Nombre de décès en baisse, fortes inégalités parmi les régions

En 2014, le tout premier rapport de l'ONS notait déjà que malgré son espérance de vie élevée, la France souffrait d'un taux de suicide « parmi les plus hauts en Europe ».

Dans cette nouvelle enquête publiée ce mardi, il apparaît que les populations les plus touchées par le suicide et les tentatives de suicide restent globalement les mêmes : les jeunes filles de 15 à 20 ans ainsi que les femmes dans leur quarantaine (majoritaires dans les tentatives), les hommes âgés de 25 à 44 ans (80 pour cent des suicides masculins) et plus généralement les adolescents, les personnes sans-domicile-fixe ainsi que les individus incarcérés.

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« Pour la première fois depuis le début des années 1990, le nombre de suicides en France métropolitaine est passé [en 2012] sous la barre des 10 000 décès », souligne ce document, qui évoque toutefois une très probable « sous-évaluation ».

« Beaucoup de suicides ne sont pas signalés en France, ou alors ils le sont mais d'une manière trop peu explicite, qui échappe à nos recensements », nous indique Isabelle Chollet. « C'est surtout le cas pour les personnes âgées, qui se suicident énormément mais dont on entend très peu parler. »

Ce rapport de l'ONS précise d'ailleurs que pour se rapprocher de la réalité du phénomène, il est conseillé de gonfler les chiffres indiqués d'environ 10 pour cent, ce qui porte à 10 690 le nombre de décès probables par suicide en France.

Les méthodes utilisées lors des tentatives — quelle que soit l'issue — sont assez diverses : la pendaison (54 pour cent des cas), l'usage d'arme à feu (14 pour cent), la prise de médicament (13 pour cent) ou encore le saut dans le vide et la noyade (11 pour cent au total). Privilégiée par les femmes, la prise de médicaments serait moins mortelle, ce qui peut expliquer les fortes différences observées entre les deux sexes.

Nouveauté dans ce rapport, la présentation d'un « panorama » des taux de suicide par région. L'on retrouve les taux les plus élevés en Bretagne, dans le Nord-Pas de Calais et sur la Côte d'Azur. Des régions où le nombre de suicide a dépassé les 20 décès pour 100 000 habitants en 2012.

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Les associations de prévention et d'accompagnement — elles sont plus d'une centaine en France — mènent des campagnes de plus en plus ciblées, visant tour à tour les adolescents, les salariés sur leur lieu de travail ou encore les détenus en prison.

L'accent mis sur la prévention

Dans son rapport, l'ONS demande que soit mis en place une « nomenclature internationale », car rien qu'en France les termes désignant le suicide sont jugés trop nombreux et gênent le recensement des cas. Grâce à cela, et à un encadré spécifique qui serait placé sur tous les certificats de décès d'ici l'été prochain, la surveillance du suicide devrait alors être renforcée.

« Il faudrait également donner plus de moyens et former les professionnels de santé à reconnaître les signes ou les comportements suicidaires », ajoute Isabelle Chollet. L'ONS conseille par ailleurs la mise en place d'études plus précises prenant en compte certains « facteurs de risque » (faible IMC, consommation chronique d'alcool, vie solitaire, détresse financière).

L'ONS insiste enfin sur ce qu'il appelle la « postvention », c'est-à-dire le suivi des personnes ayant effectué une tentative de suicide mais aussi de leurs familles, qui deviennent plus vulnérables.

« Pour chaque décès par suicide, 26 personnes sont directement ou indirectement endeuillées, soit environ 300 000 personnes chaque année, auxquelles il faut ajouter 3 750 000 Français touchés par la tentative de suicide d'un proche. » alerte l'Observatoire.

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« La surveillance reste assez compliquée », nous explique Isabelle Chollet, « car tout n'est pas encore informatisé, il faut mettre en place des logiciels dédiés ». Ces outils devraient toutefois voir le jour prochainement, d'après la psychologue.

Selon des chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 800 000 personnes se suicident chaque année à travers le monde, ce qui en fait la quinzième cause de mortalité tous pays confondus.


Image via Flickr / Frédéric Bisson

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