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Activisme

Kévin aux doigts d’argent : le coiffeur des sans-abri

« Un coiffeur joue un peu le rôle de confident, ils se dévoilent donc à moi en évoquant les difficultés de la rue, leur parcours, leur vie… »
Photos : Séverine Carreau / HL 

Avec son accent qui fleure bon la garrigue et sa barbe noire bien fournie, Kevin Ortega sillonne les villes du sud de la France avec sa paire de ciseaux et sa tondeuse. Fort d’une expérience de 10 dans le bénévolat auprès des sans-abri, le coiffeur-barbier se balade depuis quelques mois dans les rues d’Aubagne ou de Marseille pour offrir des coupes de cheveux aux sans-abri qui le souhaitent. La photographe Séverine Carreau du Studio Hans Lucas l’a suivi pendant ses maraudes.

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VICE : Comment avez-vous eu l’idée de coiffer des sans-abri ?
Kévin Ortega : Au mois d’avril, je suis tombé sur une vidéo d’un coiffeur qui faisait cela, mais à Londres. Une semaine après, je me suis lancé et j’ai commencé à coiffer des gens dans la rue du côté de La Ciotat. Le premier sans-abri que j’ai coiffé avait des dreadlocks. J’ai pratiquement tout coupé, alors que cela devait faire des années qu’il n’était pas allé chez le coiffeur. Depuis, on a lié une relation d’amitié, et je passe le voir dès que je suis de passage à La Ciotat.

Ce n’est pas commun que de venir en aide aux sans-abri de cette manière. Pourquoi avoir choisi ce biais ?
C’est important selon moi de leur apporter un service différent. Puis cela leur donne du baume au cœur. Vous savez, c’est important de retrouver un peu de confiance et d’estime de soi quand on vit dans la rue.

Vous étiez déjà engagé auprès des sans-abri avant de lancer votre initiative ?
Cette initiative ne vient pas de nulle part, puisque j’étais déjà sensible à ces problématiques. Pendant une dizaine d’années, j’ai été bénévole aux Restos du Cœur à Marseille. Je coiffe donc les sans-abri quand j’ai le temps, sur mes jours de repos, entre deux et trois fois par mois. J’ai déjà fait plusieurs villes : Marseille, Aix, Toulon, Aubagne, et Paris deux fois.

D’autres coiffeurs vous ont emboîté le pas ?
Certains ont été sensibles à ma démarche, mais cela prend un peu de temps à se mettre en place.

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Comment cela se passe généralement ? Vous sillonnez la ville ou bien vous vous postez à un endroit et les sans-abri viennent jusqu’à vous ?
L’idée c’est que je pars une journée dans une ville. Je sillonne les rues et quand je croise un sans-abri, je m’arrête et je lui propose une coupe de cheveux sur place. Ils sont sensibles à cela parce qu’ils ne veulent souvent pas quitter leur habitation de fortune ou leur coin de rue. J’interviens donc directement auprès d’eux. Les sans-abri sont parfois surpris par ma démarche et se méfient un peu. Je les mets donc à l’aise du mieux que possible.

De quoi causez-vous avec les sans-abri que vous coiffez ?
C’est un peu comme au salon, sauf qu’on parle aussi de mon initiative. Puis, vous savez un coiffeur joue aussi un peu le rôle de confident, ils se dévoilent donc à moi en évoquant les difficultés de la rue, leur parcours, leur vie…

Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Je compte intervenir dans des écoles pour sensibiliser les apprentis coiffeurs, mais aussi les apprentis du secteur de l’esthétique. Il y a peu une esthéticienne m’a accompagné lors d’une maraude à Toulon, où elle a pris soin des mains des sans-abri pendant je les coiffais. Puis je vais continuer à faire mon petit tour des villes, ce dimanche je serai à Aubagne.

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